«Pawol Kreyol»

«L’Enfant-Bois» d’Audrey PULVAR :
Eva - naissante*

par Véronique LAROSE

boule

Pawol Kreyol

Alfred ALEXANDRE | Ano (Eddy FIRMIN) | Nicole CAGE-FLORENTINY | Philippe CANTINOL | Aimé CÉSAIRE | Ina CESAIRE | Patrick CHAMOISEAU | Romuald CHERY | Pierre CLERY | Maryse CONDÉ | Raphaël CONFIANT | Tony DELSHAM | Suzanne DRACIUS | Suzanne DRACIUS 2 | Igo DRANÉ | Jules EULALIE | Rodolf ETIENNE | Daniel ILLEMAY | Félicien JERENT | Fabienne KANOR | Elise LEMAI | Alain MABIALA | Didier MANDIN | Tony Mango | Elvire MAUROUARD | Ruth Narbonnais | Daniel-Yves PHAROSE | Gisèle PINEAU | Audrey PULVAR | Juliette SMERALDA | Sylvia SERBIN | Joseph ZOBEL | Adèle et la Pacotilleuse | Cénesthésie et l’urgence d’Etre… | La Compagnie «BOUKOUSOU» de Max DIAKOK | Des travaux collectifs littéraires | La permanence psychologique du CASODOM | La Noce chez les Petits Bourgeois…créoles | Nous étions assis sur le Rivage du monde… | Quand la Révolution, aux Amériques, était nègre… | «l’Alchimie des Rêves» | «Les Voix nègres de Victor Hugo» | Pour une Mémoire musicale antillaise | Le «Quiz-kréyol» de Philippe MARIELLO | Les Postiers déracinés Provinciaux, Antillais… des racines et des lettres» | La Mémoire enchaînée – Questions sur l’Esclavage de Françoise Vergès | Les Editions DESNEL | Deux recueil des Editions DESNEL | Hommage à Aimé Césaire - Symphonies Nègres | L’Oralité créole en envol! | Atelier de créole à Paris | L’Avenir est Ailleurs | Atelier de créole à l’Amicale RATP DOM TOM | En Poésie la Vie | Ti Niko le héros espiègle | «A l’ombre du Corossolier» | La Prison vue de l’intérieur | Zôdi nonm | Pilibo | Xavier Harry | Mes Quatre Femmes | Firmine RICHARD

L'enfant-bois
L'enfant-bois. Janvier 2004.
Mercure de France, ISBN 2-7152-2446-X. 16 €

Audrey PULVAR signe là son premier roman. Narration d’une Evanescence*: Eva, jeune trentenaire, perd pied face à la réalité qui la submerge. Comment oublier un Passé de culpabilité? Elle choisira de re-naître, malgré tout, pour cautériser-cicatriser les plaies d’hier…

*Evanescence: caractère de ce qui disparaît par degrés, qui s’efface peu à peu.

«L’avantage quand on prend le parti de devenir muette, c’est qu’une fois les premières inquiétudes passées, les gens s’habituent à votre silence. Ils s’imaginent confusément que si vous ne parlez pas, vous n’entendez ni ne pensez. Alors, ils oublient jusqu’à votre présence. Depuis la mort de Théo il y a dix-huit mois, Eva traverse temps et gens, sans que personne s’aperçoive quand elle entre ou quitte une pièce. Fantôme. Immatérielle.» (p. 151)

1. Audrey PULVAR: ses implications

Trentenaire, Audrey PULVAR est née en Martinique. Grandie dans une ouverture au monde et à ses actualités, en fille de syndicaliste martiniquais indépendantiste. Une vocation? l’information, justement. Un cursus journalistique en France: en 1994, elle sort Major de sa promo à l’ESJ (l’Ecole Supérieure de Journalisme). Dès lors, elle gravit les échelons d’ATV (Antilles Télévision) de 1994 à 2002: stagiaire, Rédactrice en chef adjointe, Rédactrice en chef.

En 2002, elle tente l’aventure parisienne: un défi qui la mène dans différentes rédactions – LCI, TV5 et enfin France 3. Consciente, en permanence, qu’il lui faut agir en combativité. Affirmée.

2. Son premier roman : «l’Enfant-Bois» (2004 – éd. Mercure de France)

Prix «Arc-en-ciel» 2004 de Média Tropical - Prix Carbet des Lycéens 2005

L’écriture d’Audrey PULVAR est née en 2000, crédibilisée par les encouragements de Patrick CHAMOISEAU.

Synopsis et extraits:

L’Exil. Chirurgienne à Londres, Eva vit en exil d’elle-même depuis plus de vingt ans quand elle apprend que Mamie Nou, sa grand-mère atteinte de la maladie d’Alzheimer, se meurt là-bas, en Martinique. A 32 ans, le passé d’Eva resurgit dans ce sursaut de la Réalité: la mort de cette Nou qui a su et pu l’aimer. Malgré tout…

Eva porte un passif affectif lourd: sa mère, Marie-Louise, l’a bannie de son ventre et de son cœur dès sa naissance. Eva, d’instinct, se blottit 11 mois dans ce cocon du monde: «refusant de sortir du ventre-asile» (p.88). Marie-Louise lui préfère, ostensiblement, ses deux plus jeunes enfants adultérins, petits anges blonds, Théo et Ada: «J’ai trois enfants et j’élève mes trois enfants. Je ne suis pas obligée de tous les aimer…» (p. 149)

Théo, d’une étonnante maturité pour ses 5 ans, se plaît dans le secret de la bibliothèque municipale: «Parce que moi, le monde extérieur, je ne m’en détache pas, je le regarde. Je le regarde, et puis je le mets à l’intérieur de moi. Eva est un peu comme ça aussi, je crois. […] Moi j’observe tout, et puis après, je vais chercher dans mes livres les choses que je comprends pas. Comme ça, j’ai pas besoin de demander aux grands. J’ai pas besoin d’eux.» (p. 45-46) Théo et Eva partagent un silence, loin «des grands», justement. L’Inceste: «Faire des choses très interdites! Même avec sa peste de sœur, c’était amusant. Se cacher sous les couvertures et glousser en essayant d’imiter les grands…ils trouvaient ça drôle. Surtout en imaginant la tête que ferait Marie-Louise si elle savait…Quoi? Son Ange blond et son Démon noir? Quel bon tour ils lui jouaient, à cette femme cruelle et folle!» (p. 79)

Eva grandie en se forgeant un autre univers de Mère: la Nature l’accueille, en bienveillance de sens. Une animalité indomptée, puisque sevrée de mère – de force. Elle trouve même en Bénédictin, son compère-cochon, un ami nonchalant et écoutant qui, hélas, n’échappera pas à la loi des hommes: Eva assiste, muette, à cette mise à mort vécue comme un «assassinat».

Une trahison de trop, traumatisante. A vif. Inconscient du danger, Théo la taquine: «elle fait comme si quelqu’un était mort» (p. 12). Le drame d’un jeu d’enfants - tragique. Folie-furie: Eva pend son frère, comme on a pendu et éviscéré Bénédictin, quelques jours plus tôt.

De là, une errance définitive: placée en institut, deux années à s’abîmer physiquement et mentalement, Eva part pour l’Angleterre et tente de noyer les voix de la culpabilité en tranquillisants, drogues, somnifères. Jusqu’à ce qu’elle rencontre Nehla, de vingt ans son aînée. Son Aimée qui l’aidera à se relever et à ne pas tout détruire autour d’elle.

Le retour en Martinique confrontera Eva à cette identité niée, en «fille de» (p. 150).

3. Une narration éclatée : éclats de voix

Le fil du temps et des mots est tissé de plusieurs voix, selon plusieurs trames de drames: Eva, Marie-Louise, Mamie Nou, Théo, se racontent, unis par les mêmes larmes. Une mise en perspective de leur existence qui donne un sens au roman, par touches alternatives, de tonalités différentes.

Eva s’exprime en «moi» et «elle» qui butent/luttent toujours contre Marie-Louise, la figure maternelle du Déni définitif:

«Des semaines, des mois couchée à regarder le plafond. Qui suis-je au juste? Et tous ces cris en moi? Pas un mot, pas un geste. […] Je suis dans un corps qui ne m’appartient plus. Je flotte, quelque part dans la pièce. Etait-ce déjà l’autre ou encore un peu moi? Je regarde quelqu’un d’autre dans mon corps vivant. Moi, sans moi. Elle. […] Elle, moi sans moi, elle se lève. Elle réapprend à mettre un pied devant l’autre. […] Deux ans dans cette chambre et sa grande fenêtre. […] Elle ou moi? Peut-être les deux, peut-être seulement elle. […] C’est elle qui est guérie, pas moi.» (p. 160-161)

4. Un repli: l’Animalité

Eva doit sa sur-vie à cette animalité, pour se convaincre qu’elle doit vaincre le monde alentour. Seule : «ma foutue animalité, ma voix furieuse à moi me commandaient de rester en vie» (p. 180) - «je devrai [futur de la détermination] cheminer seule. Trouver seule comment vaincre le monde entier, marchant sur le sidérant abîme du désamour d’une mère» (p. 207)

4.1 L’animalité révélée, réveillée

Eva est définie dans de nombreuses périphrases en cette part animale:

«Fille-dehors du sous-bois» (p. 15) - «Fille-dehors.» (p. 16) -«La fille des bois» (p. 17) - «la fille des bois confondue dans le palétuvier tressaille» (p. 21)

«Mangouste. Prête à bondir sans bruit» (p.17) - «Eva descend de sa chaise. Sans bruit. Mangouste au cœur de la forêt.» (p. 151)

«les autres enfants se moquent sans cesse de son museau rose et marron. Grande, grande sa bouche! On ne voit qu’elle dans son visage» (p. 152)

4.2 Ne plus être, dispar-être

Eva trouve refuge dans une dé-personnalisation: ne plus être. Se muer en «Animale», jusqu’à commettre cet acte irréparable: «Sang. Je ne voyais que ça. Animale. Un voile rouge qui habillait le monde. J’ai atterri dans l’herbe. Prête à déchirer mon frère. […] Je soufflais fort, je montrais les dents. Théo a reculé, les yeux pleins d’effroi. Haine. J’avançais mains écartées dans une menace de lacération, râle sifflant, corps tendu. Je tournais autour de ma proie crachant de colère, grondant sourd, comme un chat sauvage. En un bond, je fus sur lui, à bourrer son petit corps d’une rage inconnue. Quelque chose que je ne savais pas exister en moi. J’étais autre. Animale.» (p. 12)

Se taire, de façon volon-taire, est sa réponse au monde sourd : «je me suis repliée dans le vide imaginaire» (p. 14) - «Pas de bruit. Pas une miyet de bruit» (p. 17) - «L’avantage quand on prend le parti de devenir muette, c’est qu’une fois les premières inquiétudes passées, les gens s’habituent à votre silence. Ils s’imaginent confusément que si vous ne parlez pas, vous n’entendez ni ne pensez. Alors, ils oublient jusqu’à votre présence. Depuis la mort de Théo il y a dix-huit mois, Eva traverse temps et gens, sans que personne s’aperçoive quand elle entre ou quitte une pièce. Fantôme. Immatérielle.» (p. 151)

5. La matrice bienfaitrice

Eva se choisit un statut que sa mère lui refuse. Elle se ferme au monde, autiste. Elle se crée un cocon de sur-vie d’instincts et d’instants – bien à elle: la Nature, déclinée en Flamboyant, Fromager, Rivière, tous aimés dans cette Majuscule d’estime et d’intime:

«Je passais des heures dans mon Flamboyant à penser.» (p. 11)

«Eva quitte les environs de la Rivière et se faufile dans le sous-bois humide. Elle cherche une cachette dans l’antre de la forêt fraîche. A première vue, l’endroit regorge de coins d’ombres à secrets, de fourrés complices, de troncs-maisons pouvant abriter dix enfants à la fois» (p. 15)

«Son cœur…son cœur l’a d’abord aidée, lui donnant le balan indiqué, lui disant où aller et comment revenir, ne quittant jamais le battement régulier de la Rivière. Transe instinctive.» (p. 16)

«Eva avance toujours, se laissant happer. Elle s’emmêle, sereine, dans les branches enlacées. Au détour d’un tronc de Fromager mort à escalader, une pente tapissée de feuilles brunes aux reflets roses lui rappelle un déjà-vu, déjà-aperçu.» (p. 16)

«Elle escalade vite son Flamboyant géant. […] Quand Eva y grimpe, un vert parfum, étrange et agréable, flotte autour d’elle pendant plusieurs jours» (p. 154)

Adoptée, enfin [cf. le Mal de Mère chez Frida, l’héroïne de Fabienne KANOR dans son roman «D’Eaux douces», 2004]:

«J’espérais un matin autre que celui de la veille. La fin du malheur pour aujourd’hui. Je rêvais le début d’une nouvelle vie. Entre, mère. Maman. Je criais en silence mon besoin de toi. […] Berce-moi, mère. Aime-moi» (p. 13)

«Comme se laisser bercer dans une ouate douce. Comme entrer dans le giron géniteur. Comme aller retrouver un bercé d’amour chaud, liquide, protecteur contre l’infiniment laid du dehors» (p.17)

«Une terre humide monte le long de son corps. Boue vive qui l’aspire, lui suce le derme, l’absorbe jusqu’à mi-cuisse. Elle perçoit son mouvement l’enracinant. Elle se dilue. Elle, Eva, redeviendra arbre.» (p. 19)

Je pense alors à ce vers de Rimbaud (1854-1891), dans son poème «le Dormeur du Val» (publié en 1888 – écrit à 16 ans, en 1870): «Nature, berce-le chaudement: il a froid». Une symbiose-osmose qui apaise: «le calme s’installe, dans son corps. Elle ondoie, dans une tiédeur lénifiante. Envahie d’une sensation déconcertante. Comme un retour vers une matrice trop tôt abandonnée réclamant son ventre de nourrisson attaché au sien, ses lèvres d’enfant sevrée pour lui mordre le sein» (p. 21)

Eva vit une rapport de respect instinctif et intensif avec la nature: c’est sa tentative, à elle, de combler cette carence de mère. Eva se nourrit, à l’envi, de cette sève végétale vitale. Le surnaturel intervient dans ce phénomène: «le temps arrêta soudain d’avancer. Tout resta figé dans un souffle. Le monde se regardait sans explication. […] Eva avançait, portée par un balan surnaturel […] Le temps n’avait pas toujours pas repris sa course, le silence commençait à étourdir le monde.» (p. 81) - «un flamboyant avait poussé à l’endroit où l’on avait ramassé Eva dans sa bulle d’eau placentaire» (p. 83)

6. La Féminité noire : une maudition séculaire ?

Eva se situe dans une sombre généalogie féminine: «il y a toujours eu trop de femmes dans cette famille. Et moi, descendante de leur terrifiante lignée, héritière de leur Histoire. Condamnée parce qu’elle m’a faite.» (p. 208)

Dans le roman «D’Eaux Douces» de Fabienne KANOR (2004), Frida a grandi avec ce même héritage des âges, en elle: retour dans ces temps des chaînes avec une histoire déliée par sa grand-grand-manman venue du Pays des Ombres.

La grand-mère d’Eva, Mamie Nou est haïtienne. Elle incarne cette Fanm kreyol  qui a cheminé sur les sentiers abrupts de la Déveine: orpheline à 11 ans, sa mère assassinée, Nou est la survivante des cahots d’un boat people. Rescapée du viol, mariée à Eugène, mulâtre-à-chimères, pour qui elle a porté treize enfants, dans la force et dans la foi:

«O homme. Il y a si longtemps. Si longtemps que tu as choisi cette terre trop fertile pour femme et maîtresse. Sans te soucier de l’appétit de mon ventre à moi. […] Je l’ai fait, treize fois, t’en souviens-tu? Treize grossesses, treize enfantements dans le déchirement et la violence. Treize fois toi et moi en une seule chair, oui. Et jamais un jour de répit pour moi mère, pour moi grand-mère, pour moi maîtresse de foyer.» (p. 28)

«combien de larmes âcres, de nuits à maugréer, seule, une fois de plus, à devoir m’occuper de mes enfants malades. A faire patienter leur estomac affamé, pendant que tu faisais bombance avec ces femmes blanches.» (p. 34)

«ce corps-là wooy, il a déjà souffert, tu m’entends? Il a déjà eu son compte et il est resté fidèle, oui…» (p. 75)

Mamie Nou porte les mains des heures de labeur, continu: «Ses mains. Larges. Ridées mais lisses. Fortes, mais douces. Des mains qui travaillent depuis soixante-quinze ans. Des mains pour bâtir, nourrir, laver, repasser, soigner, caresser, consoler, bercer, sévir, redresser et travailler, travailler encore, travailler toujours» (p. 76) - «Je vois tes grandes mains rouges, le bout de tes doigts lisses, usés par les fétous» (p. 174)

Je me souviens alors des mains de Man Tine, la grand-mère de Joseph ZOBEL dans son roman autobiographique «La Rue Cases-Nègres» (1950). Justement, sa révélation d'écriture s'opère, tragiquement, lors de la veillée de Man Tine. Il lui faut écrire son histoire d'enfant des plantations des années 30. Pour rendre une juste place à la Martinique rurale de son enfance, hantée de figures cassées-crasées par la canne. Les mains de Man Tine représentent affreusement cette usure; elles portent les sillons d'un labeur sans fin, sans frein: «quotidiennement pincées, éraflées, et cramponnées au manche de la houe, en proie aux morsures féroces des feuilles de canne, pour créer la Route Didier.»

7. Le poids de Soi

A ce passif de douleurs, s’ajoute la Culpabilité d’Eva. Assourdie par ces «voix furieuses» (p. 18 - p. 53): ses peurs harcelantes, poursuivantes qui la hantent:

«les voix furieuses qui tempêtent dans sa tête se sont tues. Leur menace orageuse s’en est allée» (p. 18) - «juste un peu trop de whisky parfois, pour faire taire les voix furieuses» (p. 53) - «à 32 ans, elle avait toujours son corps de chat sauvage. Elastique. […] Une terrible force intérieure qu’elle s’évertuait à contrôler. Une colère bâillonnée, une rage contre le monde entier sur lesquelles elle tenter de garder prise. Les voix. Il lui fallait en permanence maîtriser son soukouyan insatiable.» (p. 55) - «Je n’étais plus au monde. […] Les voix furieuses chuchotaient, enflaient, tourbillonnaient autour de moi avant de chuchoter à nouveau, agressives. Bénédictin apparaissait au-dessus de moi. Ses hurlements me transperçaient toujours les tympans. Je nageais dedans.» (p. 148)

Rien ne fait taire ses cris du dedans: ni cocaïne, ni alcool. Eva est sujette à des insomnies et migraines, symptômes persistants d’un mal-être: «ses nuits maladives» (p.50) - «Jamais. Jamais plus ma tête n’a dormi complètement. Vingt-cinq ans et jamais une nuit d’abandon absolu» (p. 149).

Auto-destructrice, elle a fait une tentative de suicide à l’aube de sa jeunesse. Rien n’a guéri, puisqu’une gangrène de Haine la ronge: «l’Atroce resterait dans mon corps à jamais.» (p. 69) - «Pardonne-moi, maman, s’il te plaît. Je sais bien que je t’ai fait assez de peine pour que tu ne m’aimes plus jamais. Je sais bien que maintenant tu ne voudras plus me regarder, plus me parler, plus m’entendre ou me respirer» (p. 156) - «Je t’aime, maman. Je te hais» (p. 158)

Dans ce même élan d’auto-destruction, Eva vit mal sa Féminité noire: elle broie chacune de ses relations, sciemment. Nehla, son Amour, la réconcilie avec elle-même, mais aussi avec les hommes.

Audrey PULVAR écrit les cris d’Eva, autiste dans le monde des Vivants. Le remède à son Ex-île, réside en un lieu: le cœur de sa mère, en Martinique.

 

Véronique LAROSE– janv. 2006

boule
 
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