Haïtienne, Elvire MAUROUARD est enseignante, Docteur en Lettres. En passionnée de Baudelaire, elle vient de publier un essai littéraire: «Les Beautés noires de Baudelaire» (éd. KARTHALA – 2005).
Un essai dense qui se concentre sur l'esthétique baudelairienne. Une esthétique qui accorde une place particulière à la Femme noire: elle porte en elle un pouvoir de fascination.
p. 8 – Préface: «Je brûle de peindre celle qui m'est apparue si rarement et qui a fui si vite, comme une belle chose regrettable derrière le voyageur emporté dans la nuit. Comme il y a longtemps déjà qu'elle a disparu ! Elle est belle, et plus que belle, elle est surprenante. En elle le noir abonde: et tout ce qu'elle inspire est nocturne et profond» (Baudelaire, «Petits Poèmes en Prose»)
Le recueil «les Fleurs du Mal» (1857) célèbre une volupté noire. Baudelaire est homme de voyages: il parcourt le monde et enivre ces mots de cette errance des sens. Il a voué une passion polémique à Jeanne DUVAL. Rencontre décisive, instinctive: après deux mois à traverser l'île Maurice et La Réunion, Baudelaire rencontre cette femme métisse, immortalisée dans son écriture en «Vénus noire». Une relation orageuse, mais inaltérable. Femme d'inspirations pour des poèmes connus: «La Chevelure», «Le Serpent qui danse», «Le balcon», etc.
«La Chevelure» dans «Les Fleurs du Mal»-extraits:
«Ô toison, moutonnant jusque sur l'encolure !
O boucles ! O parfum chargé de nonchaloir !
Extase ! Pour peupler ce soir l'alcôve obscure
Des souvenirs dormant dans cette chevelure,
Je la veux agiter dans l'air comme un mouchoir ! La langoureuse Asie et la brûlante Afrique,
Tout un monde lointain, absent, presque défunt,
Vit dans tes profondeurs, forêt aromatique !
Comme d'autres esprits voguent sur la musique,
Le mien, ô mon amour ! nage sur ton parfum.
J'irai là-bas où l'arbre et l'homme, pleins de sève,
Se pâment longuement sous l'ardeur des climats ;
Fortes tresses, soyez la houle qui m'enlève !
Tu contiens, mer d'ébène, un éblouissant rêve
De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts»
Erotisme-exotisme. Elvire MAUROUARD tisse cette passion de parfums et de couleurs via des citations minutieuses et des références annotées. Elle s'est penchée sur une œuvre décriée en son temps par la morale pensante… Depuis, ce recueil a nourri les essais littéraires et picturaux. Une poésie picturale qui peint les nuances de tons d'une âme tourmentée par l'excès des sens et des sentiments. Baudelaire a écrit en homme ouvert aux Arts. Il a ainsi consacré de nombreux articles critiques aux mouvances picturales de son temps (Delacroix, Goya, Manet, Courbet, etc.).
Et trois femmes sont peintes, trois figures féminines qui alimentent et tourmentent tout à la fois le poète :
- Jeanne Duval,
- la Malabaraise, l'Indienne au «corps doux»,
- Dorothée, l'Africaine, posée comme «Idéal de la beauté noire».
Bibliographies et implications – Elvire MAUROUARD
- Médaille d'or de l'Académie internationale de Lutèce. Un Prix littéraire
- Un essai «la Femme noire dans le Roman Haïtien: Noires, Métisses, presque Blanches: penser la discrimination» (2001 - Editions des Ecrivains)
- «Contes et poèmes des Îles savoureuses» (2004 - Editions des Ecrivains)
- Conférencière: à la CALIFORNIA STATE UNIVERSITY (LONG BEACH), au Sénat, à l'Unesco et à l'Ecole d'Anthropologie de Paris
- Journaliste - collaborations diversifiées à la revue littéraire «Notre librairie», à la revue d'histoire «Les Anneaux de la Mémoire», à la revue de poésie «Agora» de la Société des Poètes Français, à la revue «Francophonie Actualités».
- De nombreux articles sur la peinture d'Ingres et de Matisse.
Elvire MAUROUARD étudie le recueil des «Fleurs du Mal» à travers le prisme de la fascination. Fascination d'un homme et d'un artiste qui alimente ses mots de passion d'ici et d'Ailleurs. La Femme noire apparaît alors comme une peinture vivante des sens. Une négritude poétique, esthétique. Véronique LAROSE
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