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France : chasser le naturel, il revient au galop !

Daniel Boukman

 

Une violation flagrante du droit international

 De retour d’un voyage officiel en Russie où il venait de participer au sommet des pays producteurs de gaz, le Président de la Bolivie, Evo Morales, regagnait son pays ... Alors que l’avion présidentiel bolivien se trouvait à quelques kilomètres  des frontières françaises, l’autorisation, accordée le 27 juin, de survoler l’espace aérien français, était annulée.

De cette scandaleuse décision violant le droit international et l’immunité absolue dont jouit tout chef d’Etat, la responsabilité revient au gouvernement «socialiste» français1 qui s’est fait l’exécuteur d’une injonction des Etats-Unis qui pensait que Edward Snowden, ex-agent de la CIA et auteur des révélations concernant les opérations d’espionnage universel des USA, se trouvait dans l’avion présidentiel, qui a dû atterrir d’urgence en Autriche2.

Un tel agissement de la part de la France dont les dirigeants successifs ne cessent de s’autoproclamer les blancs chevaliers défenseur des Droits de l’Homme, rappelle un acte non moins indigne perpétré il y a 57 années de cela.

La France pionnière dans  la pratique du détournement d’avion

Le 22 octobre 1956, des chefs historiques du Front National de Libération Algérien (FLN), de retour de Rabat où ils s’étaient  entretenus avec le sultan du Maroc, Mohamed V, s’apprêtent à  rejoindre Tunis où l’entretien devait se poursuivre avec le Président de Tunisie, Habib Bourguiba.

Le sultan du Maroc prend un avion spécial qui survolera l’Algérie et les membres du FLN embarquent dans un DC3 de la compagnie Air Atlas (dont l’équipage est entièrement français), lequel avion, par sécurité, devait faire un détour par les Baléares.

A Alger, deux membres du cabinet de Robert Lacoste (ministre résident et gouverneur général de l’Algérie dans le gouvernement du «socialiste» Guy Mollet) ont vent de l’affaire; ils obtiennent le feu vert de Max Lejeune, secrétaire d’Etat à la Guerre et d’Abel Thomas, directeur du cabinet du ministre de la Défense, Bourges-Maunoury: la décision est prise d’intercepter l’avion ayant à son bord les membres du FLN.

Les autorités militaires d’Oran prennent contact avec le DC3... Le pilote qui ignorait l’identité des passagers, hésite, prend contact avec sa compagnie, obtient, par crainte de représailles (de la part du FLN) que les familles de l’équipage soient mises en lieu sûr en France.

Pour éviter d’attirer la méfiance des passagers, l’hôtesse de l’air ferme les rideaux, joue aux cartes avec les membres du FLN ...  Pendant ce temps, l’avion tourne en rond afin d’atterrir à Alger à l’heure prévue pour Tunis.

Les lumières d’une grande ville apparaissent... «Tunis, annonce l’hôtesse! Attachez vos ceintures!» et puis l’équipage s’enferme dans la cabine de pilotage; à l’atterrissage, ils quittent l’avion par la sortie de secours; les lumières à l’intérieur de l’avion s’éteignent; à l’extérieur, des projecteurs illuminent l’avion; un commando fait irruption et kidnappe les cinq chefs historiques du FLN qui seront internés dans diverses prisons françaises jusqu’en 1962, année de la proclamation de l’indépendance de l’Algérie.

Ce 7 juillet 2013.
Daniel Boukman

Notes

  1. Comme celui de la France, les gouvernements d’Italie, d’Espagne, du Portugal  obéissant aux ordres de Washington, ont interdit  au Président de la Bolivie le survol de leur espace aérien,  et c’était  comme si remontait du passé ce même mépris que ces puissances européennes exercèrent sur  les peuples d’Afrique et des Amériques autrefois victimes de leur domination coloniale..
     
  2. Cette décision inique a suscité la réprobation de divers pays d’Amérique latine: le Venezuela a condamné «une agression grossière, brutale, impropre et non civilisé»; le Nicaragua a dénoncé «une action criminelle et barbare»; Cuba a fustigé «un acte inadmissible, infondé et arbitraire qui offense toute l’Amérique latine et la Caraïbe»; l’Equateur a exprimé son indignation et déclaré «Notre Amérique ne peut tolérer un tel abus»; l’Argentine a fait part de sa consternation : « Ils sont devenus fous ;  un chef d’Etat et son avion disposent d’une immunité totale.».
     
    Par la voix de son secrétaire général, l’Organisation des Etats Américains (OEA) a condamné la décision des quatre pays européens: «Aucune circonstance ne peut justifier de telles actions  au détriment du Président bolivien ; les pays impliqués doivent expliquer pourquoi ils ont pris cette décision car elle a mis en danger la vie du Président d’un pays membre de l’OEA»; l’Alliance bolivarienne pour les peuples de notre Amérique (ALBA) a dénoncé «une discrimination flagrante et une menace contre l’immunité diplomatique d’un chef d’Etat». 
     
    Et pour l’honneur de notre pays, le 4 juillet 2013, Alfred Marie-Jeanne, député de Martinique, dans un communiqué, a déclaré entre autres: «l’avion du président bolivien, Evo Marales, a été interdit de survol de plusieurs pays européens, dont la France (...) Si cet acte n’est pas  à proprement parlé un casus belli, il constitue pour le moins une offense et une injure graves faites à l’encontre d’un chef d’Etat dans l’exercice de ses fonctions (...) C’est pourquoi je désapprouve fermement une telle dérive qui en déshonore les auteurs.(...)».

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