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Poèmes
Ismael Saincilus. Galerie d'Art Nader. |
Haïti Chéri(e)
Haïti
Chéri,
Rien n'est fini ...
Terre meurtrie
Mais en vie
Malgré les cris
De douleurs infinies,
Malgré le parvis
De tes églises rougis
Du sang de tes petits ...
Haïti
Terre flétrie,
A l'agonie ...
Rien n'est fini
Ma chérie ...
Tu paries
Aujourd'hui
De te relever ... encore ... Oh oui !
Haïti
Amoindrie ...
Tu survis
Depuis des siècles à lui,
A eux, traitres aigris,
Tontons macoutes pourris ...
Rien n'est fini
Ma chérie,
Ne meurs pas, je t'en prie ...
Haïti
Ma chérie,
Même meurtrie,
Appauvrie,
Anéantie,
A l'agonie ...,
Rien n'est fini ...
Reste en vie
Et gagne ce pari
Avec nous, tes amis,
tes enfants, aguerris ...
Haïti
Noire patrie,
Rien n'est fini ...
Je te soutiens fort d'ici ...
Ayiti ... ou pap mouri !!!
..... Pour tous ceux qui souffrent encore plus aujourd'hui à Haïti,
Pour tous les haïtiens et pour tous les Haïti du monde ....
Sylvain Padra
12 janvier 2010
Des poètes du monde entier offrent leurs mots pour venir en aide à la population de cette île. Des poèmes, regroupés en un ouvrage électronique que vous pouvez acquérir via le site Poètes pour Haïti. Nous ne percevons aucune somme. Vous faites votre don du montant que vous souhaitez à une organisation humanitaire de votre choix et vous téléchargez le livre.
Pour Haïti
Les voiles de la mort sont venues à nos portes. Les vagues de la terre ont poudré les visages. Le ciel est trop petit pour accueillir les morts et les rues hurlent comme des fantômes blessés sous le masque des vivants.
Haïti !
Haïti !
Au visage de cendre, au ciel couvert de sang, prie d’une voix somnambule la poussière des dieux.
Il y a une nièce, une sœur, un père dont l’absence nous hèle. Ils habitent l’invisible dans un décor de mouches.
Il y a ceux qui dorment debout ou à même les trottoirs. Leurs yeux calcinés refusent de se fermer.
Il y a ceux qui portent sur leur tête le désespoir dans une valise maigre.
Il y a celle qui meurt enceinte sous les pierres du malheur et que l’on tire en vain pour que le soleil pleure.
Haïti !
Haïti s’agenouille auprès des immeubles explosés, des corps tuméfiés et toute la ville marche d’un pas de fossoyeur.
Désastre qu’on emporte dans des draps de fortune.
Désastre d’entrailles quand la vie s’évapore dans un regard d’eau morte.
La mule du malheur court toujours comme une femme folle.
Haïti !
Nous sommes avec vous, hommes de boues sèches et femmes que le silence déchire.
Nous sommes avec vous, enfants de malemort, quand le pays s’en va, de secousses en secousses, dévorer les enfances.
Nous sommes avec vous et nous disons pour vous une parole solidaire.
Parole déshabillée où seule règne une larme.
Vous êtes toutes nos guerres et c’est notre sang qu’un cimetière allume comme un cierge.
Vous êtes l’ombre couchée de nos oublis d’antan. L’éclat dur de nos silences d’antan.
Des siècles ont crié meurtris de tant de cris et les arbres se sont nourris du silence des oiseaux.
Mais la terre demeure !
Mais la vie demeure !
Mais demeurent le sang et la foi des vivants !
Haïti n’est pas mort sous ses paupières de nuit.
Haïti ne mourra pas, trop de poètes l’ont créé !
Nous donnons leur nom au lendemain, au petit jour des mots, à la griffe de l’espoir, au petit peuple faiseur de miracles.
Haïti ! Soleil des carrefours et qui va son chemin de lumière convulsée, d’imprévisible survie parmi les cimetières et la graphie des vents.
Mais la terre demeure !
Mais la vie demeure !
Mais demeurent le sang et la foi des vivants !
Haïti ne mourra pas !
Nous lui tendons les mains pleines d’ancêtres-frères et nous pleurons parce qu’il nous faut pleurer, mais nous écrivons sur tous les murs tombés, au nom de cette enfant ressuscitée au bout de son cauchemar:
HAÏTI NE MOURRA PAS !
HAÏTI NE DOIT PAS MOURIR !
Ernest Pépin
Faugas
Le 16 janvier 2010
Cantate pour Haïti
«In the heart of darkness»
- Joseph ConradHaïti, je t’écris cette cantate ultime
Car il n’y a pas d’homme éternel
Pour veiller au carrefour des tremblements.
Le ciel ne s‘est pas fissuré, le vent
Ne s’est pas jeté dans les bras de l’abîme –
La lumière pourtant s’est noyée dans le miel.CANTATE POUR HAÏTI
Port-au-Prince s’est penché
Sur sa faille redoutable, infinie,
Jacmel a fui les corps des damnés.CANTATE pour les enfants malaimés
Du prodigieux Toussaint Louverture…
Le regard de l’enfant s’enfonce dans le plancher,
L’œil du mourant s’est écrasé sur l’azur.Haïti, il n’y a pas que la terre qui tremble.
Ma colonne vertébrale vacille, il me semble.
Ma conscience blessée saigne au plafond de la parole.
Partout des visages hagards rôdent, une folle
Me regarde, me demande où se trouve Haïti,
Son Haïti créole, son Haïti toujours indéfinie…CANTATE POUR HAÏTI,
Que dire d’un pays à terre
Qui maintes fois s’enterre
Pour se signer au seuil de l’enfer ?CANTATE POUR HAÏTI
Nous t’offrons le chant des versets remués.
Nous mains sont offertes, évincées, lacérées,
Le soleil à genoux, pour toi, supplie.CANTATE POUR HAÏTI,
Mes mots tremblent aussi,
Mon inspiration anéantie,
Mon poème s’est trahi.Haïti, la fente de l’Atlantique se réveille.
Partout la poussière balaie où la mort veille.
Une femme accouche de l’ombre d’un enfant
Et son cri se fracasse en stupeurs et tremblements.
Que l’aveugle oublie sa cécité pour te voir en face,
Que la parole qui s’efface te laisse son ultime trace !CANTATE POUR HAÏTI
POUR TOI, LE MOT TREMBLE A L’INFINI !
Haïti
Fusil en tête
grenade au cœur
je suis le transparent
casqué d’incertitude
le bouquet d’anthuriums
à l’épicentre du séisme
l’éternité en marche
sous les racines du volcan
José Le Moigne
La Louvière
21 janvier 2010
Cataplasme
Les hasards d’un commerce cupide
Nous a fait germer sur des rives distantes
Nous, long lasso d’îles chevauchant les failles profondes
Tétons hérissés dans les turquoises caraïbes
Te voilà Haïti Toma
Sœur blessée
Terre lardée
Linceul césarisé à vif
Si je devais parler de toi encore
Jumelle aride tant de fois éprouvée
J’épouserais le plus infime battement de ton cœur
Pour essorer tes plaintes résignées
Avec mon drap trop vieux, de hardes remisées
Les hasards de ce commerce cupide et honteux
A fait partition de terres soumises
Et ton sol tant de fois mis à rude partie
De sang asséché depuis si longtemps
S’est laissé briser en une seule semonce à sept degrés décomptés
Si je devais alors
Dire ma part de souffrances
Quand tes tripes le soir
S’étalent à même les flancs des coulées cathodiques
Je me ferais fils de Toma chérie
Délitant mes douleurs dans les rizières silencieuses de l’Artibonite inconsolée
Je me ferais messager vagabond des guerriers aphones
Pour chambouler la sieste des puissants
Je me voudrais buvard multiple, docile et poreux
Pour éponger tes larmes
Pour partager tes doutes et lever tes inquiétudes
J’interrogerais les lendemains lointains plongés dans la gorge des horizons
Pour donner à tes jours le meilleur du brillant des soleils
Je fermerais les yeux aux assauts des midis grondants
Pour t’inventer des aubes qui esquivent l’engourdissement du dernier angélus
Une parole pour Haïti. Janvier 2010
Max Rippon
de Max Rippon
trad. en roumain
Hazardul unui comerţ lacom
Ne-a făcut să germinăm pe ţărmuri îndepărtate
Pe noi, un lung lasou de insule călărind faliile adânci
Sâni înălţaţi prin Caraibele turcoaz
Iată-te Haiti Toma1
Soră rănită
Ţară ciuruită
Linţoliu tăiat pe viu
Dacă ar trebui să mai vorbesc despre tine
Geamănă aridă de atâtea ori încercată
M-aş însura cu cea mai măruntă bătaie a inimii tale
Pentru a şterge plânsetele tale resemnate
Cu pânza mea prea veche, din cârpe de aruncat
Hazardul acestui comerţ lacom şi ruşinos
A împărţit ţinuturile supuse
Şi solul tău de atâtea ori pus la grea încercare
De sânge uscat de atât de mult timp
S-a lăsat frânt într-o singură ultimatum de şapte grade decontate
Dacă ar trebui
1 Ayti Toma, vechiul nume al insulei Haiti
Să-mi spun partea mea de suferinţă
Când maţele tale seara
Se înfăţişează chiar pe marginile topiturilor catodice
M-aş face fiul dragei mele Toma
Dezintegrându-mi durerile în orezăriile tăcute ale Artibonitei neconsolate
M-aş face mesager hoinar al războinicilor afoni
Pentru a bulversa siesta celor puternici
Mi-aş dori să fiu sugativă, supusă şi poroasă
Ca să-ţi şterg lacrimile
Pentru a-ţi împărtăşi îndoielile şi a-ţi îndepărta neliniştile
Aş întreba zilele îndepărtate din viitor căzute în gâtlejul zărilor
Ca să dau zilelor tale partea cea mai bună din strălucirea sorilor
Aş închide ochii la asalturile amiezilor bubuitoare
Ca să-ţi inventez zori care evită toropeala ultimului angelus.
Un cuvânt pentru Haiti
Ianuarie 2010
Traducere din limba franceză de Elena Liliana Popescu şi Vlad Copil
Martie 2010
Îles
Un jour
la mer a explosé
et à donné
les îles
Un jour
la terre explosera
et gommera
les îles
Ainsi
en est-il de nos vies
de nos silences
et de nos souvenirs
José Le Moigne
La Louvière, 26 janvier 2010
JANVIER 2010
Il s’est effondré le beau palais
Il a fallu que la terre tremble
La nature, en révolte, semble
Lui avoir donné un coup de balai.
Oh peuple qui a trop souffert,
Des Duvaliers, connut l’enfer
Pas un seul qui ne l’ait trahi
Tout en chantant : Haïti chérie.
Comme ils avaient atteint le fond,
Il ne leur restait plus qu’à le fourrer.
Alors le sol donna un bond
Pour pouvoir mieux les enterrer.
Ils sont au milieu d’une hécatombe,
Leur maison est devenue leur tombe
Aucun mot peut décrire l’horreur
De ce spectacle de terreur.
Il y en a qui ont survécu
Plus de dix jours sous les décombres.
Ils ont ressurgi des sombres ;
La mort, cette fois, ils l’ont vaincue.
Ils reçoivent l’aide du monde entier
Mais pour mériter tant de pitié,
Ils ont du mourir par milier
Pour cesser, enfin, d’être oubliés.
Habitués à avoir soif et faim,
Ils ont tutoyé la mort; mais enfin
Plus bas, on ne peut pas descendre.
Nous devons renaître des cendres.
Le corps, le cœur, l’âme meurtrie,
Ils ont, de tout, été privés.
Allons enfants de la patrie,
Le jour d’espoir est arrivé.
Ivan Thomas Large
26/01/2010
tandis que la foutue bienséance médiatique nous assène, en attendant pire ailleurs, que c'est une malédiction vous dis-je, une fatalité, vous dis-je, un désastre vous dis-je, tandis qu'ils s'amusent à décortiquer les chiffres, 50000 ou 200000, les autres déclament que c'est l'œuvre d'on ne sait quel créateur et exhument des décombres de savantes théories
mais on s'en fout
car il y a l'enfant,
l'enfant,
l'enfant,
l'enfant qui pourrait être mon enfant ou ton enfant, il y a cet enfant, qui est dans sa classe à l'école ou dans sa chambre, cet enfant qui a peut être deux ans ou cinq ans, un enfant comme les autres, qui ne pense qu'à jouer, vivre et un mur soudain lui tombe dessus, est-ce que les briques le démembrent, le décapitent, est-ce que l'enfant meurt tout de suite écrabouillé ou est-ce qu'il survit pendant quelques heures, jours, à quoi est-ce qu'il pense, est-ce qu'il pense à sa maman, à son père, à son nounours, est-ce qu'il pleure parce qu'il n'en peut plus, que fait cet enfant, que fait-il, y a-t-il moyen de comprendre sa souffrance, faut-il dire qu'elle est obscène et inique et que le farceur qui l'autorise n'a pas lieu d'être
il y a l'enfant qui pleure et qui meurt
il y a l'enfant
l'enfant
l'enfant
l'enfant
laissons donc aux autres le soin des discours,
la vie est un merdier dénué de sens
il est temps de FOUTRE LE CAMP
et la rédemption promise n'occultera jamais la douleur
Ma place parmi les vivants
C'était ça, Turgeau? Une plaisanterie!
L'ancienne maison a vacillé, puis est tombée de toutes
ses colonnes et de son grand balcon, comme quelqu'un
ayant l'air de demander pardon au temps. C'est ce
qui s'appelle un séisme, un vrai! Il a parcouru la
ville et une bonne part du pays. Il a mangé plein de gens.
Mangé! Littéralement! C'est-à-dire: Moulu! Avalé!
Ceux qu'il a laissés dehors, les autres morts, sont
alignés sur les trottoirs, certains à découvert, d’autres
enveloppés dans des draps ou du plastic blanc.
Les églises aussi sont agenouillées: La Cathédrale,
Saint-Anne, Saint-Louis-Roi-De-France, Saint Joseph.
Quelques fidèles prient haut et fort. Une prière en
colère, d'autres le font à voix basse, dans leur
coeur. Le Christ, qu'on croyait en équilibre précaire,
est resté perché sur son socle au fond de l'église du
Sacré-coeur, impassible solitaire au milieu des ruines.
Rue Thoby, dans la zone de Frères, on a recueilli le corps de
deux de mes tantes paternelles sous des décombres.
L'une d'elles qui était aussi ma marraine s'apprêtait à fêter son centenaire.
“ Il ne me reste qu'une dent, disait-elle. En mars, si Dieu me
prête vie, je vous la montrerai dans un large sourire”
Adieu ma belle!
Il fait lourd.
Difficile de marcher.
On a la tête encombrée de morts.
Chaque jour, le nombre augmente.
Et les secousses n'arrêtent pas. On est sur le qui-vive. Elles peuvent
s'étendre jusqu'à trois mois, six mois, un an. Qui sait?
Ma mère et ses deux sœurs ont été sauvées de justesse par
l'un des mes fils et un neveu qui ont dû les forcer à
sortir, car elles ont eu peine à croire que la maison s'écroulait. Elles sont aujourd'hui à l'abri
chez l'un de mes frères, à l'abri, mais perdues,
sans repères, ne parlant jour et nuit que de retourner chez elles.
Un proche a vu mourir cinq cents de ses employés sous
l'effondrement de sa manufacture.
Un bébé de vingt-deux jours a été repêché vivant au bout
d'une semaine sous des décombres.
Et puis, il y a l'immense majorité avec ses morts, ses
sans-abri, et d'autres morts qui s'ajoutent à la
liste des morts du séisme: Ceux qui sont morts, la veille
ou après, et ne trouvent pas leur place de mort à part,
avec cette singularité qui leur est due: Pompe-funèbre,
convoi, messe, chant et oraison. Toutes
les morgues sont engorgées, les cimetières dévastés. Il
faut créer des fosses communes.
Il y a aussi les rats, qui sont des gens, s'échappent des
prisons, s'attaquent à la population. Le chef de la
police a promis de les traquer. Et la ministre de la culture
et de la communication leur aurait, semble t'il,
demandé, dans un appel radiophonique de regagner
gentiment leur cellule.
Quelqu'un m'a appelé hier pour me demander
si je suis mort. Absolument, ai-je dû
répondre.
Une amie m'a suggéré d'écrire, comme pour reprendre
ma place parmi les vivants.
Syto Cavé
TOUTOUNI
La te joure manman nou gwo katre delapremidi
li touse sou nou
li bave sou nou
li rele sou nou
li dezabiye nou
pousye leve
li leve anba jipon peyi'm
pousye leve mete'n nan la ri
pousye leve
n'ap konte kadav soley ki depatya
sou boulva lanmo
m'anvi pale, m'anvi jwe
m'anvi ponpe, m'anvi kadanse
m'anvi tounen mo yo lanve
m'anvi fe belbel ak yon lot peyi
m'anvi fe belbel ak zwazo yon lot vil
m'anvi fe belbel ak yon lot peyi
pou li sispann tounen toupi
nan men la te
yon te woule'm debo
Je me souviens
Au soir du 12 Janvier, notre terre a tremblé
Et dans son flanc ouvert, elle a tout enterré
Est-ce la voix de Dieu, a-t-on brisé sa Loi ?
Ou celle de la nature, voulant semer l’effroi ?
Port-au-Prince, mon berceau, est sous d’affreuses ruines
C’est bien Madame Nature, quelle vengeance elle rumine ?
Elle fait tous ces dégâts, sans même crier gare
Emporte biens et humains, sexe et âge, sans égard !
De quoi sont-ils punis, ces pauvres malheureux ?
Ô Dieu ils n’ont donc pas eu pitié à vos yeux ?
Le seul péché commis, c’est d’être misérables
Car l’angoisse et la faim, demeurent inséparables
Notre belle Cathédrale, nos églises englouties
Nos plus beaux édifices, sous la terre sont enfouis.
Port-au-Prince n’est plus, tous nos bons souvenirs
Resteront dans nos cœurs, sans jamais se ternir
Tant de rêves et d’espoirs, anéantis, quelle horreur !
Tout cela vient faire croître, la liste de nos malheurs.
Au milieu du carnage, accourent de tous bords
Amis proches et lointains, tous envahissent nos ports.
Chacun plante son drapeau, et veut la première place
Soudain ils se réclament, les fils d’une même race
Se bousculent et s’empressent de se mettre sur les rangs
Nos gens visages hagards, circulent comme des errants.
Tous veulent nous apporter, cette aide humanitaire
Sans même être en guerre, serons nous tributaires ?
Haïti est moribonde, son état est critique
D’aucuns diront sûrement, ah! l’ingrate, la sceptique
J’apprécie cependant, de nos frères, le secours
Mais à l’inévitable, a-t-on d’autres recours
Malgré ce grand chagrin, encore je me souviens
Du temps où c’était nous, qui apportions soutien
Sans doute se souviennent-ils, qu’aux temps de désespoir
Le sang des Haïtiens, abreuvait leurs terroirs ?
Lorsque interpellés, nous avions fait le choix
Pour nos frères d’Israël, par notre vote et nos voix
Par l’organe de Saint Lôt, pour nos frères de l’Afrique
Nous fûmes à Savannah, pour la jeune Amérique
L’Amérique Latine par Bolivar, profita
Le “brain drain” de nos fils, par l’Afrique, le Canada.
De quelque nature que l’épreuve nous parvienne
Nous devons adopter, une attitude jobienne!
Et quand auront passé, ces durs moments d’effroi
Nous le rebâtirons, en Dieu nous avons foi.
S’il est vrai ce qu’on dit: “un pays ne meurt pas!”
Tout comme le Phœnix, vois-tu, Haïti renaîtra.
Marlène Racine-Toussaint
17 Janvier 2010
Soudain
La terre a tremblé ce jour de janvier 2010
Soudain
L'effondrement des jours
Le vacarme assourdissant du néant
La quête vaine d'une parcelle de vie
Et le silence dans la pestilence du petit matin
Et plus rien n'est plus pareil
Et plus rien ne ressemble à rien
Les yeux hagards des survivants se hasardent
Parmi les ombres empreintes de poussières
Dans l'asservissement d'une brisure de vie
Là une main surgie au milieu des débris
Ici un visage à la bouche béante à jamais silencieuse
Un peuple entier enseveli
Un pays à l'agonie
Haïti, Haïti chérie,
Pitié
Pour ce pays de lumière et d'ombre
Pitié
Pour ce peuple au parcours singulier
Pris dans l'étau sanglant
D'une histoire dépossédée
De Généraux embrigadés héritiers de Flibustiers
En tristes sires bardés de tontons macoutes
Empaillés dans le costume emprunté d'une sanglante méprise
D'une évidente dérive
Noire est la nuit encastrée du destin
Partir est un rêve frustrant
Et rester nourrit le cauchemar
L'espoir bafoué
L'espoir contrarié
Mais l'espoir vivifié, toujours recommencé
Le désir d'avenir toujours en avant des cœurs
Toujours là où l'esprit le dispute au poison de la discorde
La nuit est longue mais la lumière vient
Me susurre à l'oreille mon frère en Mina
A luta continua e a victoria é certa
Me glisse a voix basse mon frère du Kizombo
Et l'esprit de Cabral habite tous nos frères en diaspora
En ce janvier de larmes et de sang
L'Afrique souffre la ou crie un de ses fils
Et cette douleur qui nous habite
Et ce mal ancestral commun qui nous ronge
D'une aspiration toujours frustrée
Toujours castrée
Et puis soudain
Cet enfant tire de sous les décombres
Et qui, émerveillé d'une renaissance inespérée
Lève les bras vers le ciel pour saluer la terre
Et dessiner à l'écran le V de la victoire
Et de l'avenir de ce peuple de foi
Gouverneur de la rosée
Ce sont bien là les enfants de Toussaint Louverture
Qui fit mettre genou à terre
Les grognards de l'Empereur
Ce sont bien là les descendants de Dessalines
Qui proclama contre la nuit esclave
La première République Noire «doubout»
Ah ces voix claires de femmes assouvies
Ces cris d'hommes rassasiés
Ce chant guttural monté des ténèbres d'un passé
Emmuré dans la mémoire
La résilience d'un peuple insoumis
Habité de l'épopée de ses ancêtres d'Afrique
Mandingues, Ouoloffs, Mandes, Umbundus,
Qui ont franchi les mers enchaînés
Qui ont croisé le fer avec le feu d'un Dieu diaphane
Et ont découvert la vérité du monde
Qui ont surmonté
L'humiliation forcée
La vindicte raciale dépassée
Dans une négritude apaisée
Sur les décombres du Code Noir
Non pas pitié « pou moun la »
Pas pitié mais fierté
Pour ce peuple d'Haïti
Haïti chérie
Antonio Pedro Monteiro Lima
Représentant permanent du Cap Vert auprès des Nations Unies,
également écrivain, musicien et poète.
New York, 21 Janvier 2010
Audio ici.
Après un silence de choc, l’Haïtien peu à peu reprend ses sens.
Était-ce un cauchemar? Était-ce un de ces films d’horreur dirigé par un metteur en scène
à l’imagination diabolique?
Ni l’un ni l’autre: c’est la réalité.
Nous sommes tous victimes de près ou de loin
Nous sommes tous perdants.
Chacun fait un effort pour comprendre:
Pourquoi nous?
Qu’avons-nous fait de mal?
N’avons-nous pas déjà assez subi?
Plusieurs - pour ne pas dire une majorité - ont perdu espoir
Certains de leurs beaux rêves pour Haïti sont perdus sous les décombres
Certains de leurs beaux rêves pour Haïti sont ensevelis pêle-mêle avec nos morts à Titanyen
L’horizon semble plus sombre que jamais
Pourtant, des voix s’élèvent du milieu de l’hécatombe
Haïti, tu ne peux mourir
Haïti, tu ne mourras pas
Haïti, tu seras plus belle
Haïti, tes fils vont reconstruire…
Toutes ces voix qui veulent nous faire oublier ne nous enlèvent pas de la mémoire ces images
qui ont fait le tour du monde
Nos morts étendus suspendus
Des survivants saupoudrés de poussière
Des survivants ensanglantés écrabouillés
Toutes ces voix qui veulent nous faire oublier ne nous enlèvent pas de la mémoire l’éloquence des silences
qui ont fait le tour du monde
Silences d’indifférence
Silences d’incompréhension
Silences d’irresponsabilité
Toutes ces voix qui veulent nous faire oublier ne nous enlèvent pas de la mémoire ces cris
qui ont fait le tour du monde
Cris de douleur des amputés à vif
Cris de douleur de parents sans enfants
Cris de douleur d’enfants sans parents
Toutes ces voix qui veulent nous faire oublier ne nous enlèvent pas de la mémoire ces morts
que nous avons adoptés
Morts étendus rassemblés empilés
Morts dans ces camions à bascule
Morts dont on a disposé sans respect sans dignité
Nous voudrions croire en ces voix
Pour redonner espoir aux survivants
Nous voudrions croire en ces voix
Pour nous redonner espoir
Mais nous avons peur
Toutes ces voix qui veulent nous faire oublier ne nous enlèvent pas de la mémoire ces souvenirs
d’un passé pas trop lointain
Gonaïves 2004
Gonaïves 2008
La ville de l’Indépendance symbole de notre passé symbole de notre fierté
Qui ne pouvait mourir
Qui allait être reconstruite
Qui serait plus belle
N’est aujourd’hui qu’une ville de boue
Trop de voix se sont perdues
Trop de voix se perdent
Trop de voix sont ignorées
Nous avons assez joué perdants
Pour qu’Haïti ne meure pas
Pour qu’Haïti soit plus belle
Il faut rebattre les cartes
Il faut changer de mains
Il faut surtout changer de cœur
HENRIOT ST-GERARD
Lanati seleksyone ou pititfi Lafrik
Se pa pa chans,
Se paske ou inik
Oun jou ou ap wè sa klè
Mask la ap tonbe; e
Ou ap sispann kache bote ou
Younn ak lanati
Kè ou, tankou lalin, ap baliske dèyè mòn
Koute l kap di ou bote pa chanje
Po brile;
Cheve len;
Nen louvri
Ou gen lè lavi
Nan koulè majesyez ou
Tout oun kilti evidan
Lòd retabli;
Anyen pa manke;
Anyen pa pèdi
Souri ou pote m ale
E zye ou gide m
Rive nan fon kè ou
Mwen goute lanmou pi
Kididonk, fòk mwen te retounen ayiti
Pou m te jwenn chimen yo pa kreye;
Yo pa detwi
Dèyè dekonb nan Pòtoprens;
Vwal pal ki kouvri desidè yo;
Lespwa oun lòt dezas fondamantalis relijye karese
Mwen retounen nan lavi pafè
Pami mas eritye akò komen
Gade natirèl la
Li retounen sou oumenm,
Bliye panse Ewosantrik;
Di adye Hellene
Mwen prefere chwazi manman Lafrik
Zansèt yo, ewo endepandans yo
ki fè mwen mas e
Reyalize mwen mèveye
Dima Lafontan
March 3, 2010
Tempete, ouragan, vent violent
Les rivières sont en crue
Les vagues de la mer montent
Les maisons sont inondées
Le peuple crie a l'aide!
L'aide en nature ou en espèce vient
Sans hesiter ils en profitent
Ils en profitent
À la va vite
On dirait des renards en eveil
Avec des yeux roublard qui surveillent
Ces profiteurs de malheurs!
Ces dilapidateurs, ces rongeurs
Ces voleurs qui volent, qui cassent
Ces escroqueurs qui ramassent
On en a marre! marre! marre!!!
Que le ciel nous entendent
Et vient a notre secours
Cyclone, pluie torrentielle, tremblement de terre
Ils sont là encore une fois
Guettant l'aide a chaque fois
Ramassent! ramassent! et point ne se lassent
Ces demons de l'enfer!
Ces partisans de lucifer!
Ils stoquent, empilent, pillent,
Engoufrent sous des tentes
Dans des endroits preparés pour ça
Des milliers de tonnes
Ils croient qu'ils n'ont point de compte a rendre a personne
Gare! gare! gare à vous!
Raqueteurs,voleurs, malfaiteurs
Remplissez vos tentes, vos greniers
Vos dépots, vos entrepots
Il semblerait que pour commettre de tels actions malhonnetes
vous n'aviez jamais eu chaud
Profitez! profitez! bien de vos biens mal acquis
Buvez! buvez! a votre sante toute votre vie
Et surtout ne vous inquietez pas
Vos sentences sont là
Vous qui n'avez point eu de sang froid
A ramasser l'aide et les millions
Sur le dos d'un peuple en agonie
A signer des papiers au nom de la nation
Si du malheur de ces millions d'haïtiens
Vous faite vos beurres
Attendez! attendez! que pour vous un jour sonnera l'heure
Ou vous allez rendre compte a Dieu de tous vos horreurs
Qui font plus de peine, plus de mal au peuple
Que toutes catastrophes naturelles connues
Qui jusqu'ici l'ont frappé a perdre vue
Avant qu'il ne soit trop tard
Convertissez-vous! convertissez-vous!
Changez vos cœurs! changez vos cœurs!
Bande de profiteurs de malheurs
Mikelita Jean
membre des defenseurs sans frontieres des droits humains (DESAFRODH)