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Voyager et remonter le temps
avec Carole Demesmin

André Fouad

Publié le 2021-10-27 | Le Nouvelliste

Quelle joie immense d’écouter et de revoir la belle et talentueuse Carole Demesmin à l’aéroport de Fort-Lauderdale le Vendredi 7 octobre 2022 à Stamford (New-York) où elle était l’une des invitées spéciales dans le cadre de la 23e édition du Festival du Livre et des Arts à l’initiative de l’Association haïtienne des professionnels de Connecticut (HAPAC)!

Dans le vol de Jet-Blue qui a duré trois heures, on a pris le temps de converser amplement, de remonter le temps, de voyager, de discuter autour de divers sujets liés à l’art, à la culture, au vaudou et à la crise socio-politique et économique qui frappe de plein fouet Haïti, notre patrie.

Franchement j’ai beaucoup appris de cette encyclopédie vivante très engagée dans les luttes politiques durant les années 70 à Boston (Massachussetts) pour le renversement du régime des Duvalier. Sur le visage de la chanteuse, je lis ses regrets, ses déceptions, ses aspirations, ses joies éphémères à travers tout ce qui s’est passé dans son quotidien de femme, mère, grand-mère et surtout artiste-militante.

En promenant mon regard sur son chapeau noir aux motifs de vèvè, je songe à ses nombreuses chansons: «Sou chimen pèdi tan», «Ti sous», «Lawouze», «Siwo myèl». Des morceaux qui ont traversé le temps et l’espace et qui ont fait d’elle ce qu’elle est devenue aujourd’hui: une voix unique, originale, une icône de la musique populaire de ces vingt dernières années.

Chacune de ces pièces musicales dégage toute une philosophie, tout un projet de société qui peut nous conduire volontiers sur les rives du vivre-ensemble qui nous manque tellement en tant que peuple.

La fille authentique et choyée de Léogâne, très jeune, a été bercée par la musique classique grâce à son père Mozart Demesmin, violoniste de son état, amoureux des Vivaldi, Chopin, Beethoven pour ne citer que ces musiciens et compositeurs de tous les temps.

À la maison, son père jouait pour elle les plus grands noms du monde classique. Curieuse, elle était aussi à l’écoute des chansonniers qu’on diffusait à la radio comme Guy Durosier, Mme Canez, Martha Jean-Claude, Esmerantes Despradines Morse, Dodof Legros, Ansy et Yole Derose. En fait toutes ces personnalités ont joué un rôle important dans sa formation artistique, nous a-t-elle confié, l’air figé sur son appareil de C.D et  D.V.D de couleur noire.

Dans sa carrière, elle ne compte plus les distinctions, les Awards, les honneurs et mérites à travers le monde (Haïti, U.S.A, Benin, Finlande, France, Guadeloupe...)

La première tournée en Haïti de Demesmin en 1979 fut un succès populaire. Elle a offert une dizaine de concerts tant à Port-au-Prince (Rex Théâtre, Ciné Triomphe, Ciné Colisse..) que dans les villes de province (Cayes, Jacmel, Léogâne…).

Carole Mawoule porte plusieurs casquettes selon les circonstances: mambo, chanteuse, conférencière, peintre, militante. Il n’y a pas si longtemps,  le 30 septembre 2022 à Brooklyn College, elle a pris part à la conférence intitulée: Vodou et développement du Centre Culturel Spirituel Traditionnel Inc. (C.C.S.T) en compagnie du journaliste Jean Sorel Francillon, du Dr Jean Fils-Aimé et de la mambo Jocelyne Pierre-Louis.

Par rapport à notre débâcle actuelle, elle garde encore espoir et prône l’alphabétisation, l’éducation, le respect de nos mœurs, de nos traditions. En ce sens, il est urgent, selon elle de sensibiliser, de conscientiser la population à travers les outils que nous offrent la radio, la télé et surtout les réseaux sociaux.

L’ancienne étudiante de Berkle College Music (1979-1982) et membre du mouvement: «Haïti Culturelle» se dit fière  et honorée de travailler ou d’avoir travaillé avec des compositeurs de renom comme Joël et Mushi Widmaier, Ralph Boncy, Jean Claude Martineau (Koralen), Nicole Levy, Gaguy Depestre, Pierre Rigaud Chery, Raoul Denis Junior, Reginald Policard, Boulo Valcourt, Jacques Fatier, René Philoctète, Jean-Claude Garoute (Tiga) et Michel Cohen.

Au Festival du Livre et des Arts Haïtiens le samedi 8 octobre 2022 à Norwalk Community College, vêtue d’une robe karabela ornée de papillons de la Saint-Jean signée du designer David André, l’interprète de «Lumane Casimir» ne s’est pas faite prier afin de conter et de célébrer l’Haïti d’hier et d’aujourd’hui par le biais de sa poésie épurée, sublime et surtout de sa musique au parfum afro-caribéen et amérindien.

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Viré monté