Potomitan

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Annou voyé kreyòl douvan douvan

Guy Cayemite

J'avais lu quelque part
que si l'on rencontrait une fille
pour la première fois au hasard
et que droit dans les yeux
on la regardait, une grande impression
on ferait sur elle. Animé de cette confiance,
j'ai voulu en faire l'expérience...
Comme tombée des cieux,
elle paraissait une ange en mission,
pour me conquérir le cœur...
Et bingo, nous étions sous nos charmes...
Rien ne me sonnait l'alarme,
animé de mon nouveau zèle,
je l'accompagnai chez elle,
fis la connaissance de la famille.
Le père se targuait même de bon cœur
d'être originaire de la même ville natale
que moi, ce qui me mis à l'aise
bien assis de nom sur ma chaise...
Un de mes copains qui habitait juste en face
me confia secrètement combien 'léthal'
' tiak' comme on le dit dans notre langage
était ce père que je pensais si sage...
Il aimait la petite sœur comme un fou
mais ne se contentait à cache- cache
que de lui envoyer des billets doux.
En tout cas c'était ma chance,
j'invitai ma petite nouvelle amie
au cinéma ce Dimanche-là pour une romance.
C'était bien calculé, j'avais amplement assez
d'argent pour les droits d'entrée, le taxi,
fresco sirop d'orgeat avec pistache
s'il vous plait et même une crème à la glace...
Je m'y voyais l'élégance en pensée déjà.
Le jour dit et promis
quand j'arrivai à la maison,
j'avais deux chaperons,
un cousin et la petite sœur...
C'était comme si j'avais reçu
un coup violent inattendu d'une massue
sur la tête... Adieu fresco d'orgeat,
pistache, glace, taxi, élégance...
Il fallait jouer à l'audace
contenir mes nerfs, faire face
à la situation, calmement en douceur
y remédier de façon digne...
A la sortie, je fis un petit signe
au copain d'en face pour nous accompagner
une occasion dont il ne se fit pas prier...
Mais en fait c'était mon petit truc de rusé
pour lui faire partager les frais
et m'apporter un peu d'air frais....
J'étais bel et bien sauvé de justesse...
Je rendis une visite de politesse
quelques jours après à ma petite amie,
quelle fut ma grande surprise,
à mon arrivée, elle était assise
sur une chaise sur la galerie,
en culotte et sans bras...
Point besoin de vous décrire le choc
du moment. Le regard vide, une loque
humaine happant une bouffée d'air
comme elle pouvait, convulsions et spasmes,
elle avait une crise d'asthme...
Elle n'avait plus l'air
de la demoiselle pleine de vie,
celle du baiser j'avais tant envie,
qui me chatouillait et me pinçait le bras.
Les yeux sans regard en détresse
de la mère traduisait la tristesse
de son âme implorant des cieux,
n'importe quel saint, n'importe quel dieu...
A douleur point de quartier...
Tous nous sommes vulnérables...
L'ordonnance était là sur la table...
J'avais vite compris la situation,
sans mot dire je pris la prescription
et me rendis à la pharmacie du quartier...
Cette nuit-là je dormis à peine,
sur mon cœur, le poids de leur peine.....

boule

 Viré monté