Potomitan

Site de promotion des cultures et des langues créoles
Annou voyé kreyòl douvan douvan

texte

Umar Timol

il trouve inconcevable la mort, le passage de la vie à la mort, la vie est si intense, plurielle, il y a une trop grande démesure à la présence, au fait d'être, il n'arrive pas à comprendre ce passage de la vie, avec toutes ses manifestations, manger, boire, jouir, pleurer, prier, à la mort, qui est néant, vide, ce passage est trop brutal, radical, il n'y a pas de compromis possible, pas de mi-chemin, on ne peut pas s'y arrêter, on ne peut pas interrompre son vouloir, lui demander ce qu'elle est, il n'y a pas moyen d'être à l'entre-deux, s'y tenir, résolument, l'observer, la guetter, la séduire, l'envouter, la rendre plus humaine, moins vivace, la démystifier et il n'y a pas moyen de la rompre, de la calciner et pourtant il ne cesse de vivre, il ne cesse cette vie qui pulse d'énergie, qui foisonne de trop nombreux désirs, qui le propulse dans mille directions, il ne cesse sa déraison, sa force, il ne cesse les confluences des émotions, des interrogations, de la joie et du désespoir mêlés, la vie semble, ainsi, bafouer la mort, elle ne s'accommode pas de sa finalité, de sa disparation, elle se construit au défi d'une logique inéluctable, serpent qui love son corps dans sa gueule et qui ne cesse de se dévorer, il ne cesse de se tuer et ne cesse de jouir, la vie, il le sait, lui insinue l'oubli, elle éconduit, en douceur, la magnificence de la mort, elle éconduit ses vastes laideurs, les confine dans un lieu d'absence mais un jour surviendra la mort et ses innombrables manigances, vieillesse, maladie, accident, peu importe mais elle trouve toujours un moyen de s'affranchir de nos velléités, de nous contraindre à sa mélancolie, d'en finir avec nous, avec lui.

tous les prétextes sont bons. il le sait.

mais il n'y peut rien. il vivra. il s'en fout. encore et encore.

son instinct de vie est trop vorace.

il vivra jusqu'à la dernière étreinte de son souffle.

Viré monté