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Annou voyé kreyòl douvan douvan

fragment

Umar Timol

Il s’agit parfois de dénouer ces liens qui nous unissent à l’autre, non parce que nous ne l’aimons plus mais parce qu’au contraire nous l’aimons trop, parce que ce lien qui n’en n’est plus un car c’est désormais une liane faite de chair et plomb qui enserre nos moindres veines, parce que cette liane ne cesse de nous détruire, de nous saccager. Il faut ainsi partir, fuir, que cessent tous les aléas d’une amitié toujours galvaudée, toujours trahie, que cessent l’attente, l’espoir, que cesse ce cœur ensanglanté à force de trahir, il faut partir, oublier, fermer cette porte en soi, il ne doit rien demeurer de l’autre, ni son corps, ni son souffle, ni ses rêves, encore moins sa nostalgie inépuisable, il faut fuir, fuir, désemparer l’autre en soi et faire son deuil. Que commence donc ce deuil, qui n’en est pas un car comment meurt-on au vivant ? Comment meurt-on à ce qui est ? A la chair, aux os, au souffle, à l’unicité et aux paradoxes d’un être ? Le deuil est le rituel de la mort non celui du vivant. Le deuil est la grammaire de l’absence dans son absoluité On ne peut mourir à ce qui est. Mais il faut dénouer, ce lien, cette liane, il faut charcuter son âme, peu importe où elle se trouve en soi, peu importe où elle réside en soi, pour en extraire l’autre, ainsi partir, ne pas s’arrêter, ne jamais s’arrêter, ainsi affronter le vide en soi, affronter ce qui est en soi, plus impuni que la terre sans racines, plus ensauvagé que ces rides soumis au temps, ne jamais s’arrêter pour que la lumière se fasse, pas celle qui nous orne de sa plénitude mais celle qui recelé l’enseignement de notre défaite et le mystère de l’emprise d’un être, mystère que rien ne peut résoudre ni guérir.

25.04.2016

boule

 Viré monté