Potomitan

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Août 2018

La dernière génération de Femmes-Potomitan

Hector Poullet

Elles ne veulent plus être femme-chataigne, femme-potomitan.
Artocarpus altilis var. seminifera - Chatenn. Photo Francesca Palli.

Joby Bernabé, l’artiste comédien poète, reprenant une expression du créole martiniquais qui dénigrait les femmes de Fort de France, préfère déclarer:

«Fout fanm fò fout ! Lè fanm fè tan fè fòs pou fò !»

Un exercice de prononciation et d’allitération certes, mais surtout un énoncé pour valoriser les femmes.

Et c’est bien vrai que beaucoup de femmes de chez nous, aux Antilles, sont admirables.  Aussi les a-t-on désignées par l’expression Fanm-potomitan pour parler du rôle forcé qu’elles sont amenées à jouer dans nos sociétés matrifocales.

C’est le cas d’Evelyne qui a aidé son compagnon pendant des années à construire une belle maison en donnant généreusement le premier apport financier quand lui y contribuait en amenant le terrain. Puis pour participer au remboursement du prêt elle a travaillé «comme une négresse». Ils ont eu cette  ravissante fillette Anne-Eveline, alors  qu’ils n’étaient plus tout jeunes ni l’un ni l’autre. Puis, sans crier gare, sans nuage annonciateur d’orage,  il l’a chassée de la maison, et cela sans donner aucune raison à son comportement. Evelyne a été obligée de vider les lieux et de se trouver un logement. Elle a élevé seule sa fille pendant des années, celle-ci vient tout juste d’avoir le baccalauréat. Bravo Anne-Eveline, mais surtout bravo Evelyne!

Admirable,  c’est aussi le cas de Josiane qui s’est retrouvée seule avec trois enfants, une fille et deux garçons, sur les bras, quand son mari qui était sans emploi depuis plusieurs années, est retourné un beau jour en métropole, pour vivre chez ses parents!!!

Admirable, c’est encore le cas de Winnie qui a eu deux enfants, deux filles, de pères différents, mais ni l’un ni l’autre n’assure ne serait-ce que le quotidien et la mère doit faire face toute seule aux difficultés de la vie, afin d’élever dignement ses deux jeunes adolescentes.

Evelyne, Josiane, Winnie, ne sont pas des cas isolés, nous connaissons tous des cas identiques sinon pires. Et encore, leur situation est souvent bien meilleure que celle de leur mère et de leur grand-mère, quand il n’existait ni allocations familiales, ni moyen de contraception.

Et pourtant les femmes de nos pays de nos jours encore protestent. Elles ne veulent plus être femme-chataigne, femme-potomitan.

Du côté des hommes il y a un petit effort de fait pour ne pas se comporter en nonm-fouyapen (fouyapen pa ni grenn), mais pour l’instant, cet effort reste largement insuffisant.

Artocarpus altilis - Friyapen. Photo Francesca Palli.

 

Viré monté