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La Caraïbe et moi Premier voyage à Cuba Che Guevara & Fidel Castro (1961) par Alberto Korda. |
Pour moi, comme pour beaucoup de Caribéens de ma génération, il existe deux Cuba, d’une part le Cuba mythique que nous gardons dans nos cœurs nostalgiques de révolutionnaires romantiques, avec les icones de nos héros de la Révolution de Fidel et du Che; d’autre part le Cuba réel qui vit étranglé dans l’étau d’un embargo américain qui dure depuis une éternité dans l’espoir qu’ont les capitalistes cubains réfugiés à Miami d’en refaire un jour le lupanar des millionnaires américains.
Je suis allé deux fois à Cuba, chaque fois en qualité de visiteur.
La première fois le Régime castriste n’avait pas encore renoncé à l’idéologie rigide d’un socialisme pur et dur, en lutte contre le «grand Satan». Le dollar US était interdit de cité, le peso cubain convertible (CUC) pour touriste ne se trouvait pas dans les agences de change et encore moins le peso (CUP). L’espace aérien venait de s’ouvrir aux compagnies extérieures, nous sommes arrivés à La Havane avec Air France. Les Cubains devaient déclarer à la police toute personne étrangère qu’ils invitaient chez eux et pour cela, payer une taxe. La présence d’un membre de chaque famille aux réunions hebdomadaires de quartier était toujours obligatoire, les biens de consommation courante étaient toujours rares. Je me rappelle par exemple que les stylos à bille étaient considérés comme un beau cadeau à offrir.
En revanche, l’Education et la Santé étaient gratuites.
Le Malecon par kuhnmi.
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J’avais fait un peu d’Espagnol au Lycée, je le comprenais, mais n’osais pas le parler, j’accompagnais une amie qui le parlait couramment, et par ailleurs était très liée avec un couple de cinéastes connus à Cuba, la femme était d’origine française, lui Cubain. Nous avons séjourné plusieurs jours à La Havane, chez l’épouse, récemment veuve. Nous en avons profité pour visiter les lieux les plus emblématiques de la capitale cubaine, entre autres le Malecon, cette promenade du bord de mer bordée d’un côté par une digue de béton contre les assauts de la mer, et de l’autre côté par les vieilles demeures bourgeoises à l’architecture coloniale, aux couleurs passées, réquisitionnées par l’Etat cubain pour loger des familles nécessiteuses. Comme le font tous les touristes nous sommes allés boire un mojito dans le célèbre bar où se rendait jadis Hemingway. Comme tous ceux qui visitaient Cuba nous avons utilisé les taxis colorés, bricolés, bringuebalants, car datant d’avant la dictature de Batista. Nous sommes allés au fort El Morro le jour d’une grande exposition de livres, les ouvrages était vendus pour une somme modique, pratiquement donnés aux élèves, seuls les touristes payaient le prix coutant.
Santiago, cathédrale (2019) par Leon petrosyan.
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Nous sommes allés à Santiago à plus de 600 km tout à l’Est, en bus. Escale à Matanza pour une nuit dans un dormitorio chez l’habitant. Le lendemain nous avons à nouveau pris le bus pour arriver dans l’après-midi à Santiago. Beaucoup de gens sur la grande place, des hommes jouaient au jeu de dames comme en Guadeloupe, avec un public autour d’eux qui regardait sans broncher. Deux souvenirs me sont restés gravés dans la mémoire: une soirée à écouter un concert de musique cubaine assis dans les marches, l’autre souvenir c’est une visite sur la rivière Yomuri, dans une barque à fond plat, un site extraordinaire, plus émouvant encore quand on sait que ces lieux représentent le dernier refuge des premiers Amérindiens, les Tainos. C’est aussi à Santiago que j’ai vu un plus grand nombre d’Afro-cubains. Enfin, c’est également dans les environs que nous avons parcouru une plage de sable blanc, déserte à perte de vue, où j’ai pris le seul bain de mer de ce premier séjour, en étant très prudent, on dira même peccamineux.
Le temps passé à Santiago a été, pour moi le moment le plus dépaysant de ce premier voyage à Cuba. Pour aller prendre l’avion et retourner à la Havane nous avons voulu utiliser les services d’un de ces tricycles où un homme pédale comme un forcené tandis que les touristes se prélassant à l’arrière. J’avais un peu honte de me trouver dans cette position tout en souhaitant qu’il pédale encore plus vite car j’avais peur que nous soyons en retard à l’aéroport. En effet, le lendemain nous devions prendre l’avion pour la Guadeloupe, or il n’y en avait qu’un par semaine.
Je ferai un deuxième voyage à Cuba.
Topographie de Cuba par Nicolas Eynaud.
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