Potomitan

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Un parfum d’adolescence

ou le goût de la goyave verte

Evariste Zéphyrin

 

 

 

Psidium guyava. Photo F.Palli

Psidium guyava

Je cherchais pourquoi ce foutu code informatique ne marchait pas, il refusait de lancer  cette  musique de «Boccherini: Adagio»  du 17e siècle.

Sur la page html me préoccupant, plusieurs codes se trouvaient déjà, je pensais que la cause était  une restriction interne de mon hébergeur, limitant le nombre de codes par page pour ne pas consommer trop de ressource.

On ne sait jamais exactement ce que l’on peut faire ou pas, avec de la chance on leur signale, monnayant un supplément nous obtenons des droits, c’est le terme usité dans le monde de l’informatique, bien souvent on est face à un refus catégorique, avec pour incidence de migrer son site aux USA ou de se faire son propre serveur  afin d’avoir une plus grande liberté de codage.

En cherchant une musique qui pourrait accompagner la page en question, tous les classiques de la période  du (17e siècle) ne fonctionnaient pas, je me suis retourné vers les standards du jazz, sans plus de résultat, puis ce fut Barry White qui me vint à l’esprit, j’écoutais deux morceaux, remontaient en moi des souvenirs de pré-adolescence, des souvenirs d’un enfant de 11 ans, le moment où j’émigrais en France.

En Martinique, je me souviendrais comme d'hier, la déferlante de la musique haïtienne s’abattait sur les ondes, les «punchs en musique» et dans les soirées.

Mes parents en Métropole, je vivais chez une tante ayant sans doute mieux à faire que de s’occuper de moi, j’acquis une grande autonomie et pendant les quelques mois où mes parents furent absents, je profitais au mieux de mon indépendance, me rendant dans des boums, ce n’est pas le terme que nous usions, mais la matérialité était la même.

J’avais des cousins résidant dans un quartier populaire et avec le recul, je finis par me dire que nous  vivions dans deux mondes différents, eux dans une grande convivialité avec leur voisinage citadin, faisant des «punchs en musique» l’après midi où l’on trouvait une tripoté de jeunes filles.

Cela me changeait du lieu ou j’habitais des bourgeois et des blancs se croyant les uns au-dessus des autres,  se disant à peine bonjour, presque au obligé de jouer en cachette avec les enfants de mon age: mes voisines.

Il s’avérait que leurs parents les empêchaient de s’amuser avec moi ou avec d’autres. Nos parents nous confinaient, et nous échangions, jouant  seulement quand ils s’absentaient.

Ce quartier vivotait, morne, monotone, sans vie, certes de belles maisons créoles peintes en blanc avec le jardin à l’anglaise, tout le monde s’y pliait, tout le monde avait opté pour le gazonnage du jardin  comme s’il s’agissait d’une tradition, par contre derrière la maison certains  construisirent une pièce pour loger la bonne, mon père ce fut  des caloges pour ses coqs de combat, à bien y penser on s’ennuyait, alors, souventes fois  je partais en drive, je ne restais  en place, allant dans les bois, dans la mangrove, où dans des lieux  populaires, plus vivants où l’on pouvait se bagarrer sans se faire traiter de sauvage, de ti-neg…

Chez mes cousins de Trénelle, je me coltinais avec le peuple ouvert et jovial, ils poussaient les tables,  leurs parents les aidaient et les voilà parti  en musique s’invitant les uns et les autres à danser.

Dans mon quartier la seule musique forte que j’entendais provenait d’un quartier limitrophe, moins bourgeois mais pas populaire pour autant.

Je n’eus pas le temps de mesurer tout ce qui me séparait de mes cousins, mais j’aimais â être avec eux dans ces tours au long corridor  où l’on prenait le «frais» en regardant chuter le soleil des cieux du haut des étages.

Les relations étaient tout autres, dans mon quartier peuplé de «blancs», mulâtresses, de chabines, je parle des filles de mon âge, par conséquent de leurs parents. 

Nous étions dans une «pigmentocratie»,  pas dans l’excellence, la couleur de peau était à elle  seule un capital,   j’ai terminé dans les trois premiers le concours de passage en 6e, et eux? 

Ce n’est que tardivement que je compris ce qui se jouait dans ce quartier où plutôt ce qui se perpétuait, la couleur nous différenciait et nous sériait dans une catégorisation, rien n’était dit, que du tacite, une échelle colorimétrique s’insérait comme une barrière entre les êtres.

L’enfant n’a pas cette capacité d’analyse, il ressent les injustices, perçoit les anormalités des situations et dit que les grandes personnes sont couillonnes! C’est ainsi que nous parlions de nos parents et même les roustes ne nous dissuadaient de jouer ensemble et pourtant nous fûmes roustés. Nous abattions ce mur de racisme que l’on construisait insidieusement dans nos têtes et autour de nous. Nous échangeâmes nos premiers baisers, nos premiers touchés à leur insu.

Ce fut à la cité de Trénelle, que je connus «ma première copine officielle», personne ne s’en étonnait ou s’en offusquait, ils nous encourageaient, nous marchions main dans la main, nous nous bisoutions ou nous nous bisions, nous nous prenions par les épaules comme l’aurait fait un adulte.

Elle était plus âgée deux ou trois ans, cela n’avait pas d’importance,  elle était magnifique, une jeune fille avec les yeux verts, tirant parfois sur le gris,  ce n’était pas une chabine, une noire au long cheveu,  avec une peau marron claire, d’une douceur, d’un velouté…

Plus aguerrie que moi dans les choses de l’amour, je me laissais conduire, elle m’apprenait.

Puis vint le départ pour la France, un moment de tristesse mêlé de joie, celle de retrouver ma mère et ma sœur, mon père je ne l'aimais pas,  des sentiments mélangés me parcouraient.  

La veille, la femme de mon grand-père organisa un bal, je ne sais comment mais la jeune femme était présente, nous étions comme mari et femme, mais le lendemain  je prenais l’avion, si  j’avais pu m’enfuir, je l’aurai fait.

J’ai raconté mon arrivée sur le territoire métropolitain, je n’y reviendrai pas. Nous habitions un appartement dans le 15ème,  celui de ma tante pas très loin à la rue Paul Barruel, un grand et bel appartement, cette dame était riche, travaillant la nuit alors elle employait une jeune femme de 17 ans pour surveiller ma  petite cousine.

La servante  d’origine guadeloupéenne avait de ces seins,  bien qu’ayant à l’époque 12 ans j’étais fasciné par ses roberts, par ses gros lolos, elle avait dû le remarquer, je me frottais  sans cesse à elle.

La plupart du temps elle riait à mes assauts, puis un soir elle s’est endormie devant la télé, j’ai écarté le haut du pyjama, et j’ai eu face à moi une paire de seins, comme on n’en fait plus aujourd’hui.  Plein d’audace  je les caressais, puis  les embrassais, les suçais, je tétais ces seins qui durcissaient, les tétons pointaient, la servante soupirait doucement à mes caresses,  ceci dura un bon moment, puis  j’introduisis ma main dans le bas du pyjama allant à la recherche de son vagin.

À l’époque c’était du naturel, il fallait se frayer un chemin dans cette brousse de poils pour atteindre l’écarté rosâtre,  je pus jouer un  moment avec, elle mouillait abondamment, ensuite je me mis dans l’idée de la pénétrer,  mais avec le bas du pyjama s’il permettait à ma main d’atteindre sa cible, il en allait autrement pour la pénétration.

La jeune femme fit deux mouvements me laissant croire qu’elle se réveillait,  je rangeais mon sexe a sa place, la réajusta,  quand tout fut rentré dans l’ordre la demoiselle  se réveilla.

J’étais persuadé qu’elle ne dormait pas car la manière dont j’ai tété, sucé, tripoté ses seins, trituré son vagin, elle ne pouvait que s’en rendre compte.

Elle accepta les caresses mais pas la pénétration.

Jamais nous en parlâmes, ce fut notre complicité à nous.

Par la suite, nous nous rencontrâmes dans la discothèque de ma tante, nous dansions, nous avions formé un petit clan, et quelque part je retrouvais cette ambiance de la cité de Trénelle, certes en décalé, mais on ne s’embarrassait de fioriture, si une fille du clan voulait danser, elle venait vous chercher. 

J’aimais ce naturel, tout était simple, mais j’avoue  ce n’était pas avec elle que je préférais danser car sa poitrine faisait écran, je pouvais difficilement me coller comme je le souhaitais, alors j’avais adapté ma façon de danser, je bougeais surtout le buste dans un mouvement lui massant tétons et mamelons. Ses seins se durcissaient, je les pressais plus fortement, elle posait sa tête sur mon épaule et soupirait. 

Cette jeune femme aux seins prodigieux, est  morte, il y a 20 ans à peu près, on m’a dit qu’elle n’était pas prête, mais elle est partie.

Je n’ai jamais demandé les causes  de sa mort, car au fond de moi   je crois savoir ce qui l’a emporté.

À chaque fois que je pense à elle, me vient cette musique, car chez ma tante, il y avait un mange disque et sans cesse nous passions ce morceau, mais ce disque est bien plus que cela, c’est le temps des jeans serrés, d’Hollywood chewing-gum, des films de la blaxplotation  que nous allions voir sur le boulevard de Bonnes-Nouvelles.

Evariste Zéphyrin

 Viré monté