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Le Moigne et son livre
«Poèmes du sel et de la terre»

 

Jeanne Maillet
In Feuilles de poémier
Avril-mai 2010

Portrai

Dans son recueil «Poèmes du sel et de la terre», paru à «L’arbre à parole», José Le Moigne nous apparaît comme ce chantre dont l’économie d’expression et la « mesure » cachent une flamme intérieure et une intensité qu’encercle les mots, comme de prudents remparts.

Ainsi semble t-il chanter à «contre jour» ou dans un secret balancement entre le «pays mouillé» où on l’a «déposé» et le «tutoiement des cannes» et «l’orgueil des totems» de sa terre de naissance, la Martinique.

Il y a dans ces poèmes une secrète lutte entre deux vagues qui se heurtent et se brise l’une contre l’autre, entre une certaine torpeur voulue par un climat nordique et le saut bondissant de la bête dans son paysage, frappant le cœur comme un éclair.
Une silhouette de femme se profile, héraldique et belle, discrète aussi, dont le poète nous parle avec délicatesse dès la première page.

Comment fait-on
pour oublier
la naissance d’un cil
dans le printemps des yeux

Dans son parcours, José Le Moigne salue quelques amis (Guy Goffette aux silences impatients) Caroline Roeland, Christine Simonis, Gilbert Millet, Jean Métellus, Raphaël Confiant, Joseph Zobel, Moncef Gachem). Dans son court poème pour Alfred Largrange, il a ces phrases magnifiques:

Fuir
avant que le soleil
ne mène les étoiles
jusqu’à l’autodafé

ce qui en dit long sur cette clameur d’impuissance liée à tout être humain de mettre à jour ses rêves, même par le biais de la poésie?

Aucun livre jamais
ne s’ouvre tout à fait
la mémoire conserve
une trouée de mots
comme pour lier l’ailleurs
aux vignes du présent

Une toute dernière partie du recueil sous le titre «Échos de l’île» offre une avancée magnifique vers une île (idéale? Commune à toute île? Abordable par de multiples accrocs ou éclats de soleil?) là, on sent bien qu’il y a de profondes racines sous cette île même, comme d’une barque généreuse, glorieuse, où «viennent s’abreuver les chevaux de l’exil», mais non tendre, toujours distante, fruit d’une espérance et d’un combat.

Ces lignes vous ont-elles convaincus de lire José Le Moigne? Et tout spécialement «Poèmes du sel et de la terre»?

C’est une façon très sûr d’entrevoir, sur une île, une lumière scintiller entre les dunes. Sommes-nous sur les rivages nordiques? En Martinique? L’amalgame se fait tout seul dans un chant pur et fort de poète.

Jeanne Maillet
In Feuilles de poémier
Avril-mai 2010

 Viré monté