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La compassion en transparence perçue  de

‘‘L’autre face des étoiles’’

Recueil de poésie : Marie Sœurette Mathieu

 

Marie Flore Domond

 

‘‘Nous n’apprécions guère ce que
nous avons qu’avant de le perdre.’’

 

L’autre face des étoiles

Une double muse confère-t-elle  une sensibilité plus dense en besogne d’écriture? Ou est-ce l’inverse qui tend à élargir,  multiplier même les champs d’inspiration d’un écrivain? En ce qui concerne Marie Sœurette Mathieu, s’agit-il  d’une démarche ambivalente trainée inconsciemment dans le  sillon d’une écriture croissante, ou encore une simple alternance qui lui permet de trancher son univers imaginaire en deux, consumant ainsi le genre fiction à travers les romans, et la poésie évoquée comme mémoire du rêve éveillé?

Pour une sociologue de profession, le dilemme de l’ambivalence ou de proportion ne saurait échelonner en quarante ans d’usure de plume. La théorie de l’écriture mixte, entrainant un raccourci emprunté par nécessité créatrice, se veut  plus probante. Le bilan de sa bibliographie en témoigne. Quatre romans et six recueils de poèmes.

L’autre face des étoiles, le plus récent, rentre dans l’ordre d’une œuvre de nécessité créatrice qui représente un supplément du besoin naturel de l’auteure, car dans le contexte de l’inspiration, le besoin est un élément indispensable par rapport à la nécessité. Un seul motif suffit à justifier la nécessité absolue d’inspiration de cette poésie généreuse, d’avant-scène, d’épreuve, cette poésie expérimentale. D’abord, l’attachement à la Mère Patrie. Notons que  ce ne sont  là que  les bienfaits de la chose écrite et  non les vertus appropriées à l’auteure. Toutefois, il est juste de tenir compte de la profondeur d’un tel sacrifice par l’introspection de l’empathie!

«À quelque chose malheur est bon», dit le vieil adage. L’autre face des étoiles exprime la compassion, un effort évident, déployé pour cristalliser la transparence des mots par la concision d’une émotion inconfortable: la fragilité humaine. La culpabilité de l’impuissance face à la tragédie. La perte inestimable des êtres chers autant  que des inconnus.

Le Haïku est une technique de poésie-synthèse, d’origine japonaise, qui rivalise avec la poésie conventionnelle et qui laisse libre cours à la pensée bavarde. Et pour les besoins de la cause: TRAGÉDIE DU SÉISME DATÉ DU 12 JANVIER 2010, c’est sur commande que l’auteure a accepté d’expérimenter ce genre comme en état d’urgence. À ce titre, quelques élans paradoxaux.

«L’odeur des mangues
Mêlée au corossol
Embaume les cadavres » (Page 15)

«C’est beau le soleil, la mer
La verdure, les fruits
Faut la vie pour y goûter» (Page 18)

«La terre s’énerve
Le deuil s’ensuit
Au bout de l’ile un cri
Des jambes s’ouvrent jumeaux» (Page 19)

Marie Sœurette Mathieu

Marie Sœurette Mathieu

Quant à la deuxième partie composée de poèmes conventionnels, on retient: MÉTAMORPHOSE, HAITI, QUÉBEC, LES OUBLIÉS. Parmi ce tri, partageons mes deux coups de cœur difficiles à passer sous silence. Dans ces deux témoignages, de nombreux citoyens y trouveront leur tendresse commune tout comme moi. Et Peut-être y trouverons-nous la combinaison gagnante  dans la compilation des élans naturels de l’auteure.

Récapitulons:

2 (raisons de l’aimer),  10 (qualificatifs), 20 (raisons de l’adopter),  50 (moyens de louanger), 100 (façons de l’aimer), 402 (raisons de le fêter). A tout hasard, n’oubliez surtout pas de valider: 02, 10, 05, 01, 00 40, 42 dans les différentes terminaisons telles: Banco, Loto Max, Québec 49, 6 ̸ 49.  Plus de quarante années consacrées à l’écriture, cela se fête! Et si de plus, la chance vous sourit chers lecteurs et lectrices, gardez en tête l’action de DONNER AUX SUIVANTX... 

«J’ai un pays bâti sur les poumons de la mer
Un pays érigé sur les reins du vent
Lorsque tornade et siphon dansent la valse
Des naufragés
Pleurs, famine et soir
Riment avec désespoir

J’ai un pays qui nage dans le rouge
Un pays pourtant teint de couleur bleue
Bleu pour les vagues indéfinies
Bleu pour le ciel suspendu
Entre le vent du feuillage et le jaune du soleil

 J’ai une ville construite sur des failles
Quand du ventre de la mer en colère
Part un grand tourbillon
La terre tremble avec rage
Pour faire rimer malheur avec pleur

J’ai un pays suspendu
Vers l’autre face de l’étoile
La noirceur effraie l’enfance
L’eau est recueillie au compte-gouttes
Dans un sceau squelettique
J’ai palpé ce pays
Dans toutes ses dimensions
Sa hauteur tissée dans les grillages de l’eau
Sa largeur empruntée de l’érosion féroce
Son épaisseur effilochée

Je rêve de ce pays
En égrenant le jour
Le temps s’impatiente
Aux  caprices de la nuit nourrie
D’étoiles filantes»

«Québec
J’ai deux raisons pour te dire je t’aime
Tu es ma terre d’accueil
Tu es une ville scintillante

J’ai sur les lèvres dix adjectifs pour te qualifier
Tu es chaleureuses et majestueuse
Tu es accueillante et altière
Tu es belle et prestigieuse
Tu es charmante et grande
Tu es ouverte et mature

J’ai vingt raisons pour t’adorer
Elles sont toute écrites sur mon cœur
Elles me portent à sourire
Même quand ton hiver me gifle

J’ai cinquante moyens de te louanger
Autant de batailles et même plus
Qui se sont engagées
Sur ton humide terroir

J’ai cent façons de t’aimer
Elles me sont particulières
Elles me poussent à te revenir
Lorsque je m’éloigne de toi

J’ai quatre cent deux raisons de te fêter
Mère adoptive nommée Capitale
Belle vielle mère à l’âge de diamants
Incrustés dans de solides montagnes.»

                                (Québec, Haïti, L’autre face des étoiles pages 32, 34).

boule

 Viré monté