Potomitan

Site de promotion des cultures et des langues créoles
Annou voyé kreyòl douvan douvan

Contributions à la philosophie théologique de John Wesley

par Saint-John Kauss

La vie et surtout l’oeuvre de John Wesley sont, à notre avis, l’une des manifestations du témoignage de l’Esprit-Saint, et que Dieu lui-même a ordonné à John Wesley de prêcher la Parole à tous les hommes sans exception. C’est par une bénédiction spéciale que celui-ci a été guidé par l’Esprit-Saint, le souffle Divin, vers les Saintes Écritures, et, l’expérience aidant,  il a su nous laisser cette grande vérité évangélique qui, durant près de deux cent ans, fit son chemin dans le cœur des hommes.

BREF APERCU SUR LA VIE DE JOHN WESLEY

John Wesley naquit à Epworth (Angleterre), le 17 juin 1703, d’une famille chrétienne. Son père, Samuel, était prédicateur anglican et Suzanne, sa mère, une femme pieuse mais exigeante. À l’âge de six ans, soit le 9 février 1709, John Wesley a failli perdre la vie dans l’incendie du presbytère de son père. Cette expérience le marquera toute sa vie. Il se décrira comme «un brandon arraché aux flammes» (Zach. 3 :2; Amos 4 :11). Il verra dans cet événement un signe du Seigneur pour qu’il accomplisse de grandes tâches chrétiennes.

Des études entamées pour devenir prédicateur. Inscription à Oxford en 1720. Fellow en 1726, puis chargé de cours au Lincoln College. Né au moment même où l’Angleterre sombrait dans le Déisme, John Wesley cherchera plus tard le salut plutôt dans la voie du ritualisme et de l’ascétisme. Avec quelques compagnons d’études, dont son frère Charles Wesley, il fonda le «Holy Club». Par dérision, son club adhérent fut appelé «Méthodiste» à cause de certaines disciplines de vie et des règles trop strictes imposées pour devenir des «chrétiens complets». Le salut dans la foi, une vie de jeûne et de prière, de lecture et de méditation biblique, sans oublier des engagements sociaux auprès des pauvres, des malades et des prisonniers, telles furent les principales règles de conduite à suivre.

La Société pour la Propagation de l’Évangile envoya John et Charles Wesley en Géorgie (USA), en partie pour y convertir les Indiens au Christianisme. Ce sera un échec total. Par manque de foi, John Wesley ne se sentira pas capable de convertir quiconque. «Je suis allé en Amérique pour convertir les Indiens. Mais Oh! Qui va me convertir, moi?», écrit-il.  Pourtant de ce voyage, il aura su qu’il était encore un inconverti et qu’il lui aura fallu encore du chemin à faire dans sa quête de paix intérieure, surtout après sa rencontre avec les Frères Moraves qui l’ont complètement impressionné par leur foi en Dieu.

Les différentes branches créées par la suite à l’intérieur de ce groupe, le Holy Club, se répandirent en Écosse et aux États-Unis. Mais Wesley était toujours inquiet concernant son Salut, espérant le trouver en prêchant aux autres. Il retourna en Angleterre et se mit à fréquenter les réunions morales de Londres. C’est en ce sens qu’il se convertit le 24 mai 1738 en écoutant la lecture du commentaire de Martin Luther sur L’Épître aux Romains. Ceci suscita un tel changement chez lui qu’il a ressenti «une étrange chaleur dans son cœur: Dieu y a allumé un feu qui ne s’éteindra plus jamais». De là, il a compris que Dieu pouvait opérer des miracles dans le cœur de l’homme, de tout homme, et ce, par le truchement de la foi.

La venue au monde de l’un des plus grands revitalistes religieux, John Wesley, était attendu dans le milieu évangélique. Il est venu à un moment où l’église cherchait un successeur à Martin Luther, comme ce fut le cas de l’Apôtre Paul pour l’Église primitive. Un croyant qui devait, tout comme son prédécesseur, faire le nettoyage des entraves et menaces, lequel contribuerait à parachever la réforme religieuse. John Wesley, comme son père, dénonçait les vices pour les corriger. D’où la faillite de Samuel Wesley auprès des habitants d’Epworth. Ceux-ci contestaient les messages du Révérend Samuel, lesquels étaient de nature à dénoncer et à vouloir tout changer. Mais Dieu avait tout prévu. Il a opéré un miracle certain en envoyant ces deux hommes pour sauver John Wesley «des flammes de l’Enfer». À ce moment précis de l’incident où seule la foi prédominait, ces hommes furent certainement guidés par la main divine.

Si l’on compare John Wesley à Israël (Zach. 3 :2), l’ennemi aura beau essayé de les détruire par le feu, mais Dieu les délivrera pour faire d’eux ce qu’ils furent, un prophète (Israël) et un rénovateur (Wesley). «Ce que Dieu veut, c’est votre sanctification.», nous dit la Bible (1Thessaloniciens 4 :3). John Wesley fut aussi ce libérateur, un conciliateur d’idées, cet apôtre de la liberté spirituelle des masses, dont l’Angleterre avait tant besoin pour préserver les autres du feu éternel.

LA PHILOSOPHIE THÉOLOGIQUE DE JOHN WESLEY

Si John Wesley se laissait, outre mesure, influencer par l’opinion de l’Apôtre Paul, à savoir que pour se donner tout entier à la cause du Maître, il est préférable d’être seul, nous aurions l’un des plus grands théologiens de tous les siècles. Car ses mésaventures avec les femmes l’ont probablement conduit à une régression spirituelle. Son mariage finalement avec cette veuve de 49 ans, le 19 février 1751, fut une écharde dans sa chair. Quand on calcule le désastre observé dans la vie intime d’un homme de Dieu de l’envergure de John Wesley, ceci laisse à penser que la vie familiale ainsi que  les contraintes sociales ne peuvent, à certains égards, qu’exercer des influences néfastes sur la vie religieuse de quiconque. Jésus avait raison de ne pas s’en mêler.

Le Salut par la Foi

Malgré tout, il est important d’accorder une attention spéciale à sa philosophie doctrinale qui demeure au fond de toute prédication wesleyenne. Les principales composantes que renferme cette doctrine sont au nombre de trois: La repentance, la foi et la sainteté. Pour John Wesley, la repentance est le portique de la religion, tandis que la foi symbolise la porte, et la sainteté est la religion elle-même.

Sur le terrain de l’expérimentation du Salut se dresse la question des rapports de l’action de l’homme et de l’action de Dieu. Le problème relève de la grâce et du libre arbitre. Saint-Augustin nie le second; tandis que Pelage rejette le premier. Quant à Wesley, il recherchait, comme toujours, à concilier les deux termes en évitant les vues extrêmes. Il se gardait toutefois de les placer au même niveau. Et lors de la première conférence, en 1744, sur la voie du Salut, il affirmait qu’en réalité la foi est l’unique condition et qu’elle suffit à elle seule d’être justifié. Pour Wesley, la foi en Christ seule peut sauver le croyant, d’une foi fertile par laquelle il reconnaît la nécessité et la vertu propitiatoire de la mort du Christ ainsi que la valeur efficace et métaphysique de sa résurrection. Selon lui, le salut par la foi en Christ est un salut présent qui nous délivre du péché, de la culpabilité de tout péché passé (adamique ou volontaire) ainsi que de sa puissance et de toute crainte servile pour une vie nouvelle jusqu’à l’état d’un homme parfait, consacré et adopté en Christ. Mais la foi et les bonnes œuvres, à notre avis, doivent être complémentaires. La justification par la grâce prévenante et par la rédemption en Christ mérite davantage de l’effort du croyant, de par ses propres moyens, afin de compléter cette délivrance gratuite et démontrer de la gratitude à l’Être suprême, c’est-à-dire envers la Trinité.

Mais quand peut-on se considérer chrétien? John Wesley nous apprend à discerner le fait d’être «presque chrétien» et être tout à fait chrétien. Il nous instruit aussi sur la différence qui existe entre l’honnêteté païenne et la vraie foi chrétienne. Selon lui, l’homme presque chrétien se propose sincèrement de plaire à Dieu en toutes choses, dans toute sa conduite, dans toutes ses actions, dans tout ce qu’il fait et dans tout ce qu’il s’abstient de faire. Alors que «la véritable foi chrétienne, ce n’est pas seulement d’admettre l’Écriture et nos articles de foi, mais c’est avoir la ferme assurance d’être sauvé par Christ de l’éternelle damnation. C’est la ferme confiance qu’un homme a en Dieu, que, par les mérites de Christ, ses péchés lui sont pardonnés et qu’il a retrouvé la faveur de Dieu. De cette foi naît un cœur plein d’amour pour obéir à ses commandements.»

La repentance, à notre avis, est nécessaire pour la justification du pécheur, mais elle ne peut pas l’être dans le même sens et au même degré que par la foi. Quant aux fruits de la repentance, ils ne sont exigés que d’une façon conditionnelle, paraît-il, c’est-à-dire si on a le temps et l’occasion de les porter. Dans le cas contraire, on peut être justifiés sans eux comme ce fut le cas du brigand sur la croix auprès de Jésus. Mais est-il donc permis de considérer la repentance comme une condition du salut?

Wesley répond à la question de la repentance comme suit: «elle n’est pas seulement une affaire de sentiments et d’émotions, elle doit mettre en mouvement toutes nos facultés et tout d’abord l’intelligence». La doctrine de la repentance n’est-elle pas celle de Jésus Christ? Celui-ci enseignait à ses disciples et donnait l’ordre «d’aller partout dans le monde….». Les disciples, selon l’ordre, parcouraient, de lieu en lieu, les grands  espaces de la terre en exhortant les peuples à se repentir pour le pardon de leur péché. Et voilà la première repentance, la conviction du péché qui précède la foi.

Il est juste de constater que la doctrine de la justification par la foi de Jésus est similaire à celle de John Wesley. Effectivement, elle ne révèle tout aussi bien que ces deux éléments: conviction et confiance, lesquels sont des dérivés de la foi. Cette dernière est une évidence ou conviction divine surnaturelle des choses qu’on ne voit point (Hébreux 11 :1). Il s’ensuit que la doctrine de la justification par la foi est la doctrine essentielle et centrale de la Réforme. Ce fut le principe qui occupa la place d’honneur dans les symboles du XVIe siècle. Cependant, cette doctrine fut peu à peu méconnue et oubliée dans les âges suivants. Le rationalisme d’un côté, et les formalistes de l’autre, battirent fortement l’enseignement des réformateurs. L’Église anglicane, en particulier, lui serait infidèle durant son absence. Wesley déclara à son retour d’Amérique: «J’étais dans la complète ignorance sur la nature et la condition de la justification puisque je la confondais avec la sanctification. Je croyais qu’elle devait être ajournée à l’heure de la mort ou au jour du jugement.» Wesley ignorait la nature même de la foi qui sauve et il considérait comme étant autre chose la lumière qui provenait des écrits de Luther.

L’acte de Dieu, le Père, par le Fils, a causé la propitiation faite par le sang de son fils. La justice de Jésus Christ est imputée à quiconque croit. Car croire en la parole de Dieu, c’est croire en  la justice du Christ (Jean 1 :12). De même Jean Calvin, le réformateur, eut à dire : «Christ par son sang nous a éprouvé et mérité la grâce et la faveur de Dieu, le Père. Jésus Christ, par son obéissance, nous a acquis la justice. Nous sommes justifiés par la grâce de Dieu.» La doctrine de John Wesley met aussi l’accent sur la régénération, un changement radical que Dieu opère dans le cœur de l’homme, une transformation accomplie par le Saint-Esprit, le souffle divin. Mais d’aucuns ou certains théologiens ont soutenu que les termes «justification» et «régénération» sont synonymes. Néanmoins, pour John Wesley, la régénération est la porte vers la sanctification.

Il est bien connu que la doctrine de John Wesley s’applique à l’entière sanctification ou la perfection chrétienne, que la possibilité et la nécessité de la sainteté parfaite dérivent de la foi, et que le salut est présent. Contrairement aux autres congrégations, les méthodistes croient, et à juste titre, que la sanctification parfaite ou entière est possible dans la vie présente. Pourtant, les unes pensent qu’elle ne se réalise qu’à la mort; tandis que d’autres, après la mort dans un état intermédiaire de purification. L’Église romaine a imaginé un purgatoire où les fidèles se perfectionnent et se préparent à la rencontre de Dieu.

Selon Wesley, le mécanisme d’adaptation et du rejet complet du péché en tant qu’acte de transgression contre la loi divine, semble ce qui suit: Péché ------ Repentance ------ Justification ----- Régénération ----- Sanctification initiale -------------Sanctification progressive --------- Sanctification totale -------- Adoption.

Pour ou contre John Wesley

Plusieurs critiques peuvent être élaborées eu égard à la philosophie théologique wesleyenne. Par exemple, si la perfection, la pureté du cœur, l’amour parfait, ainsi que l’entière sanctification n’appartient qu’à Dieu, comment veut-il que les chrétiens soient parfaits, exempts d’erreurs, et à l’abri de toute tentation? La perfection à laquelle le chrétien doit aspirer ne serait  donc ni la perfection absolue, ni l’infaillibilité qui n’appartient qu’à Dieu. L’homme ne peut être parfait. Une erreur d’opinion ou d’interprétation peut conduire à une erreur de conduite. Et toute erreur de ce genre est une transgression de la loi parfaite. Par conséquent, une telle erreur imposerait à celui qui la commet la damnation éternelle, si ce n’était le sang du Christ. Bref, il en résulte que même les plus parfaits ont un besoin continuel des mérites du Christ.

Mais l’œuvre de rédemption du Christ est-elle restreinte à une partie de l’humanité ou s’étend-t-elle à tous les hommes? Saint-Augustin affirma que la prédestination nous forme. Il enseigna que Dieu destinait une catégorie d’individus au Salut, et les autres à la perdition. Les réformateurs, comme Calvin, ont adopté sa doctrine et la mirent à la base de tout leur système. John Wesley manifestait pourtant une vive répulsion pour la doctrine de la prédestination. De ce fait, en 1740, il publia son fameux sermon: LIBRE-GRÄCE, qui est d’une écriture éloquente et qui dénonce avec véhémence les dangers et les méfaits de la prédestination. Les reproches adressées à cette doctrine sont les suivantes: a) elle rend inutile la prédication parce qu’il ne sert à rien de prêcher à ceux qui sont élus; b) cette doctrine tend à détruire cette sainteté qui est le but de Dieu; c) elle tend à détruire les consolations et le bonheur que la religion peut apporter aux hommes; d) cette doctrine nous détourne des bonnes œuvres et nous rend insensible aux misères morales des hommes; e) elle renverse la révélation chrétienne; f) elle méconnaît les affirmations les plus positives des Écritures.

Paradoxalement, plusieurs objections ont aussi été faites à la doctrine de John Wesley par quelques-uns. Par exemple, le fait de prêcher le salut, ou la justification par la foi seule, n’est-ce pas prêcher contre la sainteté et les bonnes œuvres? La réponse à cette critique fut assez fulgurante à savoir qu’il parlait au contraire «d’une foi fertile en toutes sortes de bonnes œuvres et en toute sainteté». Au-delà des apparences, si on examine plus profondément cette objection, il est question surtout de ne pas anéantir la loi par la foi. Mais ce serait  plutôt «tous ceux qui ne prêchent pas la foi, (qui) anéantissent évidemment la loi». Car «tout en ne se confiant qu’au sang de Christ, les croyants pratiquent sans exception les ordonnances», répliqua-t-il. Mais la prédication de cette foi ne pousse-t-elle pas les hommes à l’orgueil? À cette question, John Wesley nous renvoie au grand Apôtre Paul, lequel prévoyait cette même objection et y répondait: «Où est donc le sujet de se glorifier? Il est exclu. Par quelle loi? Par la loi des œuvres. Non, mais par la loi de la foi.» (Rom. 3 :27). Car si nous sommes et serons sauvés, ce n’est pas par les bonnes œuvres, mais plutôt par la foi et par la grâce de Dieu. «Ni votre foi, ni votre salut ne vient de vous: c’est un don de Dieu», nous dit l’Évangile (Éphésiens 2 :4-8). On lui reproche, également, à John Wesley le concept de «la justification par la foi seule», à savoir que dire que la miséricorde de Dieu justifie ou sauve gratuitement par la foi seule, que  ce concept encourage les hommes à vivre dans le péché. Il rétorqua par l’affirmatif en acceptant que plusieurs «demeureront dans le péché afin que la grâce abonde, mais leur sang sera sur leur tête».

En conclusion, John Wesley a été appelé un «théologien pratique», connu aussi comme étant un «éclectique». Bénie soit son âme dans toute notre gratitude pour cette vision théologique si créative. AMEN.

Références Bibliographiques

  • BRENGLE, Samuel L. : Vers la sainteté, Kansas City, Maison des publications nazaréennes, 1984.
     
  • COUTTS, Frederick : Destiné à la sainteté, Paris, Altis, 1965.
     
  • GREATHOUSE, William M.: La plénitude de l’esprit, Kansas City, Beacon Hill Press, 1986.
     
  • GUITON, William Henri : Introduction à la Bible, Flavion (Province de Namur, Belgique), Le Phare, 1973.
     
  • LELIÈVRE, Matthieu : John Wesley, sa vie et son œuvre, Kansas City, Maison des Publications Nazaréennes, 1992.
     
  • STALKER, James : La vie de Paul, La Bégude de Mazenc (France), Croisade du livre chrétien (CLC), 1979.
     
  • WESLEY, John : Le salut par la foi, Sermon prêché à l’Université St-Mary d’Oxford, Angleterre, 18 juin 1738.
     
  • WESLEY, John : Presque chrétien, Sermon prêché à l’Université St-Mary d’Oxford, Angleterre, 25 juillet 1741.
     
  • WYNKOOP, Mildred Bangs: Les fondements de la théologie Wesleyo-arminienne, Kansas City, Maison des publications nazaréennes, 1999.

       

 Viré monté