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Perles des Antilles

Saint-John Kauss

Tahar Ben Jelloun, dans l’introduction à son livre LE RACISME EXPLIQUÉ À MA FILLE, exprimait que «je suis parti du principe que la lutte contre le racisme commence avec l’éducation. On peut éduquer des enfants, pas des adultes.» Dans l’optique même de cette affirmation, nous voulons  surtout atteindre les enfants qui n’ont pas encore de préjugés. À l’école secondaire, c’est le lieu  par excellence des communications, des relations et ruptures sociales importantes, des projets entre jeunes amis. C’est le temps des «mauvais coups», des orientations sexuelles précoces, des choix de vie ou de partenariat probable. C’est aussi le moment de l’évolution du racisme dans la psyché de l’adolescent. C’est le temps d’enrichir son instruction ainsi que son éducation. L’adolescence est une étape très fragile dans le processus du développement de l’Être. Celui-ci se cherche et cherche des modèles, entend, écoute attentivement, et apprend vite. Il faut lui éviter certains commentaires désastreux, même par plaisanterie. Des adultes, en mal de popularité, s’acharnent sur telle ou telle race ou ethnie, et en disent des «perles» durant les réunions de famille et barbecues.

D’autre part, des professeurs aigris ou frustrés, se sentant envahis par la mondialisation des races, font du tort à certains étudiants mal-aimés, soit à cause de leur laideur ou de leur couleur. Mais la laideur, comme la couleur, est relative. Ce qui est beau au Québec ne veut pas nécessairement dire qu’il sera beau en Afrique, en Haïti ou en Algérie. En Haïti par exemple, le zombi  ou le mauvais esprit est perçu comme une entité, recouverte d’un drap blanc. À l’école secondaire, premier point d’arrêt pour petits immigrants au Québec, le grand bond n’est pas chose facile. Mais comment font-ils pour entrer au Collège ou Cégep? En tâtonnant. Et si les dieux d’Afrique sont favorables, on peut choisir les techniques ou les sous-domaines de la sociologie, de l’administration ou de l’éducation. Rarement, on se lance dans les cours qui nous conduiront aux sciences appliquées, à la médecine ou à l’ingénierie. Peine perdue, pensent les plus brillants de nos jeunes compatriotes.

Et ils ont presque raison. Car depuis le secondaire, ils ne font qu’entendre le slogan: «vous ne trouverez pas de boulot, alors que moi (Gaston ou Jean-Philippe) je …». Des témoignages d’anciens étudiants à la Maîtrise ou des doctorants font pleurer plus d’un. Comment étudier et de ne pas avoir de boulot? Comment payer les dettes à l’État, les prêts et bourses? Au Québec, plus vous étudiez, plus vous êtes suréduqué, plus il est difficile d’être engagé ou de se faire engagé surtout quand on est Noir ou Arabe. Tout le monde s’étonne que vous ayez un doctorat. Bleu, blanc, rouge, jaune, et même le Noir.

Bref, à l’école secondaire, on dirait que les responsables des orientations de l’étudiant sont bornés dès qu’il s’agit d’un petit à la peau brune ou foncée. Ils les orientent vers des domaines bien précis tels que la musique, la poésie, le sport, la sociologie, les sciences politiques, l’administration ou la danse. Mais pourquoi pas la médecine, l’agronomie ou le droit, même si l’étudiant a de fortes notes?

Les Haïtiens, plus tard les Africains, involontairement ou par revanche, ont tellement facilité le mulâtrisme au Québec que, de nos jours, il faut faire attention aux commentaires racistes vis-à-vis d’eux. Car toute famille québécoise qui se respecte comporte en son sein un petit mulâtre adoré, surtout en province. La musique des clubs, le dandysme de l’homme noir, sa facilité de se faire accepter, ses mensonges quasi-académiques, lui ont permis de rentrer et sortir dans certaines familles québécoises en mal d’exotisme. Louis RIEL était ainsi vengé.

Viré monté