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à Jean-Gilbert et Tristan
«L’âme a deux yeux: l’un regarde le temps,
l’autre se tourne vers l’éternité.»
(Angelus Silesius)
écrire autant que naître dedans et sur la vie à la volée des ortolans qui font les belles à tout chemin qui font les siennes à perdre haleine qui passent et repassent à toute allure dans nos rêves d’enfants dénaturés
les mains debout à l’encre de chine s’habillent comme des sommeils tombés à la jetée des aquarelles d’hiver
ô mon premier hiver bercé à l’hyperbole des saies en rut
j’ai nagé mains nues à toute eau claquant le mât des soleils où chevauchaient mille feuilles et pissenlits comme des ocelles de lune au bégaiement de l’hiver
j’ai tracé mes rêves d’homme mûr ou plutôt ce qui me reste à accomplir au val des trépassés
j’ai noté île errante dans la nuit mon île à l’épi grand de vos yeux libellules de tant d’années de transe
versets des îles que j’affectionne au temps des pluies vagues d’allégresse
rhum d’elle puisqu’elle avait le cœur d’un tyran cette île d’oiseaux de proie et de passage des pluies sauvages au ramassage des morts et des vivants de la dernière révolte
je suis l’aphone (entendons-nous) sinon le grand hâbleur du quartier qui déraisonne dans la lourdeur des crimes jusqu’à l’évanouissement des écailles
je suis le poète meneur des filles et des racines sans pissenlits amant de la fertilité des oiseaux migrateurs qui chassent à l’abri des essarts
murmures soumis de mon dernier voyage à l’automne incompris des pages trempées dans l’encre des naissances de cette naissance posée sur l’enclume des cœurs postés en caravelles du souvenir
il ne m’est d’autre souci que la présence d’un enfant dans les havres car je suis l’extrême le difficile et l’éphémère l’immobilité des foules et des gestes à venir
fuyons le vif et doux sommeil des orchidées
mais partageons le bonheur à pleine poussière dans les ruelles
nous faut-il que la page et les maux pour mieux saisir le harcèlement par les mots des poètes et des geais considérables dans leur tressage heureux et maladroit de nos gestes d’écoliers
l’océan est une femme élégante tissée de l’eau des ardoises et du burin
Sainte-Thérèse (Qc), 27 novembre 2008