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Des horreurs de l’esclavage
La soumission des uns à l’autorité des autres

Jean-Robert Antoine

 

 

 

 

 

 

Couvertures du portfolio "Abolition de l'escalage"
Guion

Il existe dans toute vie, et particulièrement dans celle des gouvernants et des gouvernés, un instant où l’on doit faire un choix. Entre ceci et cela. Entre oui et non. Entre la lumière et l’obscurité. Entre les commandements humainement acceptables et la bêtise humaine. Entre le droit de commander et le refus d’obéir; entre  contempler et agir; et même, entre condamner, pardonner et oublier. Voilà toute la logique  du vivre en société.

Faire un choix, et en assumer les responsabilités! Mais les hommes, comme l’on verra plus tard, par ce texte, assument rarement les responsabilités de leurs actes. Un exemple vivant, sans toutefois entrer dans le détail, est celui de l’esclavage, le crime le plus odieux de la terre, et dont on a célébré l’abolition, le 10 mai écoulé, sous le thème: «1848-2009: 161e anniversaire de l’abolition de l’esclavage des noirs […], crime contre l’humanité».

L’esclavage reste l’une, si ce n’est pas la plus détestable, des grandes insanités que les hommes ont commises. Il y a des moments sombres dans l’histoire de l’humanité où l’on peut repérer les traces de l’animalité des hommes; tels (sans compter les guerres et les bombes atomiques), les génocides: celui des indiens d’Amérique (génocide indien), celui des juifs (l’holocauste) et celui des Sud-Africains (l’apartheid),  etc. Des tableaux sombres, les uns autant monstrueux que les autres, et dont les thèmes attristent, pareils à des coups de cœur, face à l’amère illustration des cruautés humaines.

Aucun d’entre ces tableaux, cependant, classés parmi les plus grands crimes contre l’humanité,  n’équivaut jusqu’ici aux épouvantes de l’esclavage des noirs, la plus abjecte forme d’oppression à laquelle l’homme s’est assujetti.  «Dieu fit la liberté, l'homme a fait l'esclavage, nous dit Marie-Josèphe Chénier» (extrait de Fénelon). L’esclavage serait, en effet, un tour de main né de l’ignorance et des ambitions assassines de l’homme de se servir d’un autre, comme d’un «outil animé»,  pour s’enrichir (Aristote, Ethique à Nicomaque, VI, chap. VIII-XIII).

La résistance (la lutte ou la révolte) des esclaves contre le système esclavagiste aurait conduit à de violentes répressions: allant du fouet, du viol, de la pendaison, du lynchage, de la décapitation, jusqu’au «brûlé vif». L’on raconte même que des esclaves en révolte,  ligotés à des chevaux allant dans des directions opposées, auraient été déchiquetés, comme supplice et divertissement à la fois, sous les yeux amusés des maîtres, femmes et enfants.

Incroyable, mais vrai: certains de ces criminels-maîtres-esclaves auront eu l’audace, plus tard, de plaider non coupables, devant le tribunal de l’histoire, comme s’ils eurent agi en accord avec l’autorité de la loi;  donc, sans contradiction avec la loi morale. D’autres (des colons), qui ont ordonné, ou participé, à l’extermination des indiens, par exemple, ont laissé des testaments pour dire qu’ils n’eurent fait qu’exécuter les ordres d’instances supérieures. L’exemple le plus proche est celui du procès, sous forme de témoignages en guise de condamnations, ordonné, après l’apartheid en Afrique du sud, par la Commission Réconciliation et Vérité (1995-1998) pour «comprendre et non venger»  en vue de favoriser «l'entraide fraternelle et non la victimisation» (Nelson Mandela). Des actes d’attestation, d’accusation  autant que de pardon, ont été ainsi rédigés.

Des aveux, des regrets, des engagements, venus de bourreaux et de racistes notoires, se sont succédé. Étrange: la majorité d’entre eux ont plaidé non coupables!

Des procès de ce genre encombrent les archives des tribunaux internationaux. Un cas extrême est celui du procès d’Adolf Eichmann (Mai 1960) à Jérusalem, l’un des responsables nazis de l’assassinat industriel des juifs (1941-1945). Ce procès a de particulier d’avoir choqué l’opinion internationale et, du coup, porté les intellectuels et chercheurs du monde à réfléchir sur la validité de la question de la soumission des uns à l’autorité des autres… Ces témoignages (ceux de ces criminels pur-sang), sont-ils sincères? Jusqu’où, et dans quelles conditions, des hommes se soumettront, ou se soumettraient, aveuglement à l’autorité des autres?

À  supposer que les uns aient réellement agi sous les ordres des autres, et les autres, comme dans une chaine d’actions et de réactions, sous les ordres des uns ; en quoi cela changerait-il l’implication des uns et des autres dans ces crimes commis contre l’humanité? Une autre question, et peut-être la plus cruciale,  qui a tracassé l’esprit des chercheurs: Des hommes semblables à Adolf  Hitler, à Adolf  Eichmann, ou aux ignobles colons au temps des indiens et de l’esclavage des noirs, existent-ils encore dans nos sociétés?

J’ai honte autant que d’être triste de conclure, au moins en répondant à cette dernière question, qu’il existerait encore, parmi les hommes, soixante pourcent (60%) ou plus d’ Adolf Hitler, d’Adoichmann, et d’ignobles colons, d’après les résultats de l’expérience scientifique (The Perils of Obedience, 1974) conduite par un psychologue américain, Stanley Milgram, de Harvard University, pour essayer d’évaluer  une telle disposition chez l’homme: celle de la soumission des uns à l’autorité des autres, même dans les conditions les plus inhumaines. Et les résultats de cette expérience étaient tellement déplaisants et captivants, à la fois, qu’un savant, comme Claude Lévi-Strauss, eût été capable de préférer l’animalité des animaux à l’apparente humanité des hommes. Ce qui n’était donc pas étonnant, ni aux uns ni aux autres; car les uns, aujourd’hui encore,  refusent de s’humaniser, et les autres de se désanimaliser. L’issue, peut-être la plus viable, ne semble se trouver, néanmoins, que dans le choix étrange de la condamnation, du pardon et de l’oubli.

Jean-Robert Antoine

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The Horrors of Slavery
Submission and Authority

Life is all about the choices we make. Man, by his very nature is forced to choose between light and darkness, submission or disobedience, contemplation or action, condemnation or forgiveness. Ideally making choices and assuming the responsibilities was supposed to be one of our ideals. Ironically as proven by history, we rarely assume responsibility for our actions.

A vivid example is slavery, the most odious crime against humanity. There are many other examples such as the Indian genocide, the atomic bomb, the Jewish holocaust, and South-African Apartheid which display our animalistic penchant. However, none of them can be compared to slavery. It was the most abject form of oppression in world history.  As stated by Marie-Josèphe Chénier:   “God created  Man to be free, but man  in return created slavery and enchain his fellows”.  “Slavery is simply a human invention, derived from sheer ignorance and a bestial tendency to oppress one’s fellow man in order to acquire more wealth”. (Aristotle, Ethics Nicomaque, VI, chap. VIII-XIII).

To squash slave rebellion, repressive measures such as whips, hanging, lynching, decapitation, and burning alive were some of the horrible tactics used. Overwhelming stories of rebellious slaves, being tied to two different horses moving in opposite directions splitting Black bodies in two, while  slave owners and other bystanders looked on in amusement. No one can really compute the damage produced in the psych and spirit of the Black race as a result of slavery.
 
Still today very few Whites would ever admit their wrongdoings in the tribunal of history. The notion that the actions of Colonists were legal and did not violate any moral code is an absolute desecration to the lives lost during this period of darkness.  Slavery is the only act of massive genocide that is not fully acknowledged. The  integral players in the Indian genocide left many testimonies to show that they were simply executing orders from their superiors. More recent examples are those post-Apartheid trials by the Reconciliation and Truth committee whose intent was to promote healing instead of revenge. Many confessions, regrets, and testimonies were given by torturers and notorious racists, strangely enough, the vast majority of those criminals pleaded not guilty!

The most intriguing case is the Nazi Adolph Eichmann’s trial in Jerusalem i for his involvement in the industrial massacre of the Jews (1941-1945).  He shocked the world by pleading innocent on the grounds that he was simply executing orders. Adolf Eichmann's trial precipitated many intellectuals and researchers into reflecting on the question of submission and authority.  Were those criminals ‘testimonies genuine? How far and under what conditions man would blindly follow orders?
 
Suppose that  the people from the bottom were simply following orders from their superiors; would that change their implication in those sordid acts called "crimes against humanity”?  The other question that seems to puzzle the researchers is: are there other Adolph Hitler’s, Adolf Eichman’s and ignoble colonists in today’s society?

It is sad and shameful  to conclude  that  more than 60 %  of  us are like Adolph  Hitler, or  Adolph Eichmann  or the Ignoble colonists  according to a study done by a renown American psychologist Stanley Milgram, of Harvard University. This experiment has even forced the famous scientist, Claude Levi-Strauss, to favor the "animals‘s animality" over the so-called “human humanity".

Since most men refuse to humanize themselves ,all we can do is to  make every effort to heal ourselves from the scares of the past  that still remain from the whip and gas chambers while remaining ever vigilant  for the folk that seek to organize and promote these “crimes against humanity”.  Individually, yes,   many of us may have a dislike or a disdain for one group or the other. However, we silently deal with these issues. It is when these feelings are organized and became part of a group philosophy, then, it becomes imperative that we start to draw from history to counter the next slavery or holocaust.

Man will always be true to his nature and the rules of human society will always be the same. Most of us are simply worse than untamed animals.

Written by Jean- Robert Antoine
Traanslated in English by Paul Sanon

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Lesklavaj se krèvkè
lè nou mete n anba pouvwa lòt moun

Gen yon lè nan lavi yon moun  ou sipoze fè yon chwa.  e sitou si ou fè pati de govènman  ak moun yap gouvène. Ou dwe chwazi ant  sa ak sila , wi non, limyè fènwa.  Pami lòd  kretyen vivan bay  ki akseptab avèk lè lèzòm ap voye tenten monte. Dwa pou kòmande m e dwa pou m pa obeyi w; founi je gade e aji,  e menm lechwa ant  kondane, padone e bliye.  Men tout lojik semp lè ou ap viv nanlemond.

Fè yon chwa  e pran responsablite chwa w!  Moun, tankou nou pral swiv nan lapawoli sa yo  pa janm pran responsablite zak yo komèt. San nou pa antre nan tròp detay, an nou pran lesklavaj, krim pi lèd  sou latè.  10 me ki sot pase la, yo fete 161e lane depi  labolisyon leskalavaj moun nwa … krim kon limanite

Leskavaj rete kòm youn ou byen pigwo krim the lezòm komèt. Gen  demoman nwa nan listwa lèzòm kote ou ka jwen tras bèt sovaj lakay nou.  (san nou pa menm konte lagè avèk bonb atomik) nou ka pran jenosid: pa indyen yo, tout kòd ras moun sa yo detwi, pa jwif yo (lolokos, kote 6,000,000.00 jwif peri) ak Sud-Afriken (laparted, million moun nwa mouri) etc.  Youn sovaj menjan ak lòt, yon tablo tou nwa, movezak limanite pentire ak san.

Tout vye bagay sa yo menm lè nou klase yo  nan pami pigwo krim ki fèt, yo paka parèt nan pwentpye moun nwa nan lesklavaj.  Lesklavaj se pi move fòm dopresyon ke moun janm sibi. Manzè Marie-Josèphe Chenier di nou konsa nan «Fenelon» « Bondye kreye nou lib, lèzòm fè lesklavaj»  lesklavaj si nou komprann byen seyon manèv , lambisyon ak ignorans lèzom kreye pou yo ka fè lòt moun tounen restavèk, sèvi avèk yo kom si se yon zouti  pou yo ka anrichi tèt yo. (Aristot, ethique à Nicomaque, VI, chap.VIII-XIII)
 
Lè esklav yo eseye reziste, se ratibwazaj, kout baton, kadejak  yo pann yo, koupetèt yo, lage yo touvivan nan fouyedife.  Bagay sa ale lwen,  pou paseparad, devanje  mèt, timoun kou granmoun,  yo mare yon esklav nan kat cheval, yo fe cheval yo kouri nan katpwenkadino pou yo demanbre l.

Nou patavle kwè sa,  kalite moun agimal sanmanman  krinminel rouj sa yo, odasye, figi yo di anpil, yo pa santi yo koupab, devan tribinal listwa yo deklare  avek lalwa yap mache, yo pa janm panse ak lamoral. Gen lòt seri kolonblan menm, yo bay lòd, yo patisipe nan  fèfen indyen, malgre sa yo kite papye ekri kote yo di ke se lòd lòt moun yo tap swiv.

Komisyon rekonsilyasyon ak verite (1995-1998) te fè  yon kalite  pwosè  yo rele «an nou eseye konprann, pou nou pa vanje» apre apated nan Afrikdisid.  Pwosè sa bouro tankou viktim te vin temoye. verite te soutambou,  regrè tankou remò te fè kenken, gwo rasis ak gwo bouro devanletènèl  te kwaze.  Pifò ladan yo te di yo pat koupab, konsyans yo te anpè.

Kalite pwosè sa pil sou pil nan tribinal internasyonal yo. Ka ki pi grav la se  prosè nonm yo rele Adolf Eichmann (Me 1960) nan Jerizalèm. Misye se yon nazi ki responsab asasina maspèp jwif  (1941-1945). Prosè sa choke anpil moun toupatou, moun kap fouye moun ki li nan gwo liv al reflechi sou kesyon youn soumèt a lotorite lezòt….  Temoyay sa yo, sitou gwo kriminèl, eske yo sinsè, jiskibò nan ki kondisyon ke yo moun ka asepte fè nenpot bagay de pi li resevwa lòd la.

Kòman nou pral jije e kondane yon moun ki komèt yon krim ki resewa lòd  poul komèt zak sa de siperyè l, siperyè a li menm  se yon lot moun ki komande l, eksetera, ekseteraera.  Dekimanyè pou jije moun ki komet krim kont limanite si se lòd yo te pase l. Mèt kesyon an, sila  ki boulvèse anpil moun nan,   eske genyen kalite moun sayo ki ekziste toujou,  jounen jodi a  nan lasosyete,  moun tankou Adolph Hitler anpasan pa Adolf Eichmann pase pran kolonblan soutan indyen ak tan lesklavaj moun nwa.

Tristès envayi m e mwen wont anpil pou mwen konkli, e reponn a dènye kesyon ki te poze. Baze sou yon rechèch syantifik, Stanley Milgram,  yon sikològ ameriken fè  (The Peril of Obedyans) genyen plis pase 60% moun tankou Adolf Hitler, Adolf Eichmann e move kolonblan ki ekziste jounen jodia soulatè.  Daprè  sa ekperians sa te bay toujou, moun sa yo kapap swiv e ekzekite kelkelonswa lòd yo pase yo je fèmen, menm si se bagay krèvkè. Rezilta eksperyans sa telman degoutan e kaptivan alafwa  ke Claude Levi-Strauss, nonm save, deklare li prefere kote sovaj ki kay zannimo ke swadizan imanite lèzòm.  Gwo pawòl sa pa etone pèsonn, menm jounen jodi a gen moun ki refize imanize yo tankou gent lòt ki pa vle retire bètsovaj ki andedan yo. Sèl sovè nou se yon chwa etranj :  kondane, padone,  bliye.

Ekri pa  Jean-Robert Antoine
Tradwi an Kreyol pa Evelyne Monteau

 Viré monté