Taino-Arawak des Grandes Antilles ou Kalinago des Petites-Antilles utilisaient pour fabriquer leurs grandes embarcations dites kanawa ou kanaoa :

1. Cedrela Odorata, acajou pays, acajou rouge, cédre acajou, red cedar, pour les grandes pirogues de guerre.
2. Dacryodes excelsa, gommier blanc, ils pouvaient également en faire de grandes pirogues quoique la taille du tronc est généralement moins importante que celle de l'acajou rouge. sa résine ou gomme servait également à calfater ou colmater les fentes.
3. Bursera simaruba dit gommier rouge, cousin ou femelle; Labat affirme (vers fin années 1690) que contrairement à ce que dit Du Tertre il n'est pas "inutile à tout. On ne laisse pas d'en faire des canots" t. 4. S'agit-il de petites embarcations de pêche côtière, utilisées (innovées) par les premiers colons? Cette assertion repose t-elle sur une tradition indigène?
4. Aux Grandes Antilles, le fromager, Ceiba pentandra, pouvait servir à la fabrication de pirogues pouvant contenir jusqu'à 150 pagayeurs; idem sur continent, il est possible que les Caraïbes pouvaient faire de même. On sait qu'ils en faisaient de petites pirogues de pêche côtière ainsi que des "canots à manioc", récipients destinés à recevoir, le mainoc gragé ou râpé. Ces pirogues devaient être mises à sec pour éviter la pourriture de ce bois dit "flo" (léger)
5. Aux Grandes Antilles on sait que le Figuier maudit, autre "bwa flo" (Ficus indica ou citrifolia) était également utilisé; de même que l'Ochroma pyramidale dit fwomajé, pripri, mapou, bwa flo, balsa.
6. Les Taino pouvaient également utiliser le Mahogany (Swietenia mahogani) ou le galba (Calophyllum calaba) pour la fabrication d'embarcations.
7. Guillaume Coppier est un des rares auteurs à mentionner le courbaril (Hymenea courbaril) pour la fabrication des pirogues aux petites Antilles.
8. Les fargues volantes ou grandes planches amovibles exhaussant les bords de la pirogue caraïbe dites chimalouba (dont hérite le gommier sauf qu'elles y sont désormais fixées avec des clous) étaient taillées dans de l'acajou blanc (Simarouba amara) et "cousues" aux bords avec de l'arouman (Ischnosiphon arouma).

Thierry LETANG
(Anthropologue)

«Je visitai nos bois, et j’eus bientôt trouvé un arbre suffisant pour faire un Canot de trente-huit pieds de long, sur cinq pieds de large dans son milieu: c’étoit un Gommier.

On appelle ainsi cet arbre, à cause qu’il jette de lui-même ou quand on lui fait une incision, une quantité considérable de gomme blanche, friable quand elle est bien seche, ordinairement de la consistance de la cire, d’une odeur aromatique, qui brûle parfaitement bien, soit qu’on l’allume seule dans une terrine, soit qu’on la mette en flambeaux avec une meche dedans. L’odeur qu’elle rend est agréable, rien ne purifie mieux l’air ou un lieu qui a été long-tems fermé, que d’y brûler de cette gomme; ce qu’elle a d’incommode, est que sa fumée est épaisse, et noircit beaucoup. Il y a de petits Habitans qui en font des chandelles…

On voit par la grandeur de ce Canot, combien grands et gros, sont ces sortes d’arbres. On en trouve encore de plus gros que celui dont je me servis. J’en trouvai un quelque tems après, qui avoit vingt-cinq pieds de tout, et près de quatre-vingt pieds de tige, rond comme s’il avoit été fait au tour, et droit comme une fleche…

Pour en revenir aux Gommiers, je dirai que jusqu’au tems que j’ai été aux Isles, on ne les employoit qu’à faire des Canots; on ne s’en servoit pas même pour brûler, sous prétexte qu’ils étoient difficiles à couper en billes, et encore plus à fendre, et qu’ils faisoient une flamme sombre et noirâtre. J’ai été le premier qui les ai mis en réputation, et qui ai trouvé le moyen de les débiter, et de s’en servir à toutes sortes d’usages.» - Jean-Baptiste Labat, 1742. Nouveau Voyage aux Isles Françoises d'Amérique, Paris. (rééd. 1972, Fort-de-France, éd. des Horizons caraïbes).