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Nuit de veille à Raphaël Confiant |
Nuit de plaies ouvertes, de mains lasses, ridées,
mes mots, bleus destriers, houle de chevaux fous,
roulent ivres, rageurs, sur l'émail de la page.
Et le sens qui s'épuise à suivre leur galop
dans les gerbes jetées au vent de la mémoire.
L'étreinte des jours morts et ce brûlant baiser,
à l'heure que défend la pénombre incertaine,
par des yeux, feux éteints aux grèves de l'oubli
d'un souvenir tremblant de sa propre morsure,
d'une aube fugitive et sa verte blancheur,
ressuscite un parfum, quand de frêles ivresses,
un bonheur de l'enfance où de pâles colchiques
murmurent leurs regrets à des songes de fées,
arpègent le temps lourd d'un troublant requiem.
C'est la mélancolie, pluie fine, lancinante,
la vague d'eau sale dont le roulis écœure,
qui mord la falaise, sape, érode puis broie
cette âme crayeuse quand le temps noir se fige.
De vieil or j'ai cerclé le front bas des remords,
par cette froide nuit, éclose d'amertumes,
ces passereaux piquant le métal du ciel mauve
d'une ferveur défunte où ses noirs oripeaux
jettent le pâle espoir vers plus d'obscurité.
Des étoiles secrètes aux lueurs de cinabre
sous de verts ossements, arabesques au vent,
damasquinent le ciel de l'oubli sans détour
qui glisse vers l'à-pic d'un gouffre amer et fade.
Nuit de pleurs étouffés, de murmures plaintifs,
mes mots, pensifs noyés, ont sombré sous la houle,
dans l'abysse bleuté, jonché de coques grises
et de rêves nacrés par le temps insoluble,
d'arômes oubliés et le rire argentin
d'un enfant seul, blessé, sur le sillon du jour.
Corps à corps sur la page où la blancheur s'étend
qui dira la mémoire et les chevaux du temps ?