Potomitan

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Annou voyé kreyòl douvan douvan

Alfred Largange
8.12.1971 - 18.9.2007

Lauréat du concours général des lycées, Diplômé de science politique de Paris et de l'université de Singapour, Officier de réserve décoré de la médaille de la défense nationale, Ancien chargé de mission au ministère des DOM TOM.

Alfred, un homme engagé et honnête. Homme d'action, intransigeant sur les résultats. Aventurier d'esprit, sensible aux dimensions culturelles et stratégiques des enjeux du monde global. Plus séduit par la Mondialisation (rencontre des diversités) que convaincu par la Globalisation (uniformisation).

Articles, sites web,...

Alfred

Au revoir - Biographie d'Alfred

Je souviens d'Alfred à 4 ans. Il suçait les deux doigts de sa main droite sans s'inquiéter des histoires terrifiantes que Maman inventait pour essayer de l'en dissuader. Il n'y avait finalement que son frère et moi pour y croire. Mais lui a toujours possédé ce mélange de perspicacité et d'entêtement qui font capoter toutes les stratégies parentales. Alfred fut un enfant précoce à parler, à défaut de marcher. Précoce à inventer et raconter des histoires, et à assimiler le créole, comme de nombreuses autres langues par la suite.

Partout où il est passé, il a suscité l'admiration ou l'exaspération. Jamais l'indifférence. Un esprit brillant, exigeant et cultivé. A cela s'ajoutaient des talents de dessinateur, mais aussi de comédien d'autant qu'il était doté d'une mémoire étonnante.

Le statut de petit dernier ne lui a jamais convenu, persuadé qu'il était que toute autorité devait être justifiée... et contestée. Il avait le don d'exaspérer Jean-Christophe par ces critiques acerbes. Il n'empêche que la passion de son aîné pour les livres fut pour lui un aiguillon pour le pousser à le dépasser. Quant à moi, j'étais son camarade de jeu, voire de bagarre. Nous sommes maintes fois disputés, jusque dans la cour de l'école et cette fessée mémorable devant nos petits camarades.

En réussissant au concours de lecture du Collège de Godissard, il ramène à la maison notre premier ordinateur. Il récidive au lycée de Bellevue en obtenant la 3ème place au Concours Général des Lycées en Histoire. Les livres et le prestige de ce concours jusque là si fermé aux originaires d'Outremer seront probablement le déclic de sa quête d'identité au travers les écrits de Joseph Zobel, et plus tard d'Aimé Césaire et Tony Morrisson entre autres.

Sa carrière semble toute tracée quand il intègre l'Institut d'Etudes Politiques (Sciences Po Paris) directement après son bac. Mais anticonformiste, il s'oriente vers le secteur privé où il travaillera, avant de suivre les traces de son frère en devenant officier dans le cadre de son service militaire. Il poursuivra ensuite sa formation par un DESS en Marketing et Stratégie. Mais sa soif identitaire restant à assouvir, il effectuera son stage de fin d'études en Côte d'Ivoire, qui pour incongru qu'il nous parût, avait pourtant tout son sens. Ce sera l'occasion pour lui d'entreprendre son pèlerinage à Gorée au Sénégal, sur les traces de ses ancêtres.

Et quelques années plus tard, c'est à Port au Prince qu'il retrouvera une autre partie de ses racines, plus proche de ce qu'il se sait être au fond: un afro caribéen, résolument citoyen du monde, et affranchi de toute inhibition. Au cours de cette mission dans une organisation non gouvernementale, il enseignera dans les campagnes les moyens de s'organiser et de résoudre pacifiquement les conflits par la discussion et la réflexion collective. Au sortir de cette expérience il dira à sa mère: "C'était dur, mais je ne me suis jamais senti aussi utile".

Il publiera par la suite le premier ouvrage de référence sur la coopération caribéenne: "La Martinique en interface". Son séjour d'un an en Martinique passé à écrire sur la Caraïbe dans différents journaux, et à tenter de monter une agence de coopération restera l'une de ses plus grandes désillusions.

L'année suivante il intègre pour trois ans le ministère de l'Outremer, en charge des projets internet, technologiques et multimédia. Mais il est bien connu que le travail et la compétence ne sont pas les meilleurs atouts pour s'assurer une carrière. Alfred décide alors d'entamer une nouvelle aventure à l'international. En 2004 il entre à l'Université de Singapour, où il décroche un MBA en marketing et finance internationale, avant d'intégrer une entreprise locale en tant que responsable de la stratégie et de la planification des projets publicitaires. Ce fut l'occasion pour lui de voyager dans la région asiatique, de découvrir cette culture dont il se sentait proche par certains aspects, et de se faire de nombreux amis.

De ses voyages et nombreuses contributions et publications sur internet naîtra le désir de rédiger son premier roman, encore à paraître: "Voyage à Gorée". Il y raconte la quête identitaire d'un jeune antillais au travers de ses amitiés et de ses amours, entre Paris et Gorée.

Lors de notre dernière discussion, il me disait qu'il avait finalement fait le bon choix de partir vers des horizons plus propices, sachant que contrairement à d'autres, il aurait des souvenirs à revisiter quand l'heure serait venue de se poser et de regarder derrière lui.

Ce regard, c'est nous qui le portons aujourd'hui, avec fierté et tendresse. Je pleure, mais me réjouis de ce que Dieu nous réunira à nouveau quand il jugera que nous aussi avons rempli notre tâche ici bas.

Au revoir Alfred.

Didier LARGANGE
son frère

anis

Prière amérindienne

À ceux que j'aime et qui m'aiment.
Laissez-moi. J'ai tellement de choses à faire
et à voir, ne pleurez pas en pensant à moi.

Soyez reconnaissants pour les belles années où
je vous ai donné mon amitié et mon amour.
Vous devinerez à peine le bonheur
que vous m'avez apporté.

Je vous remercie de l'amour que chacun m'avez démontré,
maintenant il est temps pour moi de voyager seul.
Pour un court moment vous pouvez avoir de la peine.
La confiance vous apportera, réconfort et consolation.

Nous serons séparés pour quelques temps.
Laissez les souvenirs apaiser votre douleur,
Je ne suis pas loin . . . Si vous en avez besoin,
appellez-moi et je viendrai, même si vous
ne pouvez me voir ou me toucher, je serais là...
Et si vous écoutez votre coeur, vous éprouverez
clairement la douceur de l'amour que j'apporterai.

Et quand il sera temps pour vous de partir,
je serai là pour vous accueillir.
Absent de mon corps, uni à l'univers...

N'allez pas sur mes cendres pour pleurer,
je ne suis pas là, je ne dors pas,
je suis les milles vents qui soufflent,
je suis le clapotis des flots sous les caresses chaudes du soleil couchant,
je suis le scintillement des gouttes de rosée,
je suis la lumière qui traverse les champs de cannes,

Je suis le papillon déployant ses ailes chatoyantes,
je suis la pluie chaude qui caresse votre visage,
je suis l'éveil des oiseaux dans le calme du matin,
je suis l'étoile qui brille la nuit aux abords de la lune.

N'allez pas sur mes cendres pour pleurer,
je ne suis pas là, je ne suis pas mort...
JE SUIS....enfin...

Adapté par Eric CABERIA
un ami

anis

Amerindian prayer

To those I love and those who love me.
Leave me. I have a gang of things to do
and to see, don’t cry while thinking of me.

Be grateful for the great years where
I have given you my friendship and my heart.
You will just guess the happiness
that you have brought me.

I thank you for the love each of us has shown me,
now it’s time for me to travel alone.
For a short period of time you may be in pain.
Confidence will bring you comfort and consolation.

We will be separated for some time.
Let the souvenirs calm down your pain,
I am not far away. . . If you need some,
call me and I will come, even if you
can’t see or touch me, I would be there...
And if you listen to your heart, you will feel
clearly the sweetness of love I will bring.

And when it will be time for you to depart,
I will be there to welcome you.
Absent of body, united to the universe...

Don’t go over my ashes to weep,
I am not there, I am not sleeping,
I am the thousand winds that blow,
I am the lap of waves under the caress of the hot sunset,
I am the sparkling of the dew’s drops,
I am the light that goes through the sugarcane fields,

I am the butterfly that spreads its sparkling wings,
I am the hot rain that caresses your face,
I am the awakening of birds in the peaceful dawn,
I am the star that shines in the area surrounding the moon.

Don’t go over my ashes to weep,
I am not there, I am not dead...
I AM....after all...


Adapted by Eric CABERIA
a friend
(English translation by Emmanuel W. Vedrine)

anis

An Zanmi ki mò
(audio, 2,86 MB) par Kounta.

                           

anis

An finèt ki fèmen

Alfrèd,
Ou sé bwabrilé,
Ou sé an Kréyolis Mawon kon ou té renmen di.
Ou pati miklon nan gran péyi zansèt nou.
Ou lésé an giyon nan tèt mwen davwa jòdijou mwen kon vonvon ki pèd
tou'y.
Mwen tirbilé, tjè mwen tjèbolizé padavwa mwen ka santi mwen sèl san
baton, mwen sèl pou goumen kont lé Mapipi ki lé rapé lang kréyòl nou
pou lapéti kò yo.
Ou lésé nou sèl kon malpapay, poutji ou fè nou sa?
Konba-la ké fèt san nonm djòk-la, san nonm mapipi-la ki té la pou ban
nou fòs épi kouraj, pou nou pa tranblé, pou nou kanpé dwèt douvan
moun ki lé tjwé kilti nou ou vann li bon maché pou kolonizatè-a.
Ki moun ki ké viré pran chaltounen-an?
ki moun ki ké ripran sèbi-a?
ki moun?
Tonnandisò, poutji ou pati siprésé ki sa?
Poutji ou lésé lavi-a fè'w pran lanmè sèvi savann?
Poutji ou chapé san fini travay-la?
Poutji ou fè nou sa Alfrèd?
Poutji?
Pa ni ou asou entènèt-la ankò,
ou lésé an silans ka fè mwen trésayi.
Zyé nou kay chaché an ti mésaj di'w, an ti jédèmo ou té enmen fè.
An djèt sa!
Nou pé ké wè'w ankò, estébékwé,
zyé nou ké kon an finèt fèmen nan kaz san limyè......


Kounta 25/09/2007

anis

Oktosilab pou Alfred Largange

Chak kou yon gwo mapou tonbe
Yon dal ti piti va pouse
Siman w al ak regrè Fredo
Ou pa t gen tan di n yon ti mo

Nou dèyè ap pase mizè,
Toujou ap bat dlo pou fè bè
Tandike w ap repoze ou
Pandan n ap gade travay ou

(E. W. Vedrine, nèg Ayiti)

anis

Pour Alfred Largange

Fuir
Avant que le soleil
ne mène les étoiles
jusqu'à l'autodafé

José Le Moigne
17 septembre 2007

anis

En souvenir de
Alfred Largange, le caribéen

Antilla, 4 octobre 2007

De cette nouvelle généra­tion, ardente, érudite, Alfred Largange qui vient de nous quitter (8.12.71-18.09.2007) a été l'un des potomitan les plus représentatifs. Officier de Saint-Cyr, et diplômé de l'Institut d'Études Politiques de Paris, Alfred Largange s'était intéressé à tout ce qui touche de près ou de loin la Martinique et notre Caraïbe.

Passionné de la Caraïbe (il connaissait bien Haïti), Alfred Largange avait écrit un mémoire «Interface»où il donnait quelques clés de notre Archipel et des possibles coopérations entre les pays antillais. Il avait cru pouvoir proposer ses services aux autorités locales en espérant que sa parfaite connaissance de nos environnements aurait utilement permis de desserrer l'étreinte ou le nœud coulant qui relie la Martinique à Paris. Déçu, if était alors retourné en France, puis à Singapour... Il avait eu l'occasion de collaborer, à plusieurs reprises, avec notre journal et en guise d'hommage, nous publions la conclusion de son premier article (ANTILLA 865 du 3l décembre 1999) intitulé: «Politique: Avatars et perspectives du débat martiniquais».
 
Son dernier acte, génial, de collaboration avec ANTILLA fut l'important Dossier Spécial qu'il nous avait envoyé depuis Singapour pour marquer de façon solennelle le décès de son ami (17.06.2006), celui qu'il appelait: Monsieur ZOBEL. Il va sans dire que nous sommes très émus de cette disparition tout à fait prématurée et qui nous touche au plus profond: Alfred Largange était comme les purs: il croyait profondément à ce qu'il faisait, il adorait son pays. Il adorait notre Caraïbe...

h.p.

anis

Largange dans Antilla n° 865

L'émergence d'une volonté, préalable à toute évolution n'est possible qu'à travers la société civile et la démocratie participative.

Le véritable défi auquel est confrontée la Martinique, qu'il s'agisse de faire évoluer ses institutions politiques ou plus largement d'envisager son épanouissement économique, social et culturel consistera, dans les années à venir, à mettre en place les pratiques et les structures d'un dialogue dépassant nécessairement la sphère de la représentation politique. C'est aux forces vives du pays qu'il faudra faire confiance pour formuler des solutions crédibles et ancrées dans notre réalité. Aux associations, aux professionnels, aux chercheurs, aux artistes, aux animateurs sociaux..., en bref à tous les acteurs de la société civile qui de plus en plus, par des actes citoyens adressent aux responsables des analyses, des propositions et des projets élaborés à même de répondre aux problématiques du pays. Que ce soit sous nos latitudes, dans l'Hexagone ou ailleurs, des femmes et des hommes s'affirment comme Martiniquais et entendent contribuer à l'évolution de leur pays. Il est plus que temps de leur faire une place à la table de discussion, dans le cadre d'une démocratie véritablement participative.

Aux jeunes Martiniquaises et Martiniquais surtout, qui butent trop souvent et depuis trop longtemps sur l'indifférence à peine polie d'une administration et d'une classe politique qui estiment avoir reçu pleine et entière délé­gation. Aux jeunes parce que, quelque puisse être la légitimité et la compétence des élites actuelles, c'est à eux que reviendra en fin de compte un pays qui doit aujourd'hui faire des choix déterminants pour son avenir. Les choix d'une Martinique et d'une Démocratie qui restent encore à inventer.

Alfred LARGANGE
in Antilla n° 865 du 3l décembre 1999

anis

Joseph ZOBEL
(26 Avril 1915 - 17 Juin 2006)
Monsieur ZOBEL, une vie en quête de Beauté

Je me demande ce qu'il aurait pensé de cette phrase pour commencer cette histoire. La nouvelle du décès de celui que j'ai toujours appelé Monsieur ZOBEL interrompt une conversation qui a duré dix ans.

«Les silhouettes de la raffinerie de Jurong étaient presque masquées par la pluie battante. Au beau milieu de la rumeur de l'eau montait le sentiment irrémédiable de son absence.»

Les trois vies de Joseph ZOBEL Chaque homme est un mystère...

La quête de la Beauté C'était pendant la bataille des Dardanelles, dont les échos étouffés arrivaient, encore empreint de terreur, sur les rivages de la colonie...

Le romancier martiniquais En s'affranchissant du regard extérieur et de ce que l'on appellera plus tard doudouïsme, Joseph ZOBEL fera l'effort sublime de révéler la beauté de l'homme et de la femme martiniquais...

Lire et relire «Diab'-la» La genèse de Diab'-la a été révélée au public lors du Salon du Livre de Paris, en Mars 2002, lors d'une visioconférence faisant dialoguer Aimé CESAIRE et Joseph ZOBEL.

La Négritude Dans tout roman créole, il y a un érudit Comme un prétexte pour relever le niveau du débat...

Le romancier martiniquais «Joseph ZOBEL, c'est le romancier martiniquais» disait Aimé CESAIRE en mars 2002. Au-delà de l'hommage à un ami de longue date, l'avis du Nègre fondamental embrasse le premier roman qui est né de leur amitié...

Alfred LARGANGE
in Antilla n° 1201 du 28 juin 2006

anis

BIYE LANTÈMAN

Très touchés par les nombreuses marques de sympathie et de réconfort qui leur ont été témoignées lors du décès de leur regretté fils et frère:

Alfred largange

Alfred LARGANGE
survenu le 18 septembre 2007
à Singapour
dans sa 36e année

Ses parents: Mr Léon LARGAN­GE et Mme Claire LARGANGE née TOREST, ses frères: Jean Christophe et Didier LARGANGE et leurs conjointes, son grand-père Monsieur Emmanuel LARGANGE, ses oncles et tantes, cousins et cousines, neveux, des familles: LARGANGE, TOREST, ARNETON, CUPIT, CESAIRE, ses frères et soeurs évangéliques de la Martinique vous prient de trouver ici l'expression de leurs sincères remerciements et de leur profonde gratitude.

L'Éternel a donné, l'Éternel a repris. Que le nom de l'Éternel soit béni.

anis

Message adressé à Potomitan par le frère d'Alfred

Bonjour,

Je voudrais simplement vous remercier, ainsi que les auteurs de ces hommages poétiques à la mémoire d'Alfred Largange.
Soyez assurés que ses parents et moi même sommes très touchés par ce geste de sympathie.

Sincèrement,
Didier Largange
8 octobre 2007

anis

Hommage à Alfred Largange

par Thomas Spear

New York, 13 octobre 2007

Hier, avec cet anniversaire curieux qui marque aux États-Unis (et ailleurs) l'arrivée, le 12 octobre 1492, de Christophe Colomb... aux Indes, n'est-ce pas... et, ayant moi-même terminé deux gros projets, la journée de Colomb était trop marquée (étant également la date choisie pour débuter le site Île en île il y a 9 ans), et j'ai pensé à Alfred Largange. Pourquoi Alfred? parce que la voix de Joseph Zobel m'est venu à l'esprit, quand Zobel parle de Colomb. Yane Mareine a fait enregistrer Joseph Zobel qui lit un beau texte drôle de Yane. Je crois avoir déjà partagé cet enregistrement avec Alfred...

Lire la continuation ici.

anis

Hommage de la liste de diffusion
Potomitan-info

Woulo ba Alfred Largange, frè mwen. Alfred est mort.

Un important maillon de la pensée créole a disparu. Il faut savoir que nous apportons chacun de nous notre modeste contribution au rehaussement de notre identité, à l'élévation de notre culture créole...

Lire la continuation ici.

Viré monté