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Pour Haïti

Ernest Pépin

 

 

 

 

 

 

 

Lazard Luckner. Source Galerie Nader.

Les voiles de la mort sont apparues. Pays brisé, enseveli sous les décombres d’un cauchemar. Et les rues que l’on voit comme des fantômes hurlent sous le masque des jours.

Haïti ! Haïti ! Au visage de cendre, au ciel couvert de sang, prie d’une voix somnambule.

Il y a une nièce, une sœur, un père dont l’absence nous hèle. Ils habitent l’invisible dans un décor de mouches.

Il y a ceux qui dorment debout ou à même les trottoirs. Leurs yeux calcinés refusent de se fermer.

Il y a ceux qui portent sur leur tête le désespoir dans une valise.

Haïti s’agenouille auprès des immeubles décomposés, des corps tuméfiés, et toute la ville marche d’un pas de fossoyeurs.

Désastre qu’on emporte dans des draps de fortune. Désastre d’entrailles quand la vie s’évapore dans un regard d’eau morte. La mule du malheur court toujours comme une femme folle.

Nous sommes, avec vous, hommes de boues sèches et femmes que le silence déchire.

Nous sommes, avec vous, enfants de malemort quand le pays s’en va, de secousses en secousses, dévorer les enfances.

Nous sommes avec vous et nous disons pour vous une parole bienveillante.

Parole déshabillée où seule règne une larme.

Vous êtes toutes nos guerres et c’est notre sang qu’un cimetière allume comme un cierge.

Vous êtes l’ombre couchée de nos oublis d’antan. Les éclats de nos silences d’antan.

Des siècles ont crié meurtris de tant de cris et l’arbre s’est nourri du silence des oiseaux.

Mais la terre demeure

Haïti n’est pas mort sous ses paupières de nuit

Haïti ne mourra pas trop de poètes l’ont créé

Nous donnons leur nom à demain, au petit jour des mots, à la griffe de l’espoir, au petit peuple  faiseur de miracles

Haïti soleil des carrefours et qui va son chemin de lumière convulsée, d’imprévisible survie  parmi les cimetières et la graphie des vents

Haïti ne mourra pas

Nous lui tendons les mains pleines d’ancêtres-frères  et nous pleurons parce qu’il faut pleurer mais nous écrivons sur tous les murs tombés pour que renaisse l’enfant vieille de trois jours sans nom:

HAÏTI NE MOURRA PAS !

 

Ernest Pépin
Faugas
Le 16 janvier 2010

 Viré monté