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Entretien avec Zéphirin, peintre et animal marin
Propos recueillis par |
L'artiste haïtien Frantz Zéphirin a déjà peint plus de 10.000 toiles associées de près ou de loin au monde marin. Dominique Batraville s’entretient ici avec lui sur la place qu’occupent les mythes marins dans sa peinture.
Dominique Batraville: Quelles sont vos relations réelles avec les animaux considérés comme mystères de la mer, autrement dit, les sirènes, les baleines, les requins, les marsouins et surtout, les espèces fantomatiques de la mer?
Frantz Zéphirin: J'ai une relation permanente avec tous les animaux de la mer, des rivières, des sources, des puits, des lacs. À mon sens, l’eau, c’est la vie, et la vie vient de l’Esprit qui insuffla dans l’eau, dans nos marines, la vie. Et par cette vie, nous naviguons avec les esprits, les forces suprêmes qui nous permettent de voir la lumière. Les fonds marins ou les mondes marins sont assez complexes. Certaines réalités océaniques nous apparaissent au cours de nos visions et lors de nos songes. Rien n’est encore clairement dit sur les secrets atlantes, sur les vérités restées insondables du Triangle des Bermudes. Les monstres marins alimentent des films fantastiques. Mais cela ne suffit pas, il faudrait aborder autrement les déités de la mer des Caraïbes, mystères presque en exil: Agwetarayo, Immamou, les insurmontables baleines et sirènes.
Il m’est arrivé de faire des voyages initiatiques avec les Dieux et les Déesses du vodou. Ces choses initiatiques ont fait de moi ce que je suis devenu: prêtre-vodou et artiste peintre. J’ai toujours rêvé vivre près de la mer, c’est pourquoi j ai fondé le «Z-CLUB BEACH», ma plage privée qui m’a permis depuis de vivre cette relation intime avec les mystères de la mer.
Maîtresse Simbi et les poissons.
Pourquoi au sein de vos œuvres les Dieux et Déesses apparaissent-ils dans des métamorphoses?
Ce n'est pas seulement par amour de les peindre, mais par devoir mystique et spirituel, puisque je veux garder ma foi catholique et vodouisante. Je voudrais dire par là que j’assiste dans mes visions au fusionnement des saints de la religion catholique et des Dieux indiens et africains. Je dois les métamorphoser sur la toile pour garder rituellement l’essence de l’esprit qui vit son expérience avec moi sur la toile, car ma peinture n’est pas du tout profane, et c’est un sacrilège de penser que le peintre ne sait pas ce qu’il vous donne comme sujet ou motif.
Est-ce pour mieux cacher la représentation des Dieux, ces êtres immatériels et insaisissables, que vous vous coupez du monde et vous enfermez dans votre atelier ou sanctuaire vodou pour les peindre?
Je ne cache rien, car les Dieux me dictent et m’inspirent ce qu’ils veulent que je montre au public, et pour bien d’autres mystères, ils les gardent au fond de mon imaginaire sacré, comme un temple bourré de fidèles qui attendent la venue du prêtre. Chaque œuvre détient la sacralité et la créativité du peintre qui rend cette œuvre parfaite et conforme au goût des Dieux qui l’habitent comme objet, spectacle et révélation .
Comme peintre très animalier, comment cette transposition de vos rapports avec les hommes, les Dieux, les animaux se perpétue-t-elle dans votre travail?
J’entends continuer ma quête d’exploration du monde marin comme celle des autres éléments (l’air, la terre, le feu). Je suis bien sûr en parfaite communion avec les mythes plurimillénaires et je crois que ces mythes ont travaillé mon cerveau avant même ma naissance. J’ai toujours eu l’impression d’avoir vécu avec des êtres mythologiques dans une ancienne vie et dans autre monde très différent du nôtre.
Propos recueillis par Dominique Batraville
Métamorphose de Dantor et Freda.