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Qu'en est-il de l'iridium d'Haïti?

(NB: les traductions sont de l'auteur)

Luc Rémy

 

 

A côté de l’or (sans parler du cuivre et de l’argent qui y sont associés à La Mine et La Miel dans le Nord d’Haïti) qui fait l’actualité dans les médias haïtiens depuis au moins les années 1997, il y a aussi l’iridium sur lequel nous méritons d’être informés pour mieux connaître les ressources et la haute valeur géostratégique de notre pays. Je crois que de telles informations sont nécessaires aux débats démocratiques qui se tiennent aujourd’hui sur l’Internet pour réclamer de nos dirigeants deux choses fondamentales:

  1. la transparence dans le traitement et la gestion des dossiers nationaux;
  2. l’utilisation rationnelle et responsable de nos différentes ressources.

L’iridium : un produit rare sur la Terre

Si l’or demeure toujours un métal fascinant pour l’humanité (à cause de sa pureté naturelle, de sa valeur décorative, de sa rareté, de son prestige et de sa valeur refuge qui lui permet de servir de référence officielle ou de fait à la monnaie), l’iridium semble en train de prendre une place tout aussi importante dans les civilisations modernes. Plus concrètement, l’iridium est une importante source de numéraires, un produit de prestige, de refuge et de stratégie.

L’iridium est l’un des métaux nobles. «Un métal noble est un métal qui résiste à la corrosion  et à l’oxydation. Notamment c'est un métal qui ne peut pas être dissous par une solution d'un acide seul. Les métaux nobles sont: l'or, l'argent et le platine. On y inclut aussi parfois: le cuivre, le mercure, l'aluminium, le palladium, le rhodium,  le nickel et l'osmium.1» La plupart  de ces métaux sont dissous par l’eau régale. 

«L’iridium est un métal de transition de la famille des métaux du groupe platine, très dur, lourd, cassant et d'aspect blanc argenté…Il ressemble au platine, mais avec une légère touche jaunâtre…Parmi les éléments connus, l'iridium est le plus résistant à la corrosion…Il ne peut être attaqué par aucun acide ni même par l'eau régale, mais peut l'être par des sels en fusion, tels que le chlorure de sodium (NaCl) et le cyanure de sodium (NaCN).2»

Découvert en 1803 par le scientifique britannique Smithson Tennant, l’iridium se trouve en très petite quantité dans la croûte et  le manteau terrestres. Lourd, attiré  par le fer tout au début de la formation de la Terre, il a pratiquement immigré très profondément avec les lourdes molécules de fer  pour former le noyau terrestre. En conséquence, quoique très abondant dans les météorites,  il est quasi inexistant à la surface de notre globe. Cependant, un petit groupe de pays (Afrique du Sud, Canada, Danemark, Espagne, France, Italie, Nouvelle-Zélande, Russie, Tunisie, …) en possèdent une mince couche dans le voisinage de leur surface. Au niveau de la croûte terrestre, l’iridium est 4 fois moins abondant que l’or, 10 fois moins que le platine, et 80 fois moins que l’argent et le mercure, 10 fois plus abondant que le ruthénium et le rhodium. «On trouve l’iridium dans la nature en tant qu’élément non combiné ou dans des alliages naturels, spécialement les alliages iridium-osmium, l’osmiridium (riche en osmium) et l’iridiosmium (riche en iridium). Dans les dépôts de nickel et de cuivre, les métaux du groupe platine interviennent comme sulfites, c’est-à-dire (Pt,Pd)S», comme tellurites, c’est-à-dire (PtBiTe), comme antimonides (PdSb), et comme arsénites, c’est-à-dire (PtAs2); dans tous ces composés, le platine est échangé par une petite quantité d’iridium et d’osmium. Comme pour tous les métaux du groupe platine, l’iridium peut être trouvé naturellement dans des alliages avec du nickel et du cuivre bruts.3»

Des géologues s’intéressent de plus en plus à connaître l’origine de cette couche d’iridium de surface qui n’existait pas initialement dans la croûte terrestre et qui se retrouve associée à de l’argile. La plupart de leurs hypothèses font remonter cette présence à 65 millions d’années. Elles considèrent cette date comme un tournant géologique marquant la frontière C/T ou K/T entre l’ère secondaire dominée par les  dinosaures (C ou K, ère de la craie ou ère des Crétacés) et l’ère tertiaire (T) caractérisée par l’extinction de ces animaux géants.

Si des hypothèses biologiques cherchent les causes de cette disparition dans des attaques virales ou bactériennes, les hypothèses géologiques insistent plutôt sur des cataclysmes volcaniques qui auraient créé des conditions de vie impossible pour la plupart des animaux, spécialement les dinosaures, et qui dans leur irruption auraient aussi ramené de l’iridium à la surface du globe.

En 1980, Luis et son fils Walter Alvarez ont proposé l’hypothèse astronomique de la collision extra-terrestre (extra-terrestrial collision), plus justement celle de l’impact d’un météorite ou d’un astéroïde géant pour expliquer la fin des dinosaures et la présence de la couche d’iridium  de surface. Ils situent le cratère résultant de l’impact de cette collision dans la péninsule du Yucatan4.

Découverte de l’iridium d’Haïti (traduit de5:)

«Au début de 1990 Alan K. Hildebrand, un étudiant diplômé de l’université d’Arizona visita un petit village montagneux d’Haïti nomme Béloc. Il faisait des recherches sur certains  dépôts K-T qui comprennent  des mélanges épais de gros fragments de roche, qui furent apparemment arrachés d’un lieu et déposés dans un autre lieu par des «tsunamis» hauts de plusieurs kilomètres, des vagues de mer géantes, qui ont très probablement résulté  d’un impact de la Terre. De tels dépôts se situent dans plusieurs endroits, mais semblent se concentrer dans le bassin caraïbe. 

Hildebrand trouva de l’argile vert brun avec un excès d’iridium, et contenant des cristaux de quartz choqué et de petites perles de verre érodé qui semblaient être des tectites. Lui et son conseiller à la Faculté, William V. Boylton, publièrent les résultats de la recherche dans la presse scientifique, suggérant non seulement que les dépôts étaient le résultat d’un impact de la Terre, mais que l’impact ne pouvait pas avoir eu lieu à plus de 1'000 kilomètres de distance.

C’était particulièrement curieux, parce que l’on ne connaissait l’existence d’aucun cratère dans le bassin caraïbe. Hildebrand et Boynton ont aussi fait état de leur découverte à la conférence géologique internationale, suscitant un vif intérêt. Les données ont indiqué la possibilité de cratères logés au loin de la côte septentrionale de la Colombie ou près de la pointe occidentale de Cuba. Alors Carlos Byars, un reporter de Houston Chronicle, contacta Hildebrand et lui apprit qu’un géophysicien du nom de Glen Penfield avait découvert en 1978 ce qui peut être un cratère d’impact, enfoui au nord de la Péninsule du Yucatan.»

Particularités de l’iridium d’Haïti

Peu importe, l’origine de l’iridium trouvé dans quelques endroits à la surface du globe: Haïti a le privilège de détenir un record spécial pour la réserve qu’elle contient: «La couche d’iridium d’Haïti, par exemple, est considérablement plus épaisse que celle trouvée dans aucun autre endroit, et contient aussi des cristaux de quartz choqué et des pâtés de verre, appelés tectites, qui sont plus grands que ceux trouvés ailleurs dans le monde.»

Hugh Ross établit comme suit  le lien  entre certains des minéraux d’Haïti et l’impact de la collision: «Les cristaux de quartz choqué de la région des Caraïbes sont beaucoup plus grands et plus nombreux que ceux trouvés dans d’autres régions. Aussi, des tectites,  sphères de verre de 8 pouces à ¼ de pouce de diamètre, ont été trouvées dans la Caraïbe, mais nulle part ailleurs. Puisque les tectites résultent exclusivement d’un grand impact, ceci fournit des preuves supplémentaires qu’une collision extra-terrestre a mis fin à la période des Crétacés. Les tectites indiquent aussi que le cratère provenant de la prodigieuse collision peut exister quelque part aux alentours de la Caraïbe.» 

L’une des îles de la Caraïbe, Haïti, a une couche d’éjecta  (à la frontière de l’ère Crétacée- ère tertiaire) 25 fois plus épaisse que celle trouvée n’ importe où ailleurs. Aussi, des mesures de certains éléments  terrestres rares qui diffèrent entre la terre et l’océan indique un point d’impact en partie au fond de l’océan et en partie continental, mais beaucoup plus océanique que continental. Ainsi, il se peut que l’impact ait eu lieu au bord d’un bassin océanique.6»

Richard Cowen a noté: «Haïti était à quelque 800 km de Chicxulub à la fin de l’ère des Crétacés. À Béloc et d’autres localités d’Haïti, la démarcation C/T est marquée par une couche frontière d’argile normale mais épaisse (30 cm) qui consiste surtout en sphérules de verre. L’argile est recouverte d’une couche de turbidite, matériel (résultant) d’éboulement de terrain sous-marin  qui contient de grands fragments de roche. Certains des fragments ressemblent à la croûte océanique bouleversée, mais il y a aussi des morceaux sphériques de verre  jaune et noir allant jusqu'à 8 mm au milieu de ceux qui demeurent indubitablement des tectites. Les tectites de Béloc furent formées à 1300° C à partir de deux types différents de roche; et elles datent précisément de 65 millions  d’années.  Les tectites noires furent formées à partir de roches volcaniques continentales et les jaunes à partir de sédiments évaporites  avec une forte teneur de sulfate et de carbonate.7 »

Des recherches et la transparence s’imposent concernant notre iridium

Ainsi, le territoire national haïtien, spécialement Béloc et Tom Gâteau, est devenu un haut lieu, une espèce de centre de pèlerinage scientifique pour des géologues et autres professionnels non seulement désireux de fournir des preuves solides et irréfutables à la théorie de la collision mais aussi d’explorer les ressources précieuses de notre pays. Comme le suggère l’hypothèse de l’impact mi-continental, mi-océanique, les ressources d’Haïti peuvent bien abonder et sur la surface du sol et au fond de nos Eaux Territoriales et de notre Zone Economique Exclusive telles que définies dans le Droit International, les conventions internationales signées par Haïti et la dernière Convention des Nations Unies de 1982 sur le Droit de la Mer.

Il appartient donc à nos géologues, à nos géochimistes, à nos géophysiciens, à nos océanologues, à nos scientifiques, à nos chercheurs, à nos universitaires, aux dirigeants de l’Etat, aux responsables du Bureau des Mines et des Ressources Energétiques, et du Ministère de l’Agriculture, des Ressources Naturelles et du Développement Rural de nous aider à disposer de plus d’informations sur ce dossier éminemment important pour l’avenir d’Haïti. Des recherches s’imposent pour nous aider à savoir le volume approximatif d’iridium et d’autres minéraux contenus sur le territoire national. La circulation de l’information sur l’iridium et les autres produits résultant de l’impact météoritique est importante pour de nombreuses raisons. D’abord, elle aidera l’opinion publique haïtienne  à comprendre finalement que le sol national n’est pas aussi pauvre que la quasi totalité des études sur le pays le fait généralement accroire. Deuxièmement, elle peut bien encourager et développer sur la question l’esprit de recherche chez nos jeunes universitaires des facultés de science; troisièmement, elle contribuera à relever le pouvoir de marchandage diplomatique de la nation si, naturellement, nos dirigeants se donnent pour obligation de disposer de manière responsable de nos ressources naturelles; quatrièmement, cette circulation d’informations pourra éventuellement conduire à l’éclaircissement des conditions dans lesquelles certains de ces produits précieux haïtiens ont été déjà emportés à l’étranger et sont en train d’être vendus sur le marché international. Cinquièmement, elle arrêtera éventuellement le pillage, le vol et/ou le commerce souterrain ou officiel qui se font actuellement aux dépens du patrimoine économique national, sans que compte en soit rendu à la Nation.

Visitez les sites:

Vous vous rendrez compte par exemple que nos tectites sont vendues en Europe et comptent parmi les plus chères du monde:

On y lit: “Shatter Cones & Couches K/T from Haiti” avec les spécifications suivantes:

MICRO TECTITE COUCHE K/T
LOCATION  TOM GATEAU, HAITI
DIMENSIONS 2x1,5x1,5cm
PRIX 80 euros
MICRO TECTITE COUCHE K/T
LOCATION  TOM GATEAU, HAITI
DIMENSIONS 2x1x 0,5cm
PRIX 35 euros
MICRO TECTITE COUCHE K/T
LOCATION  TOM GATEAU, HAITI
DIMENSIONS 1,5x1x 1cm
PRIX Désolé vendu!

POUR COMMANDER, ENTRE AUTRES, DES TECTITES DE TOM GATEAU, HAÏTI: http://minerauxetfossiles.eu/tinc?key=3SEy1P41&formname=commande

Prix de l’iridium sur le marché international

Selon le Laboratoire national américain de Los Alamos dirigé par l’Université de Californie pour le Département de l’ Energie des Etats-Unis, « l’iridium coûte environ 500 dollars l’once troy (à partir de 1990).8»

Le tableau suivant publié par “Engelhard Industrial Bullion Prices”  le 4 décembre 2007 montre le rang de l’iridium parmi les métaux précieux les plus chers9

Name Symbol Price Unit of Measure
Silver Ag
$14.280
troy ounce
Gold Au
$799.51 
troy ounce
Platinum Pt
$1465.00 
troy ounce
Palladium Pd
$351.00 
troy ounce
Rhodium Rh
$6825.00 
troy ounce
Iridium Ir
$450.00 
troy ounce
Ruthenium Ru
$475.00 
troy ounce
Rhenium Re
$2500.00 
Pound
Osmium Os $400.00  troy ounce

Le prix a légèrement baissé dans le tableau suivant, daté du 6 février 2009.
 

Name Symbol Price Unit of Measure
Silver Ag
$13.010
troy ounce
Gold Au
$915.20 
troy ounce
Platinum Pt
$987.00 
troy ounce
Palladium Pd
$211.00 
troy ounce
Rhodium Rh
$1150.00 
troy ounce
Iridium Ir
$420.00 
troy ounce
Ruthenium Ru
$85.00 
troy ounce
Rhenium Re
$4000.00 
pound
Osmium Os
$400.00 
troy ounce

Applications de l’iridium

L’iridium a été surtout utilisé traditionnellement comme un agent pour durcir des alliages de platine. Par exemple, il a été utilisé en 1889 pour construire le mètre étalon (unité de longueur) et le kilogramme (unité de masse) dans la proportion de 10% contre 90% de platine. Il a souvent été utilisé aussi dans l’industrie bijoutière. Avec un point de fusion se situant à 2446°C et un point d’ébullition à 4'480°C, l’iridium est particulièrement recherché et employé dans l’usinage de creusets et de matériels résistant aux hautes températures, cristaux de laser, chalumeaux, de contacts électriques (bougies pour moteurs à explosion: autos, avions, de fusées ), de substrats pour mémoire à bulles magnétiques des ordinateurs et d‘autres gadgets, de lasers à l’état solide, de télescopes à rayons x, de substrats isolants pour semi-conducteurs, de filtres monocliniques…) Parmi les nombreuses autres utilisations de l’iridium,  signalons: la décoration de la porcelaine (l’iridium en poudre noire), les alliages de platine et d’iridium pour les pièces d’artillerie, les alliages d’osmium et d’iridium pour la fabrication de compas et de boussoles, le traitement des surfaces des lunettes de ski, la thérapie de la prostate et d’autres types de cancer par radiation à haute dose, la carbonylation  du méthanol pour produire de l’acide acétique. L’iridium a servi aussi à la fabrication de becs de stylos (plumes à réservoir). Dans la physique des particules, l’iridium est très souvent préféré au tungstène dans les super accélérateurs10 (supercolliders) de particules pour produire de l’anti-matière, spécialement des anti-protons11.

«L’iridium a été utilisé  dans les générateurs thermoélectriques radio-isotopes des véhicules  spatiaux tels que Voyager, Viking, Pioneer, Cassini, Galileo et New Horizons […] Les miroirs de l’Observatoire à rayons x de Chandra sont revêtus d’une couche d’iridium d’une épaisseur de 60 nanomètres. Après  des tests sur le nickel, l’or et le platine, l’iridium s’est révélé la meilleure option pour refléter les rayons x12

Notes

  1. http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9tal_noble
     
  2. http://fr.wikipedia.org/wiki/Iridium
     
  3. http://www.answers.com/topic/iridium
     
  4. http://www.dil.univ-mrs.fr/~gispert/enseignement/astronomie/2eme_partie/dinosaures.php
     
  5. http://academickids.com/encyclopedia/c/ch/chicxulub_crater.html
     
  6. http://www.reasons.org/resources/faf/1991_v5n3_q3/index.shtml
     
  7. http://www.ucmp.berkeley.edu/education/events/cowen1b.html
     
  8. http://periodic.lanl.gov/elements/77.htm
     
  9. http://www.catalysts.basf.com/apps/eibprices/mp/
     
  10. Selon Wikipédia, il y avait en 2004 15'000 accélérateurs de particules dans  le monde.
     
  11. http://en.wikipedia.org/wiki/Iridium
     
  12. http://www.answers.com/topic/iridium

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