Potomitan

Site de promotion des cultures et des langues créoles
Annou voyé kreyòl douvan douvan

«Fonds Haïtien de Solidarité»
(FHS)

Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous.
Demandez ce que vous pouvez faire pour votre pays.

                                                              J.F. Kennedy

Serge H. Moïse

André Normil

Kombit par André Normil. Galerie Macondo.

La problématique haïtienne est telle que cette crise, la plus aigue qu'ait connue le pays depuis son accession à l'indépendance, n'épargne aucun des secteurs vitaux de la nation. Cette situation ne fait que s'aggraver, développant ainsi un état de chaos aux conséquences imprévisibles. Le moins qu'on puisse dire: c'est le naufrage d'une société.

Les faits sont en eux-mêmes éloquents, nous nous approchons à vive allure de la faillite, du point de non retour. Nous ne pouvons plus compter uniquement sur l'aide externe que d'aucuns qualifient d'ailleurs d'aide au sous-développement, et pour cause.

Il nous faut réaliser, dans les plus brefs délais, un coude à coude particulier en vue d'ouvrir Haïti sur la vie. Encore faut-il, selon le mot de Maurice Maeterlinck: penser en homme d'action et agir en homme de pensée.

Le temps n'est plus aux querelles de clocher, aux luttes de clans, aux intrigues stériles encore moins aux politicailleries mesquines et improductives. Voilà bientôt deux cent sept ans que nous faisons cette pratique et le bilan s'avère ce que nous sommes aujourd’hui, la nation la plus pauvre de l'hémisphère.

Nous nous devons à nous-mêmes et aux autres de relever le défi, par le dialogue, la concertation, animés de cet altruisme qui transcende toute préoccupation qui ne soit de nature à assurer une nette amélioration des conditions infra-humaines que connaissent depuis trop longtemps, la très grande majorité de nos compatriotes, le tout en conformité avec l’article 35 de la constitution en vigueur qui stipule: «La liberté du travail est garantie. Tout citoyen a pour obligation de se consacrer à un travail de son choix en vue de subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille, de coopérer avec l’Etat à l’établissement d’un système de sécurité sociale».

Tous les analystes lucides et soucieux quant à cette situation désespérante: hommes politique, syndicalistes, artisans, professionnels et autres, sont unanimes pour ce qui est de l'impérieuse nécessité de ce dialogue, rompant une fois pour toutes avec nos pratiques d'antan, en particulier, celle de parler haut et fort pour ne rien dire. Le véritable dialogue s'inscrit dans l'agencement harmonieux du verbe et de l'action concertés. Un de nos Hommes d'Etat, dans une adresse à la nation, concluait, il n'y a pas longtemps, en ces termes: Le plus grave problème d'Haïti est l'état lamentable de l'homme haïtien. Etait-ce une simple boutade, exprimant son dépit du moment, ou bien, comme l'ont fait tant d'autres avant lui et nous pouvons citer: Jean Price Mars, Jacques Stephen Alexis, Jacques Roumain etc lesquels à travers leurs écrits et leurs prises de position, n'ont cessé de nous mettre en garde contre nous-mêmes.

Nous avons appris à mépriser nos propres valeurs culturelles au bénéfice de pratiques importées, créant chez nous un nouveau type de colonisés. Notre méconnaissance de notre identité culturelle, principale cause de nos faiblesses structurelles, tant mentales qu'institutionnelles, explique notre incapacité à nous organiser en tenant compte de notre spécificité de peuple, ce en quoi Frantz Fanon proclame que l'antillais traditionnellement en lutte, doit réaliser sa descente aux enfers pour renaître de ses cendres et cheminer vers son plein épanouissement.

Notre éminent compatriote Anténor Firmin, en réponse à la question: Que faut-il faire pour la régénération d'Haïti, a eu ce mot heureux:

Adoptons sincèrement et loyalement, chez nous, les principes et les pratiques qui ont favorisé l'évolution des jeunes peuples, nos émules, lesquels grandissent et prospèrent par le travail, l'instruction et la liberté. Il n'a pas été écouté, faut-il en déduire que ce n'est point là, la préoccupation majeure de nos élites?

Haïti, jadis la perle des antilles, est réduite à sa plus simple expression, au point où un américain, faisant preuve d'absence totale de charité, l'a décrite comme étant la poubelle aux carrefours des Amériques.

Pouvons-nous, voulons-nous encore faire renverser la vapeur de sorte que les Haïtiens puissent sans se leurrer, retrouver leur fierté historique, leur dignité de peuple, dans un effort collectif de redressement en vue de la reconstruction du pays par et pour les Haïtiens? Nous en sommes convaincus, car un peuple ne meurt pas. Et, c’est dans cet esprit, qu'animé de la plus grande foi, nous prenons l'initiative de soumettre à la nation tout entière, ce projet de grande Kombite Nationale intitulé: Fonds Haïtien de Solidarité (FHS).

Définition:

Le Fonds Haïtien de Solidarité (FHS) est une institution financière ayant pour mission de recueillir et d'administrer l'épargne que voudront bien lui confier ses membres en vue de participer, selon des critères préétablis, au développement économique, social et culturel d'Haïti. Le (FHS) n’est pas et ne sera jamais une banque ni une coopérative.

Modalités:

Le (FHS) est créé par la loi portant création du Fonds Haïtien de Solidarité, et comme toute personne morale, il a sa loi organique, ses statuts et règlements. Le (FHS) est autonome et rend compte de ses activités au parlement haïtien à travers son ministère de tutelle qui pourrait être le ministère des affaires étrangères et des cultes, le ministère du travail et des affaires sociales ou toute autre entité administrative susceptible d’inspirer confiance pleine et entière. Le (FHS) est autonome et se trouve ainsi à l'abri des aléas politiques, condition sine qua non à son implantation, sa survie et son succès.

Transparence:

Le Conseil d'Administration du (FHS) est constitué de représentants librement choisis par les différents secteurs vitaux de la communauté haïtienne savoir: syndicat, université, groupes sociaux-professionnels, représentants des communautés haïtiennes vivant en terre étrangère.

Un Directeur-Général et un personnel administratif recrutés sur concours avec chance égale pour tous, sans exclusive ni réserve. Publications périodiques des rapports d'activités du (FHS) et des états financiers, ces dits rapports étant accessibles sans difficulté à tous ceux qui en font la demande, moyennant de légers frais d'administration, s'il le faut.

Promotion et développement:

Le (FHS) se propose de servir de pont entre les Haïtiens de l'extérieur et ceux de l'intérieur, favorisant ainsi des échanges fructueux tant sur le plan commercial, culturel que civique. Dans ce sens, des délégués actifs et dynamiques devront oeuvrer efficacement dans ces différentes sphères d'activités. Il sera formé en Haïti comme en diaspora des comités avec pour mission de promouvoir le civisme sous toutes ses formes, développé par le sentiment d'appartenance à la patrie commune comme cela ne s'est jamais fait auparavant dans ce pays.

Il en sera de même à l'étranger, partout où il existe des poches de populations haïtiennes. Des rencontres seront organisées - séminaires, conférences, causeries et débats, pour stimuler et remettre en valeur l'identité haïtienne et la rendre productrice de faits générateurs de progrès pour tous. Le (FHS) envisage de resserrer les liens entre tous les compatriotes, ériger en vertu suprême le sentiment d’appartenance à la mère patrie car pour la pleine réussite de la grande «Kombite Nationale», Haïti a besoin de l'apport de tous et chacun de ses enfants.

Le (FHS) pourra par exemple, implanter à l'étranger des bureaux, des centres de distribution des produits haïtiens, produits agricoles, produits artisanaux etc. De ce fait, de nouveaux marchés seront créés pour encourager l'exportation de nos produits et l'entrée de devises fortes qui nous font tellement défaut. Le tourisme sera encouragé par un système de voyages pré organisés en offrant aux visiteurs des avantages particuliers dans les hôtels, et restaurants un peu partout dans le pays. Le (FHS) pourra aussi établir un réseau de transfert de fonds à travers le pays et à l'étranger (FHS TRANSFERT). Il va de soi que les frais de transfert alimenteront le fonds destiné à financer la création d’emplois à travers le pays.

Objectifs du (FHS):

Il ne fait aucun doute que de nos jours, et cela est vrai, même dans les pays industrialisés, les petites et moyennes entreprises constituent le palier majeur du développement économique et que l'Etat se doit d'harmoniser les rapports sociaux, autant que faire se peut, afin de parvenir à une politique de plein emploi, de développement et de progrès.

Le (FHS) recueillera donc les fonds nécessaires au financement, à un taux préférentiel, de ces petites et moyennes entreprises, de façon à encourager la créativité, l'esprit d'entreprenariat, le dynamisme de tous ceux: artisans, agriculteurs, professionnels de l’éducation et de la santé, artistes et tous autres entrepreneurs qui correspondent aux critères d'éligibilité préétablis.

Depuis le séisme du douze (12) janvier deux mille dix (2010), le besoin en matière de logements sociaux s’est avéré encore plus crucial qu’auparavant, le (FHS) peut fort bien financer, toujours à un taux d’intérêt préférentiel, la construction, la location et la vente de milliers de ces susdits logements sociaux.

Parallèlement, il sera créé, à même le (FHS) un secteur assurance aux fins de prévenir les impondérables. Assurance hypothécaire, assurance-vie en fonction des besoins et de la capacité de payer de notre clientèle cible.

Le (FHS) financera l’organisation et la participation des Haïtiens vivant à l’étranger «la diaspora» aux élections haïtiennes à travers les ambassades et consulats ou autres arrangements prévus par la loi électorale.

Voies et moyens:

Il sera demandé à tous les adhérents, qui ne manqueront pas de le vouloir, de transférer une partie, même infime de leurs épargnes au (FHS) en vue de réunir les sommes nécessaires au financement de ces petites et moyennes entreprises et à la création de centaines de milliers d'emplois directs et indirects, sans lesquels, Constitution ou pas, la démocratie ne sera pour longtemps, qu'un beau rêve collectif. Il n'y a point de démocratie s'il n'y a pas de développement à un taux de croissance tant quantitatif que qualitatif.

L'argent, l'épargne ainsi transférée, demeure en tout temps, la propriété du membre déposant, qui peut en faire retrait à n'importe quel moment, sur simple demande expresse.

Mécanisme de dépôt:

Pour participer au (FHS), un certain nombre de mécanismes peuvent être prévus, outre les dépôts effectués directement aux guichets des différentes succursales du (FHS) à travers le territoire national ou à l'étranger.

Les responsables des comités du (FHS) pourraient être habilités à faire la collecte des fonds au sein de leurs comités respectifs, moyennant un système de contrôle adéquat.

Les employés de bureau ou d'usine en Haïti et/ou à l'étranger signeront une autorisation (virement bancaire pré-autorisé) habilitant leurs employeurs à prélever à la source et à transférer au (FHS) les montants qu'ils auront eux-mêmes déterminés.

Les intérêts sur ces petits montants sont abandonnés au bénéfice du développement de la patrie commune.

Quand il s'agira de montants substantiels dont le plancher sera fixé par le Conseil d'Administration, l'épargnant qui effectue une transaction d'importance pourrait être exonéré de tous droits ou taxes jusqu'à concurrence du montant des intérêts qu'aurait rapporté ces sommes si elles avaient été placées dans l'une ou l'autre des institutions financières traditionnelles.

Les établissements publics: l'EDH, la TELECO, les banques commerciales et autres pourraient y participer à raison d'un pourcentage de leurs chiffres d'affaires annuels.

Les professionnels, les hommes d'affaires, les commerçants, les organismes internationaux, les pays amis d'Haïti, les jeunes tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays sont invités à y participer activement.

Perspectives et rentrées de fonds.

La diaspora haïtienne est estimée à environ quatre millions, imaginons un instant trois millions d'adhérents qui déposeraient chacun en moyenne la modique somme de dix (10.00) dollars le mois, soit l’équivalent d’un paquet de cigarettes, cela nous donne trente millions (30.000.000.00) de dollars sur une base mensuelle, à partir de laquelle toutes les projections sont possibles. En un an nous pouvons, au seul poste des dépôts, sans tenir compte des activités connexes capitaliser trois cent soixante millions (360.000.000.00) de dollars que nous ne devrons à personne d'autre.

Ces chiffres nous permettent d'affirmer qu'en dix (10) ans, avec un plan de politique générale qui colle à notre réalité, nous serons en mesure de franchir les quatre étapes du développement d'Haïti, qui vont des conditions infra-humaines où nous sommes actuellement, à la phase d'austérité et de planification, la phase d'équilibre et enfin la phase d'accumulation

A souligner à l’eau forte: Le (FHS) fonds haïtien de solidarité ne sera jamais et en aucun cas, en compétition avec les banques commerciales ou toutes autres institutions financières. Son objectif est de rejoindre ceux et celles qui n’ont pas et ne peuvent avoir accès au crédit. Si les banques commerciales comprenaient la philosophie de cette démarche, elles seraient les premières à contribuer à la concrétisation du (FHS), lequel, faut-il le répéter ne coûtera rien au gouvernement, ni à la communauté internationale ni aux contribuables et remettra certainement la famille haïtienne sur les rails du développement durable, du progrès et de la prospérité.

Comme l’a récemment déclaré, le ministre canadien des affaires étrangères, de passage en Haïti: «La création d’emplois demeure la priorité absolue!»

Conclusion:

Ce qui précède nous permet de constater, non sans une légitime fierté, que nous disposons d'assez de ressources pour amorcer le virage qui s'impose. Le Fonds Haïtien de Solidarité se révèle à notre humble avis, l'une des actions les plus dynamiques susceptibles de susciter l'adhésion d'un pourcentage relativement élevé de souscripteurs, indépendamment de leurs allégeances religieuses, idéologiques ou politiques.

Le Fonds Haïtien de Solidarité offre à ses membres le triple avantage suivant:

  1. d'avoir le contrôle d'un outil de développement d'une importance capitale et à nul autre pareil
     
  2. de participer activement et concrètement à la Grande Koumbite Nationale
     
  3. d'insuffler à la Nation tout entière un regain d'énergie, d’une part, la possibilité de vivre pleinement et quotidiennement son appartenance à la patrie commune, d’autre part.

Soulignons pour finir que le (FHS) sera perçu, même par les plus incrédules, comme la manifestation d'une ferme volonté des Haïtiens, de changer l'ordre des choses dans ce pays et ne pourra qu'encourager davantage l'aide externe.

Un peuple ne saurait se développer s'il ne se prend en main et en maîtrise pleinement les leviers de commande, quant à son plan de politique générale.

Aristote n'a t-il pas dit que "la politique est l'art et la science d'embellir la cité" N'est-ce pas le voeu de chacun d'entre nous qu'Haïti redevienne la perle d'antan? Nous savons maintenant que nous le pouvons. L'union fait la force n'est pas un voeu pieux, nous l'avons expérimenté et de belle façon plus d'une fois au cours de notre histoire jeune mais glorieuse.

Oui, nous tenons notre avenir entre nos mains, il est impérieux que nous donnions la démonstration de cette belle unité au niveau de la nation.

La cause profonde de l'échec de nos approches antérieures faites de cette suite de refus systématiques, s’échelonnant dans le temps, ne réside t’elle pas dans notre peur endémique de la contradiction, donc du dialogue?

Il faut que cela change. Le défi est de taille certes, mais tous ensemble, nous pouvons le relever, le (FHS) en est le point de départ, et ainsi sera exaucée cette belle prière qu'en notre nom Alcibiade Pommayrac adressait au Seigneur, au siècle dernier:
                              
 «Ne permets pas Seigneur que le flot l’engloutisse
Et que d'un peuple entier, l'espoir dernier périsse»

Serge H. Moïse av.
Barreau de P-au-P.
 Mai 1988

boule

 Viré monté