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Le lac Iris

(Muse à Heathrow)

Élie Fleurant

Photo Francesca Palli.

Me voici au phénix du soleil
À la lisière du lac Iris.
Or je demeure en extase devant
Le panorama circulaire des arbres somptueux : les palmiers,
La mousse espagnole, le cajou des Antilles, le gommier rouge,
Le magnolia à grandes fleurs encadrant la nappe d’eau.
Les épis et plastrons forment un jardin merveilleux.
Oiseaux, fleurs et plantes exotiques cohabitent en harmonie.
Qui ose perturber la concorde de l’union et des volontés?
D’ailleurs, la devise de Heathrow :
Sois gentil ou fous le camp!

Amour, harmonie et idylle
S’épanouissent sur ce miroir argenté;
Une conspiration de fleurance et de romance :
La brise souffle lassement les mèches blondes
De la mousse espagnole et sa chevelure tombe sur le flanc du lac;
Puis l’amante reçoit avec agrément la galanterie
De l’arbre épique.
Et c’est accouplement entre l’eau et la mèche.

Passent fleur et flair d’été,
Passe la belle aux flots dormants du jardin des délices.
Enlise donc tes plis à la lisière
De tes cheveux rustiques et blottis.
Et le jasmin fleurant dans la cour du Centaure
Embaume le phallus errant et oisif.
Ô flot nonchalant!
La métamorphose de ton reflet exalte le palmier
Quand la courtine gît paisiblement sur le miroir de l’azur.  

Tu es encadré de maisons somptueuses dont les toits
En ardoise turquoise s’affalent sur ton cristal.
Quelle caméra imaginaire décrivant ton diorama!
Illusion la plus subtile et esthétique.

Soudain Zeus tire une photographie perceptible
De la somptuosité du lac,
Et les hirondelles, les hérons, les cygnes, les pélicans éblouis du feu fictif
Applaudissent à tout rompre le génie du firmament et des dieux.

Puis les épis de la pluie commencent à trouer la voûte du lac.
Les larmes pesantes tombent des cieux
Et elles ruissellent sur les feuilles rousses des bananiers.
Et je regarde à peine à travers la vitre teintée et embuée
Les gouttes tombées sur l’étang pétillant de clarté et de gaieté.
Ô volupté des fougères!
Ô symphonie de l’averse!   
Poète, troubadour, prends donc ton luth,
Pour accueillir l’harmonie et la polyphonie de l’été pluvial.

Après la pluie, le beau temps soudain se lève.
Un doux vent chassant tous les chagrins et les pleurs
Et la monotonie vient s’abattre sur la rive.

On dirait que l’averse ouvre les yeux des fleurs sauvages.
Et la vie devient radieuse comme l’enfant rose dans son berceau
Dansant au gré du vent.
Puis le lac nonchalant paré de beauté
Regagne sa vitalité.

Or la reine aux yeux verts
Dort aux confins de la mousseline blanche
Sans rengaine et regrets.
Elle ne rêve plus.
Car sa conscience est placide et candide
Comme l’eau qui dort.
Ô agrément de l’instant!
Ô paradis mille fois aimé!
Quelle sérénité de l’été sur le lac du poète!
Miroir du firmament et de l’arc-en-ciel,
Toi qui es la panacée de l’âme nomade.

L’eau revient-elle à sa source?
Je suis l’enfant des palmiers, de la mer,
Du soleil et des sables brûlants.
Je suis le Phallus des Tropiques.
J’abhorre le cristal blafard et pesant.
Pardieu! Il tue même venant
Au-dessus de nos têtes.

Eurêka! Enfin j’ai trouvé l’exutoire
Cherché aux quatre coins du terroir.

Ô lac Iris! Ô lac du poète!
Ta peinture à la tempera,
Image de l’arc-en-ciel,
Une symbiose de douceur et d’orage,

Passe donc Dorian, passe!
Ici pas de violence ni de déchaînement!

Ô Heathrow, toi seule es belle!

Élie Fleurant, poète lauréat

Heathrow, Florida
Juillet 2019  

boule

 Viré monté