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M O N C H O A C H I «RETOUR À LA PAROLE SAUVAGE» MONCHOACHI: «Ces voix qui nous manquent» |
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Retour à la parole sauvage, Monchoachi | Lakouzémi, Vol.2 | nov. 2008 | ISBN 978-2-9530120-2-6 | 20 €
Une nouvelle parution de Lakouzémi: «Retour à la parole sauvage» Vient de paraître la deuxième livraison de la revue Lakouzémi, sous la bannière du «Retour à la parole sauvage». A la suite d’une publication inaugurale, fondatrice, parue l’an dernier, sous le titre «Eloge de la servilité» dont l’essentiel des textes étaient écrits par Monchoachi, voici aujourd’hui «Retour à la parole sauvage». Cette fois Monchoachi est entouré de près d’une vingtaine d’écrivains et d’artistes parmi lesquels on peut citer, Alain Gontrand (philosophe), Philippe «Kenjah» Yerro (anthropologue), Jean-Marc Terrine (critique d’art), Serge Domi (sociologue), Bruno Pédurand (artiste peintre), Alin Légarès (conteur), Nèg Madnik (slameur), et aussi de contributions d’auteurs de la Caraibe (George Lamming, de Barbade, Mireille Jean-Gilles, de Guyane, Olive Senior, de la Jamaïque…), de France (Jean-Paul Michel, poète et éditeur), de Canada (Denise Brassard, universitaire) et d’un choix de paroles lumineuses émises par des Indiens d’Amériques du Nord, recueillies au moment de la colonisation de leurs terres par les Américains, et au moment du déploiement de la civilisation occidentale dans le Nouveau Monde. Ce choix, à vrai dire, éclaire à merveille le titre «Retour à la parole sauvage» qui résonne comme un appel. Il illustre aussi parfaitement le propos des auteurs de l’ouvrage. De quoi s’agit-il en effet ? Il s’agit essentiellement de tisser une nouvelle relation à la terre («notre mère» disent les Indiens), une relation à travers laquelle les hommes renoueraient avec la vraie liberté, c'est-à-dire avec la beauté, qui réside dans le fait d’être «en entretien» avec la terre, avec le monde, plutôt que d’être inscrit dans une «civilisation» dont le dessein est de la soumettre, de la mettre à la raison. Cette civilisation, non seulement met la terre à sac et l’enlaidit : elle enlaidit les hommes eux aussi, en retour les avilit et les asservit à ce dessein. A travers plus d’une trentaine de textes, développant ce propos central, l’approchant sous différents angles mais toujours l’abordant à la hauteur qui convient, avec profondeur et densité, ce beau recueil constitue une contribution majeure à la réflexion sur notre monde actuel et sur notre temps. Comme le signale Philippe Kenjah Yerro dans une de ses contributions: «Nous devons à Monchoachi d’avoir contourné le décor pour nous inviter à son envers. Je crois aux cycles, et je crois que Lakouzémi ouvre un nouveau cycle intellectuel et culturel dans l’avancée de la conscience martiniquaise. Il s‘y développe l’ambition de rendre le verbe créateur et la vision fondatrice. Il s’y entretient une connaissance sereine du terrain, et donc, une froide détermination de l’action». «A mes yeux, un seul Monchoachi suffit à faire contrepoids à la méprise universelle. "Retour à la parole sauvage", (ses formes surprendront: "retour" ne pouvant signifier redite), je signe des deux mains!» - Jean-Paul Michel, Poète, Fondateur des Editions William Blake Lakouzémi, «Retour à la parole sauvage»: Un ouvrage indispensable à l’adresse de tous ceux qui, désenchantés du monde actuel et de ses faux-semblants, veulent s’ouvrir à une lecture et à une réflexion en tout point stimulantes. Lakouzémi, « Retour à la parole sauvage » , 272 pages, 20 €, disponible en librairie. Sa sa yé ?
Fondé en août 2007 par le poète Monchoachi, Lakouzémi se présente sous plusieurs plans, une revue annuelle et un cycle annuel de trois Journées-Rencontres. Les Journées-Rencontres sont l’occasion de débats et donnent également lieu à des manifestations diverses : danse, musique, théâtre, expositions, gastronomie et autres modes d’expression qui ont lieu dans un espace symbolique, un pitt. Les journées Rencontres ont lieu à dates fixes qui renvoient à des évènements symboliques : 15 août (Cérémonie du Bois Caïman, 1791), premier samedi de décembre (date calamiteuse de l’arrivée de Colomb dans les Petites Antilles, 1493), Sanmdi Glorya (Traité de Basse-Terre entre Européens et Kalinagos reconnaissant, de fait, l’existence de la nation Kalinago, 1660). Il importe de souligner que le principe de base de Lakouzémi est son indépendance de pensée. Lakouzémi doit l’assurer grâce à sa totale indépendance financière. Bref, il est impératif pour Lakouzémi de tisser ses réseaux afin de ne dépendre de personne. Sa ki fèt ?
Revue Lakouzémi, Volume 2, « Retour à la parole sauvage »isponible en librairie à partir du 8 décembre 2008 De partout monte le sentiment qu’inexorablement le monde s’obscurcit. Et à ce sentiment répond, en écho, une aspiration diffuse à vivre dans la beauté. En effet, quel que soit le modèle qu’il met en avant, quelle que soit l’idéologie qu’il agite, quelle que soit la figure qu’il montre, le monde moderne est mû par un même principe: l’idée selon laquelle la production de biens et l’accumulation de richesses constitueraient la fonction première des sociétés humaines, la voie incomparable pour atteindre au plein épanouissement des personnes. Or, cette idée d’asseoir ainsi la vie de groupes humains (et, par suite, de l’humanité entière) sur l’accroissement infinie de la production et l’accumulation perpétuelle des richesses entraîne une dégradation intime des personnes, elle aussi sans limite.
Ont contribué à cette publication : Monchoachi : Poète
Nous appelons «sauvages» les manifestations de l'esprit et les modes d'existence qui se différencient essentiellement du mode servile introduit et diffusé par la «civilisation», mode servile dont les traits les plus caractéristiques sont formés par: l'apologie du travail; la croyance en la science comme modalité d'accès au «réel»; l'assentiment au progrès matérialisé par l'accroissement des techniques et l'accumulation des biens; l'aliénation à la culture attestée par un engouement maladif pour l'écriture et pour la pierre et plus généralement pour l'artifice. - Monchoachi Nous devons à Monchoachi d'avoir contourné le décor pour nous inviter à son envers. Je crois aux cycles, et je crois que Lakouzémi ouvre un nouveau cycle intellectuel et culturel dans l'avancée de la conscience martiniquaise. II s'y développe l'ambition de rendre le verbe créateur et la vision fondatrice. II s'y entretient une connaissance sereine du terrain, et donc, une froide détermination de l'action. - Philippe "Kenjah" Yerro Retour à la parole sauvage Monchoachi
Cependant, les phénomènes ayant conduit à cet obscurcissement du monde n’apparaissent pas d’emblée eux-mêmes en pleine lumière. Ceci, parce qu’étant de caractère multiforme, ils se sont retrouvés confusément imbriqués. Au surplus, certains, d’origine fort lointaine, nous ont à un si haut degré façonnés, conformés, que leur existence même nous semble en tout point aller de soi. Et, allant de soi, ils dissimulent l’impulsion qui les a engendrés, en même temps qu’ils voilent toute représentation de nature à traduire l’aspiration à vivre dans la beauté. Pourtant, si on y prête attention, cette aspiration à vivre dans la beauté, pour indéfinissable qu’elle paraisse encore, non seulement est révélatrice de l’état crépusculaire actuel. Surtout, elle est significative du mal qui ruine le monde moderne. En effet, quel que soit le modèle qu’il met en avant, quelle que soit l’idéologie qu’il agite, quelle que soit la figure qu’il montre, le monde moderne (qui ne peut être appelé «moderne» que pour autant qu’il est hanté par le nombre, non parce qu’il est habité par la mesure) est mû par un même principe: l’idée selon laquelle la production de biens et l’accumulation de richesses constitueraient la fonction première des sociétés humaines, la voie incomparable pour atteindre au plein épanouissement des personnes. Eu égard à ce postulat, les divergences et les oppositions, qui semblent irréductibles, entre partisans et adversaires de l’un ou l’autre modèle (libéralisme ou socialisme, nationalisme ou mondialisme) ne portent en réalité que sur la nature des registres d’appropriation des moyens de production, sur les modalités de distribution des biens et richesses, la délimitation et l’organisation des périmètres de la production, soit, en définitive, sur des questions relatives aux mécanismes qu’il convient de mettre en œuvre en vue d’optimiser la production. Il reste que la société dans son ensemble et chacun de ses membres en particulier sont requis par un dispositif global d’incitation et d’encadrement (éducation, formation, recherche mais aussi santé, culture, information, communication, loi, sécurité et armée) entièrement voué à cet accroissement infini de la production. Or, cette idée d’asseoir ainsi la vie de groupes humains (et, par suite, de l’humanité entière) sur l’accroissement infinie de la production et l’accumulation perpétuelle des richesses entraîne une dégradation intime des personnes, elle aussi sans limite. Dès lors en effet qu’elle prévaut, à l’aube des Temps modernes occidentaux, l’idée de la production comme mode de détermination fondamental et de régulation des groupes humains, asservit bien évidemment les hommes à l’activité productrice de richesses. Mais il y a plus: la production comme mode de détermination fondamental bouleverse la relation des hommes à la nature, la faisant passer du mode de la correspondance et de l’équilibre, au mode de l’affrontement et de l’extorsion. Une telle corruption a pour effet d’engendrer, en même temps qu’une dégradation prolongée de la nature, une altération essentielle des hommes touchant leur langage et leur façon d’être, qui se trouvent dès lors dépoétisés, transposés et évalués désormais sur l’échelle de la quantité de richesses produites et de biens consommés, autrement dit pris en compte à travers le prisme riches/pauvres, sociétés développées/sociétés sous-développées. Cette transfiguration s’apparente, sans conteste à une défiguration, à un avilissement. Enfin, la production comme mode de détermination fondamental de l’existence des groupes humains, comporte nécessairement l’idée de la priorité absolue accordée à la croissance comme moteur du «développement» des sociétés. Au vu de cette considération, la notion de «développement durable» apparaît à la fois antinomique et inepte, cherchant à masquer, mais ne parvenant qu’à trahir l’impossibilité foncière des sociétés modernes de se défaire par elles-mêmes du productivisme. Elle ne trouve, en réalité, sa justification que dans le seul impératif, devant la menace des déséquilibres engendrés par le productivisme, de tenir un discours lénifiant et enjôleur. Ce qui dure, seul l’équilibre l’instaure. Quant au développement, il est le prodige et la rente du déséquilibre qu’à son tour il génère. Ce rapport qu’entretient la beauté, non pas simplement à la vie, mais bien à l’acquiescement à la vie, peut, à notre époque tant artificielle, (tant artificieuse aussi bien) sembler, ou énigmatique, ou incongru, ou pis encore, un simple truisme, mais alors sûrement par méprise, en raison seulement du fait qu’on serait confondu-perdu avec son temps, c’est-à-dire éloigné à la fois du sentiment de la vie et du sentiment de la beauté. Or, ce rapport, qui est fondamental, c’est lui qu’il s’agit aujourd’hui, à tout prix, de rédécouvrir. Urgence à la hauteur de l’enjeu, à savoir: l’incapacité imminente où l’on serait, en regard d’un totalitarisme qui s’annonce sous le vocable de «mondialisation», face à l’empire absolu du mode productiviste de détermination et de régulation des groupes humains, l’incapacité donc où l’on serait, non pas de vivre, mais de seulement même supposer le rapport qu’entretient l’assentiment à la vie avec la beauté. Néanmoins, réfléchir à ce rapport est-ce probablement la façon la plus appropriée aujourd’hui d’appeler à redécouvrir cela qui a déjà eu lieu et dont le lieu resplendit de mille éclats du déploiement de la parole qui danse avec le monde, avant que les voix qui sont siennes (la parole sauvage) ne soient, brutalement et bruyamment, recouvertes par l’invasion, puis par l’envahissement du mode productiviste d’installation sur terre, accouchant d’un monde sans «habitant», peuplé d’occupants diversement occupés et inoccupés; peut-être aussi, réfléchir à ce rapport, est-ce la façon la plus assurée aujourd’hui, justement, de garder présente l’idée du mode d’existence qu’il implique comme puissante source d’inspiration en vue de la nécessaire et prochaine réforme de nos modes de vie; réfléchir à ce rapport, enfin, probablement est-ce la façon la plus résolue de se mettre, sans plus tarder, en chemin vers l’appel, de sorte de l’éprouver en effet comme appel à vivre dans la beauté.
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