Potomitan

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Annou voyé kreyòl douvan douvan

Umar Timol

nulle mémoire dans l’encre de ton souffle
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
qu’on ne peut dénuer
ces rivages encore emplis
de vos ombres
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
que les courbes de nos rêves
ne rejoindront jamais
l’élan des vents premiers
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
que les insolences
de ta peau
ne sont que
des parchemins lapidés
nulle mémoire dans l’encre de ton souffle
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
que ce n’est pas une
étreinte
qui blesse les vacarmes des os
mais tes lèvres
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
que la matière n’est
pas l’œuvre d’un quelconque orfèvre
mais de tes déferlantes
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
qu’on ne peut remuer
les vestiges de
sanglots pas encore assagis
nulle mémoire dans l’encre de ton souffle
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
qu’au bout d’un soleil
larvé de couleurs
se trouve
cette caravane – vos yeux –
pourfendeuse d’absence
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
que les fêlures
qui transparaissent
dans la pierre
sont les énoncés de tes soifs
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
que les rouages
d’un ciel trop rouge sang
déclament
votre verbe qui se louvoie
dans les sillons graveleux
de nos peurs
nulle mémoire dans l’encre de ton souffle
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
que la misère d’un corps
trop décharné – le nôtre –
est le possible recueil
de votre compassion
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
que la course échevelée
d’une éclipse
n’a qu’un objet
parfaire la substance
de nos défaites
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
que nos mains
à l’orée de ta chair
convergent vers un même lieu
celui de notre dissolution
ils sont partis trop tôt
ils ont oublié
ils ont oublié
il ont oublié qu’il n’est
nulle mémoire dans l’encre de votre souffle

Viré monté