Potomitan

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La savane de Redoute

Jocelyne Mouriesse

Psidium guyava

Goyaves vertes. Photo F.Palli.

J’ai couru dans la savane
Dans un kaka bèf frais
J’ai retrouvé mes pieds d’enfant
C’était un bon début !

J’ai ri à gorge déployée
Les merises dans ma poche ont souri à l’Eden
Sur mes lèvres grisées les tamarins n’étaient qu’azur
Ils se mordaient les graines pour ne pas s’esclaffer

Mes pieds ont trouvé une flaque à leur pointure
Elle m’a donné l’obole
Des têtards s’entêtaient
Dans l’eau flasque les yeux écarquillés
Des nageoires ont poussé
Elles frétillaient dans mon regard

J’ai sauté mes deux pieds poursuivant la savane
Dévalé l’enfance de pentes insouciantes
Makayé les fruits défendus
Loin des barbelés du présent

L’air flottait futile
Le futile essentiel

Le fromager trônait à sa place éternelle,
À ses pieds j’ai rêvé
Sur l’écorce des tipis s’étalaient
Les femmes parties à la chasse au bison
Les hommes et les enfants fredonnaient
Les cow-boys étaient en prison
Les zombies encore endormis

L’air flottait futile
Le futile essentiel

J’ai retrouvé la cabane
Entre les racines accroupie
Surpris nos rires d’enfant contre un vieux flamboyant
Ses lèvres débitaient les amours bossues et flétries
De bien sanglants combats de coqs
Rouge à lèvres baisers en volées
Oeil gloussant sous glaives effarouchés
Coagule la robe et ses boutons damnés…

La goyave mûre rêve à la goyave verte qui rêve de la fleur
Des lianes carnassières
J’ai saisi le courroux
Elles me poursuivaient de leurs doutes
Sur mes pas ne surtout pas se retourner
De peur qu’elles me rattrapent avec le temps perdu...

Le goût de l’herbe perlait de sueur
Le sang tambourinait des poings
Les ongles semeurs d’incendies
De profil cuisses barbelées
Trèfles fous halliers dans l’écheveau renoué

«Il faut rentrer
Fok mwen benyen
Manman va crier...»

boule

 Viré monté