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A propos de Maurice Barrès

José Le Moigne

A propos de Maurice Barrès

Je m’étais jusqu’à ce jour dispensé de lire Maurice Barrès et j’aurais certainement continué si je n’avais trouvé, ici, en Belgique, parvenu par je ne sais quel chemin à ma bibliothèque, ce monument du rêve national français qu’est Colette Bauboche. Tout d’abord, je dois le dire, ce fut pour moi un plaisir extrême que de lire ce français impeccable. On n’est plus en 1908 ce qui relativise forcément la lecture mais j’ai été étonné de constater que Barrès ne parle de revanche qu’une seule fois (page 181). Pour le reste, si l’histoire de Frédéric Asmus, professeur Prussien francophile et de Colette, petite Lorraine toute vouée à la mémoire des soldats français morts en 1870, est impossible, c’est que, à tort ou a raison, Barrès le dit d'une manière qui me semble explicite, il est trop tôt encore pour que l’on puisse parler de réconciliation. Ce livre n’est certes pas un chef d’œuvre mais il m’a surpris par son humanité alors que j'y cherchais, instruit par mes préjugés, la marque d’un nationalisme dur. On ne lit jamais assez.

Dans le même jet, je voudrai répondre à un ami qui a bretonnisé son nom et qui m’écrit qu’il est BRETON, oui avec des majuscules, et qu’en tant que Breton lui seul a vocation à parler, dans un poème je précise, des épaves de notre Marine Nationale, que le sentiment d’appartenance est bien plus complexe que cela. Jean-Yves, ais-je envie de lui dire, lorsque je suis né, la Martinique était une colonie française, deux ans encore et elle était devenu un département français, une année de plus et j’étais rejeté par ma famille bretonne. Il est impossible de dire aujourd’hui que de tels évènements ne s’inscrivent pas dans la conscience d’un tout petit enfant. Ceci pour dire que je n’accepte pas le mythe des Bretons qui seraient plus accueillants que les autres. Si je me dis depuis toujours  breton (avec des minuscules), je le dois certes à ma filiation mais aussi à ma volonté. Je ne devrais pas avoir à revenir là-dessus.

On me demande aussi brutalement, on me somme même, de dire ce que je pense de l’excision. Qui me connait, qui m’a lu, sait ce que je pense de cette horreur; mais serait-ce parce que je suis noir que je devrai m’exprimer sur Facebook dans je ne sais quelle démarche d’expiation? Non, désolé cher ami, je ne me dérobe pas, je veux bien en parler avec toi  si nous rencontrons un jour, mais je fuis comme la peste la démagogie qui fleurit sur les réseaux sociaux. Si je parle, c’est parce que je l’ai choisi. Je n’en dirai pas plus.

©José Le Moigne
16 février 2014    

 Viré monté