Potomitan

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PISTES

à mon père

«Poète troubleur, au cœur exultant:
C’est un chant plus fier que chacun attend ! …»
(Luc Grimard)

Saint-John Kauss

par l’aine de tes yeux --- domaine de l’éclair       au cru d’une seule langue / alphabet qui redonne corps à l’innocence jusqu’au faîte de la primale tendresse et sans bornes de l’hirondelle née d’elle-même

 

jusqu’aux points d’appui de l’athlète et à la limite des hoquets de vers
du poète déchiffrant l’écriture d’un condamné à recopier les plus belles
lettres du phonème

 

je m’acquitte de tous les fûts de la savane – dans le brut d’être de l’inconnu du chant que l’on se dicte d’une main              palmes de mots drus
vers le seuil du poème

 

et je te reconnais --- aveugle des mots de passe apprivoisés dans la folie des feuilles et glyphes des dieux et des hommes en fièvres jusqu’au silence de la chair

 

herbe folle au bond de l’orignal à plat ventre sur le mât des vergers
                     vasque aux cailloux de l’aïeul dans l’infrangible espoir d’être deux pour la renommer

 

plaies / plaisirs en fraude de l’abeille par embardées de fleurs dans les hardes du poète           houlements de forges allongées autour de l’archet
          fêtes brutes des dieux dans un caillot de feu au plus près de l’exil

 

l’amulette / les rites / le dieu de la fête congestionnée entre les grimoires
et le chiffre nu de l’or / son poids / son interdit dans les scellés de papiers peints

 

en guet / en guerre contre le chant de mon amour pour le projet de
l’arbre divin dans la mêlée des serres              puits d’étoiles dans les versets / les très jeunes sigles des deux mains            mottons d’étincelles affranchies sous chaque forme de syllabes

 

glaive et gloire de vertige aux sueurs de la larve handicapée dans la grotte
du féminin contre son gré              anses à tâtons entre les deux épaules –
nuque et reins de la femme du poète qui s’arque dans le maquis de son
corps / piste des idoles

 

au plus large de la mer              né d’immortelles molécules               rut de la chair ancestrale sollicitée dans l’atoll des grandes eaux en esquif d’une belle cicatrice ---- je déraisonne

 

tambour des cinq pennes qui murmure le chant de l’Ancêtre       par
touffes sures / ramées de mots              parle du cassis et gui dans la langue de l’octave               au profit du plus jeune matin d’octobre

 

dit des mains de ma première fille et dans l’angle de sa peau
             par fils et filles du soldat déchiré entre l’ergot et le pavot              épelle le nom de la dernière née du poète par grappes de lettres lâchées jusqu’aux étoiles

 

et cette autre griffée de l’enfance en incarnats d’échos prolongés sur tous textes anonymes              plaie / plaisir de rebondir jusqu’aux brouillons des pièges d’oiseaux ------ jusqu’au bout des échos de l’amande amère / de la fable et de la femme bipolaire dans l’aire et dans le vent

 

Montréal, 21 mai 2004

 

Viré monté