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Joelle CONSTANT

ou

la prophétie d'Éphèse

 

par Saint-John Kauss

 

Page web de Joelle Constant

Joelle Constant

Saint-Jean l’Évangéliste, Archevêque d’Éphèse d’alors, aurait aussi annoncé la « naissance » d’un poète loin des terres saintes du Moyen-Orient. D’aucuns ne penseraient guère à Haïti, cette maudite terre à problèmes. Il semblerait que Dieu choisisse toujours des terres pleines d’iniquités pour exercer son pouvoir ou tracer un exemple. Le Jardin d’Eden, terre florissante, puis maudite, où les Alliances édénique et adamique ont été scellées; le Fils de Dieu, Israël, le clan des Élus, le peuple le plus têtu de la terre; les Alliances noétique, abrahamique, mosaïque et palestinienne, pour ne citer que celles-là, nous donnent une idée d’un Dieu révisionniste qui aime tant ses sujets et qui fait toujours grâce. Mais les bibliophiles et philosophes feignent d’oublier Haïti; ils doivent aussi se pencher sur le cas notre Ayiti-Quisqueya-Bohio, la Mecque de la magie noire, en tant que terre de manquements et de frivolités. Oui, le dernier laboratoire de Dieu (et des hommes) à ciel ouvert a enfin synthétisé une constante, un facteur de multiplication des cœurs, une protéine de rapprochement des produits, mais des enfants de Dieu.

Née à Camp-Perrin (Haïti), Joelle Constant est diplômée de l’École Normale d’Institutrices et de l’École de Secrétariat Christ the King. Établie à Montréal depuis 1989, elle a complété un cycle d’études pastorales et théologiques à l’Institut biblique nazaréen du Québec (IBNQ). Elle a ensuite poursuivi ses études aux Hautes Études Commerciales (HEC), à l’UQAM et à l’Institut des Banquiers Canadiens (IBC), où elle a obtenu un Brevet en gestion bancaire, un diplôme en administration générale, un autre en finance personnelle et un certificat en planification financière. De profession, Conseillère financière et Pastoresse. Aujourd’hui, elle nous révèle une autre facette d’elle jusqu’ici ignorée en nous présentant, coup sur coup, deux recueils de poèmes respectivement intitulés: Prières & Réflexions et Camp-Perrin Réminiscences. Trois autres recueils inédits en attente d’être publiquement lus: Amour et délices; Poème à deux voix; Sans dieux et sans idoles (en collaboration).

Il n’existe dans la littérature haïtienne que quelques poèmes ou quelques vers d’inspiration chrétienne que l’on parque d’ailleurs loin des chansons patriotiques ou communistes. La phénoménologie de l’Esprit divin serait absente chez presque tous les poètes, car ceux-là que l’on nomma gardes des mots de toute création, seraient pour la plupart non croyants étant jeunes pour se détacher tôt ou tard d’une folie proche de la toxicomanie qu’est l’athéisme. Maquillant les vers de propositions érotiques et guettant les «fleurs du mal» et de l’oubli, il n’y aurait pas de place pour un Dieu caché.

D’ailleurs le peuple haïtien, sans culture et sans commerce authentique avec le Seigneur, sortant d’une guerre d’Indépendance démoniaque en tous genres, que déduire sinon la gloire des Héros et la chute de l’empire napoléonien aux Antilles. Pourtant, Dieu y était également. Il a laissé faire, comme à l’accoutumé, pour mieux punir les uns et récompenser les autres au-delà de leur abominable souffrance.

J’ai lu, jeune, le poète Louis Borno, et j’avais compris, de par cette lecture, qu’un homme politique pouvait être chrétien et poète. Sa dévotion envers Marie, la mère de Jésus, à travers une poésie du non-lieu, n’a point d’égale.

Et j’ai lu plus tard Christian Bobin et Pierre Jean-Jouve, et j’ai noté que les psalmistes ainsi que les évangélistes ne sont pas vraiment les seuls poètes de l’absolu. Et depuis qu’il m’a été possible de rencontrer le Pasteur Joelle Constant dans son église assise à Laval (Québec), j’ai aussi compris que le compromis des alliances avec Dieu existe encore. Il ne faut que prier. Prier pour un quotidien sans tracasseries effroyables, louer le Divin pour son grand Amour des humains.

«Te parler, c’est te connaître mieux
T’adresser, c’est se rapprocher de toi
Te louer, c’est te plaire
T’adorer, c’est te proclamer Seigneur

Te prier, c’est devenir ton allié
Te contempler, c’est te déclarer notre amour
Te rendre grâce, c’est se montrer reconnaissant
Te mettre en poésie, c’est entrer dans ton intimité

Te psalmodier, c’est t’écrire des poèmes
Te chanter, c’est vivre avec toi un moment de joie
Te bénir, c’est vanter tes mérites
Te choisir, c’est opter pour la vie éternelle.
»

                                                            (Exaltation, Prières et Réflexions)

Et s’il n’y avait vraiment que cela. Car il y a aussi chez cette femme l’amour de la Patrie et de son patelin Camp-Perrin, le respect des ancêtres, surtout de Grand-mère Esther. Ses amitiés pour son père feu Joseph Constant et ses deux frères, sont sans bornes. Et sa douce mère-mulâtresse qu’on dirait perdue dans cette marée humaine qu’est Haïti d’aujourd’hui. Et cette paysanne, Dam-Sara, sa sœur exploitée dans les cantons reculés du pays:

«… Femme, ma sœur, mon amie,
Ma mère, mon exemple Sois fière et altière
Prends ce qui t’appartient
Et que jamais, plus jamais
Tu ne marches la tête baissée!
»

                                                                                     (Dam-Sara, Camp-Perrin-Réminiscences)

J’ai arpenté cette famille ancienne de Camp-Perrin, descendante des Daguillard, des Perrin et des Constant, des fondateurs de cette mini-patrie, qui fait parler et jaser les inconnus, que jalousent d’ailleurs les familles sans passé, nucléées, recréées, sans liens secrets avec la latitude des grands hommes de province. Et pourtant, ils sont comme nous. Ils pleurent Haïti, repensent le pays, projettent l’Éternité pour notre patrie. Conjuguant au futur tout poème dans toute conversation, ils ne veulent point faire le vide. De ses complaintes, lisons cet extrait du poète:

«…Tu t’es approprié ce bouquet
Que tu as su tenir entre tes doigts
Mais tu méprisas le pot
Contenant l’eau indispensable
À sa survie
Et voilà : Les fleurs ont fané
»

                                                            (Et voilà!, Camp-Perrin-Réminiscences)

Mais laissons enfin la Parole au lecteur….

 

Saint-John KAUSS
Laval, 21novembre 2011

 

Bibliographie

  • Joelle CONSTANT: Prières et Réflexions, Montréal, Éditions Conel, novembre 2011.
     
  • Joelle CONSTANT: Camp-Perrin-Réminiscences, Montréal, Éditions Conel, décembre 2011

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