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Cahier de l’île noire (extrait 2) |
si Pablo était vivant
il nous chanterait l’une de ses chansons désespérées
il nous écrirait le poème face à la vie
ses saintes écritures à l’homme de la rue et des usines
ses longs poèmes d’amour aux femmes
qui n’ont jamais rien compris
de Neruda
si Pablo Neruda était présent
il nous forcerait à ramasser le soleil
à avoir le visage fatigué après le 12 janvier
comme moi à rechercher l’infini
à embouteiller l’eau de pluie
et à aimer des femmes aux yeux grands
tant de fois en libations d’une étoile
il nous dirait Pablo
que l’on est tous Chiliens
qu’Haïti est une vaste librairie rampant sur la mer
que ses filles et ses femmes sont belles à faire souffrir
que ses odes élémentaires n’ont pas de patrie
qu’elles sont de la mer et portent bien son nom
il nous dirait Neruda
d’allumer la chandelle
et de commencer la veillée
à veiller sur les grains de maïs
et sur nos enfants si petits
sur nos bambins et nos ports d’eau douce
sur tout ce qui bouge émerveillé dans les ténèbres
notre île lapidée par cyclones et séisme du dernier quart d’heure
notre île dilapidée de tant de rêves et de jalons funéraires
fille aînée de l’Afrique
qui vit dans le chant des poètes
ô terre des mots libres et fragiles
mon pays s’est effondré en temps et lieu
de l’inédit
mon visage et mon cœur sont fatigués de tant de fleurs
de tant de roses cataleptiques
de l’amant en attente
de l’aimée d’elle plus fraîiche
aux habits neufs de sommeil
elle dit
de mon île infatigable
des feuilles à mâcher dans les limbes
mon amante au rire spontané
squelette
au grand mât
qui donne à chaque pas de l’homme noir
la verticale d’un sourire marin
et à chaque femme des rues du monde
l’impossible amour
si René Depestre était présent
il nous forcerait à supposer le temps
d’un animal marin
à résister contre séisme et châtiments
de tout poète condamné à manger ses mots
si Alexis était vivant
il nous inventerait l’accolade des marchands de pain
le jeu de mots des jeunes mariés
les dures poignées de main des combattants
l’océan non la mer vaste des euphories
si Roumain était en vie
il nous rafraîchirait d’eau des sources
des forêets et des montagnes pleines de petits ortolans
il nous dirait qu’il n’a pu vivre que par le souffle d’une femme
et la multiplication des enfants
si Borges et Robert Graves n’étaient pas morts
s ‘ils n’étaient pas deux aveugles dans la foulée
des arbres
ils nous forceraient à traverser la lumière
à se mettre debout au cœur des ombres
à habiter la présence d’un pays si lointain
si petit mais si avide de poèmes
Haïti ou mon île aux poètes
ma terre d’intempéries et de gens désormais tristes
ô ma vague infinie
mon étendue si mince
ma Majesté
j’ai ouvert ce livre
et je le ferme à ta demande
versets pesants
rimes abandonnées au monde des yeux las
litanies d’un homme mort devant ses ouvrages
sauf lui
le poète qui pleure sa demeure et son encrier si Pablo était vivant
il nous chanterait l’une de ses chansons désespérées
il nous écrirait le poème face à la vie
ses saintes écritures à l’homme de la rue et des usines
ses longs poèmes d’amour aux femmes
qui n’ont jamais rien compris
de Neruda
si Pablo Neruda était présent
il nous forcerait à ramasser le soleil
à avoir le visage fatigué après le 12 janvier
à rechercher l’infini
à embouteiller l’eau de pluie
et à aimer des femmes aux yeux grands
il nous dirait
Pablo
que l’on est tous Chiliens
qu’Haïti est une vaste librairie rampant sur la mer
que ses filles et ses femmes sont belles à faire souffrir
que ses odes élémentaires n’ont pas de patrie
qu’elles sont de la mer et portent bien son nom
il nous dirait
Neruda
d’allumer la chandelle
et de commencer la veillée
à veiller sur les grains de mais
et sur nos enfants si petits
sur nos bambins et nos ports d’eau douce
sur tout ce qui bouge émerveillé dans les ténèbres
notre île lapidée par cyclones et séisme du dernier quart d’heure
notre île dilapidée de tant de rêves et de jalons funéraires
fille aînée de l’Afrique
qui vit dans le chant des poètes
ô terre des mots libres et fragiles
mon pays s’est effondré en temps et lieu
de l’inédit
mon visage et mon cœur sont fatigués de tant de fleurs
de tant de roses cataleptiques
de l’aimée
en attente
aux habits neufs de sommeil
de mon île infatigable
et des feuilles à mâcher dans les limbes
ô mon amante au rire spontané
squelette
au grand mât
qui donne à chaque pas de l’homme noir
la verticale d’un sourire marin
et à chaque femme des rues du monde
le légitime amour
si René Depestre était present
il nous forcerait à supposer le temps
d’un animal marin
à résister contre séisme et châtiments
de tout poète condamné à manger ses mots
si Alexis était vivant
il nous inventerait l’accolade des marchands de pain
le jeu de mots des jeunes mariés
les dures poignées de main des combattants
l’océan non la mer vaste des euphories
si Roumain était en vie
il nous rafraîchirait d’eau des sources
des forêts et des montagnes pleines de petits ortolans
il nous dirait qu’il n’a pu vivre que par le souffle d’une femme
et la multiplication des enfants
si Borges et Robert Graves n’étaient pas morts
s ‘ils n’étaient pas deux aveugles dans la foulée
des arbres
ils nous forceraient à traverser la lumière
à se mettre debout au cœur des ombres
à habiter la présence d’un pays si lointain
si petit mais si avide de poèmes
Haïti ou mon île aux poètes
ma terre d’intempéries et de gens désormais tristes
ô ma vague infinie
mon étendue si mince
ma Majesté
j’ai ouvert ce livre
et je le ferme à ta demande
versets pesants
rimes abandonnées au monde des yeux las
litanies d’un homme mort devant ses ouvrages
sauf lui
le poète qui pleure sa demeure et son encrier
Washington, NJ, 15 mars 2010
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