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Poème du 11 septembre

                                   à Réginald Crosley

«Comme tu me plairais, ô nuit! sans ces étoiles
Dont la lumière parle un langage connu!
Car je cherche le vide, et le noir, et le nu!»

                                       (Baudelaire)

Saint-John Kauss

I

capitale de la douleur et de la déception des hommes
où la souffrance a ses charmes et la liberté ses règles à suivre
ville qui file à toute allure dans la politesse des néons
dans l’éclatement des classes et dans l’aveuglement aux conquêtes
qui donc pense à la MORT et à la terreur d’un monde
basé sur la rive droite des femmes endormies et d’une reine soumise
qui se souvient de Gaza et Chatila dans toutes leurs métamorphoses
en l’honneur des fous des aveugles et des estropiés de la guerre sainte
qui ont souffert sans dire la vérité aux fleurs des dalles et des palmiers
ô Amérique mon aimée aux armures d’albâtre et de bétel
les sacrifiés et les martyrs n’ont pas le cœur facile de l’amitié

II

dans cette région de sable fin et de femmes voilées perdues dans les rues
les dieux sont partout et les mâles ont pris des garanties sans cesse
dans ces pays de terre cuite et d’hommes mêlés à l’arbitraire
les porteurs d’eau sont souvent des guerriers armés de cimeterres
et de toutes ces carafes obligatoires qui prennent la forme des chamelles
qui se souviendra de la grandeur des gestes et de l’omnipotence du solitaire
le téméraire qui a défié les balles et la rage de tous les maîtres puissants

III

homme sans destinée trahi par toute la terre qui autrefois rêvait d’orages
ô homme sans nulle étoile conspiratrice des pierres dans le désert
tes jours sont comptés et jetés au hasard d’une coalition calculée
vous avez fait trembler l’Amérique des meurtriers amateurs et de la belle étoile
vous avez franchi ô anges de la MORT la nuit des vagues aux matelots incalculés
secoué vos rancœurs sur le mât des tentes de la fraternité humaine
et au jour fixe de la malédiction et de la piraterie céleste
même le ciel avait changé de visage et les oiseaux de plumage
Satan dans sa démence récurrente aurait espéré ce funeste carnage
il jalousait à perte d’humanité ce qui fut commandité par l’Orient
ô soupirs d’ombres qui disparaissaient comme une bague dans le vent
sautant par-dessus bord comme des orties sans équivoque
qui vous arrachera de cette MORT brutale aux mains de la vermine
ô laboureurs fertiles dictés à la dévotion constante des astres de la nuit
et toi guerrier de l’Ordre de la belle espèce qui porte couronne avec éclats
sans compassion pour des milliers d’enfants rétifs et d’oiseaux humides
ne faut-il pas tout abandonner jusqu’au soupçon des orchidées

IV

chameliers de la grande caravane qui partira d’ici sans bégayer
sans dire mots aux sentinelles du sable et de la MORT
il faudra que le ciel fasse un jour décompte des disparitions
des yeux fermés au grand jour de fête et dans leur paume
des femmes si belles qu’elles ne s’en doutaient même pas
de la nausée et de la laideur des attentats qui font gémir les fleurs
ô veilleurs des mosquées aux tempes grillées de mythes et de douleur
vous êtes plus fragiles que la bécasse affolée que le chameau désespéré
que la pierre encensée d’une rivière ottomane qui a besoin de libertés
ô femmes de bédouins fils berbères et fillettes kabyles aux mains sentimentales
de vos yeux légers qui changent à chaque pleine lune sans défaillances
prenez garde de ne plus aimer cette aire du côté de l’Atlantique
car la terre n’est qu’une icône héritée de Dieu que nous n’avons pas choisie

Pierrefonds, 17 mars 2003
(poème inachevé)

Viré monté