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En Haïti certains apprennent à porter des prothèses, d'autres à en fabriquer


2. avril 2010
Source: Le Nouvelliste

 

 

 

 

 

 

Source de la photo Le Nouvelliste.

Un défi à relever?

Elle s'arrête, intriguée d'être debout. Tente un pas, puis deux. Mais le geste est maladroit et Stéphie s'agrippe mordicus à ses béquilles. "s", lui lance sa mère, essayant d'expliquer à la petite Haïtienne de trois ans comment se servir de sa nouvelle prothèse.

"Elle n'a pas assez de force dans l'autre jambe", commente Fabianna Pierre, la maman de la fillette qui a été amputée au dessus du genou droit après le séisme du 12 janvier.

"Koubi! Koubi, pou-ou ka maché" (replie le pied pour mieux marcher), répète la jeune mère. En vain... Stéphie préfère aller s'assoir à cloche-pied.

"C'est vraiment difficile, ça fait trois jours qu'elle a cette prothèse, mais elle n'y arrive pas", dit Mme Pierre. "Je me demande vraiment comment ma fille pourra aller à l'école".

Entre 2.000 et 4.000 Haïtiens auraient perdu un membre lors de la catastrophe du 12 janvier, selon le décompte d'Handicap International. "Dont un tiers d'enfants", précise Thomas Leblanc, orthoprothésiste dans un centre de rééducation ouvert par l'ONG dans le quartier marchand de Port-de-Prince, une partie de la capitale particulièrement dévastée par le tremblement de terre qui a fait au moins 220.000 morts.

Mais le bilan pourrait en fait s'avérer plus important, aucun décompte n'ayant été réalisé lors de la première vague d'amputations, durant les trois premiers jours qui ont suivi le séisme, souligne Silvia Fommella, porte-parole de Handicap International.

Un rapport plus exhaustif est d'ailleurs élaboré par le ministère de la Santé haïtien et devrait être terminé sous peu, ajoute-t-elle.

Face à l'ampleur des amputations, trois centres de fabrication de prothèses et de rééducation ont été ouverts dans le pays le plus pauvre des Amériques qui ne disposait avant le séisme que d'une seule structure du genre.

Perceuses, tournevis, tubes métalliques, chaussures, pots de graisse, les établis de l'atelier ouvert au début du mois de mars par l'organisation française sont jonchés d'objets hétéroclites.

"On fabrique entre six et sept prothèses par jour", soit près d'une quarantaine par semaine, dit Albert Saint-Thomas, employé du centre de Handicap International dont la salle d'attente ne désemplit pas. L'ONG a à sa charge environ 300 patients.

"Les prothèses provisoires que l'on fait actuellement sont fabriquées beaucoup plus rapidement (que des prothèses définitives) et permettent de mieux répondre à l'urgence et d'aider les patients à se remettre debout", indique Thomas Leblanc.

"Un adulte porte deux ou trois prothèses temporaires, un enfant deux, avant d'avoir une prothèse définitive", au bout de plusieurs mois, poursuit Mme Fommella.

Un véritable suivi à long terme est donc indispensable et va nécessiter la formation de nombreux Haïtiens, pour remplacer les expatriés dépêchés.

"Je dois perdre l'illusion que j'avais quand je suis venu hier recevoir ma prothèse: je pensais que je repartirais le soir à Petit-Goâve (à l'ouest de la capitale) en marchant", confie Brice Canelin, 28 ans, amputé de la jambe gauche.

Séminariste, il a été piégé dans son lieu d'étude lors de la secousse. Ce n'est qu'au bout d'une quinzaine d'heures qu'un voisin a entendu ses gémissements et l'a dégagé des décombres. Trois autres étudiants ont pour leur part péri, un autre a été amputé du bras.

"Je marche sans les béquilles, mais ce n'est pas encore normal, je dois persister dans l'apprentissage", dit-il, grand sourire.

Avant la catastrophe, il nageait régulièrement et faisait de la gym "pour ne pas prendre le gros ventre". "Je vais continuer à faire des dips et des barres fixes", assure-t-il.

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