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Le collectif des poètes-slameurs de Montréal Dix mille sous le pont Publié le 2022-03-06 | Le Nouvelliste |
En regardant le vidéo-clip slam «Dix mille sous le pont», il m'est venu à l'esprit cette belle déclaration du théoricien bulgare Todorov, qui affirmait que la littérature est la première des sciences sociales: elle nous permet de mieux saisir, de mieux comprendre, de mieux appréhender le réel – un réel infernal, dépressif, insupportable, inhumain. Un réel qui nous échappe parfois, par rapport à nos approches, notre compréhension des êtres et des choses.
A ce sujet, le collectif des poètes-slameurs de Montréal (Canada), composé de l'acteur Marc Emmanuel Dorcin, du journaliste John Wesley Delva, du comédien David Mézy, du comédien-compositeur Psy-M ont tapé très fort, en indexant dans ce texte enregistré en 2021 au studio «Le son» avec la collaboration du beat maker Clay beat la problématique de l'exode à travers des vers simples, directs et surtout symboliques. Ici, les mots nous parlent, nous interrogent, nous blessent jusqu'aux os, nous invitant même à une prise de conscience généralisée.
Revendiquer, dénoncer, tels sont les maîtres-mots, les mots-phares, les mots lumières, les mots sentinelles de ces poètes-slameurs qui ne sont pas restés indifférents aux problèmes existentialistes, aux malheurs qui accablent de plus en plus notre terre d'origine: Haïti.
Face aux actes de barbarie dont sont victimes nos compatriotes en quête d'une vie radieuse, au Chili, au Brésil, aux U.S.A (Texas), ils sont montés au créneau pour voler à leur secours et crier haut et fort leur colère, leur indignation.
Aidé par le chanteur sénégalais Bo-diaw, les slameurs, que ce soit en créole ou en français, ont interprété avec une rare émotion chaque paragraphe de ce texte poignant et véridique:
«Doulè nou chavire fas ba
nou pèdi mounite nou nan chache chanje paj lavi
atò menm pwent tete goch nou pa ka gade solèy
wi nou lèd anpil...»
(Psy-M)
«Dix mille sous le pont» traduit en un mot le cri de ces milliers d'enfants et adultes vivant dans l'enfer des bateys chez nos voisins dominicains, depuis le siècle dernier, sans qu'il y ait une réponse définitive. Il est à se demander où est passé la Charte de la Déclaration des droits de l'homme stipulant que tous les hommes naissent libres et égaux.
«Dix mille sous le pont», c'est aussi le cri déséspéré des boats-peoples, des réfugiés, des laissés-pour-compte, des sans-papiers un peu partout dans le monde que ce soit en France, en Afghanistan, au Maroc… «Dix mille sous le pont» c'est le cri aujourd'hui de ces Ukrainiens et Ukrainiennes décimés, bombardés par l'armée russe de Vladimir Poutine à la face du monde.
«Dix mille sous le pont», c'est le cri de tous ceux et toutes celles qui rêvent de pain et de lumière et qui osent inventer l'avenir, pour reprendre les mots du président du Burkina Faso, Thomas Sankara de regrettée mémoire.
«Dix mille sous le pont
coincés à la limite du rêve
assommé par le bruit de la corde lancée depuis des chevaux
échoués à la porte de l'espoir piétiné sous des sabots».
(David Mezy) .
Le vidéo-clip de «Dix mille sous le pont», d'une durée de de 4'43 secondes disponible sur la chaine YouTube a été tourné essentiellemet à Montréal (Canada) sous la supervision du réalisateur Pierre Mackenson.
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