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Magdala
et
Marques déposées

Jean Durosier DESRIVIERES

 

 

 

 

 

Magdala et Marques déposées

Deux pièces courtes et à succès de Jean-Durosier Desrivières, créées en mai 2012, dans le cadre des Petites Comédies de l'Eau, par la Compagnie de la Gare, au Festival de l'Oh.

Magdala:
Une soeur et son jeune frère, presque deux enfants... désemparés. Les jeux ont fait place à la crainte. La mère a disparu, mais elle est encore là comme la rivière apaisée...

Marques déposées:
Entre la femme et l'homme, un dialogue poétique s'instaure. L'aimée va transcender les douleurs de l'eau et ses traces jusqu'à la baie de Port-au-Prince par une métamorphose inattendue...

«Avant-jeu», extrait:

"La fin de la saga des mauvaises saisons de pluies et des ouragans en Haïti, comme dans toute la Caraïbe, n’est pas pour demain. Qu’ils soient prévenus des intempéries ou non, les habitants de ces espaces géographiques sont condamnés à les subir fatalement et de façon cyclique. Néanmoins, il est aisé d’admettre que les victimes seraient sans doute moins nombreuses sur une petite presqu’île telle la république haïtienne – magique et mystérieuse ! disent les esprits malins – s’il y avait une politique de protection civile sérieuse, même dépourvue de moyens logistiques nécessaires.


Entre la naïveté d’une grande partie de la population, qui s’en remet d’ailleurs à toutes les divinités imaginables et inimaginables, et l’incompétence, voire l’inexistence de l’Etat, il y a quelques citoyens qui sont réellement conscients d’un écosystème à préserver et des situations catastrophiques (ou post-catastrophiques) régulières, de tous ordres, à gérer. Mais que peut ce petit groupe d’esprits éclairés face à la dégradation de l’environnement qui va crescendo et la démission citoyenne et civile qui s’érige en règle?"

Version bilingue – créole-français – disponible sur : www.leseditionsdelagare.com

Extraits

La jeune fille, assise sur un seau vide, inversé, contemple le ciel, au loin… Le garçon, à quelques pas d’elle, un seau vide à ses pieds, fait des gestes enfantins, tantôt avec ses mains, tantôt avec sa tête et son visage: il n’a pas l’air à l’aise avec son corps; son regard paraît à la fois fuyant et intériorisé. Au bout de son moment de contemplation, elle s’adresse au garçon sans se retourner vers lui, continuant à regarder au loin…

La jeune fille : Regarde petit frère. Il a la forme d’un cheval celui-là. On dirait qu’il trotte pour aller retrouver le troupeau qui commence à se réunir au-dessus de la montagne déboisée là-bas. Tu vois? Il commence à se transformer au fur et à mesure en un vrai troupeau tout noir là-bas… Tu t’imagines: il faisait tout beau tout à l’heure, et maintenant plus de soleil… Le troupeau dissimule tous les rayons.

Le garçon : Ce sont des monstres.

La jeune fille : Ils te font peur?

Le garçon : Moi, non ! Mais ce sont des monstres.

La jeune fille : Ce sont de simples nuages qui en font à leur tête… (Pause) Regarde un petit groupe de l’autre côté… On dirait des anges… Ils se dirigent tous vers le troupeau…

Le garçon : Ce sont des monstres, ce ne sont pas des anges.

La jeune fille : Tu vois des monstres partout, toi!

Le garçon : En tout cas, ce n’est pas un troupeau… (Pause) C’est comme un gros ballon tout noir qui se gonfle d’eau bien sale et qui va s’éclater, et qui va nous embêter comme à chaque fois…

Magdala ou Les débordements, Version bilingue, Ed. de la Gare, Vitry-sur-Seine, 2012, p. 15-19.

boule

 Viré monté