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Obrillant Damus, essayiste et chercheur haïtien,
Le Nouvelliste | Publié le 20 mars 2014 Obrillant Damus a fait ses études universitaires à la Faculté de linguistique appliquée de Port-au-Prince avant de s'orienter vers des études de master , de doctorat et de postdoctorat. Il enseigne actuellement à l'Université d'État d'Haïti et à l'Université Quisquéya. Connu pour sa fougue et sa rigueur, Obrillant Damus se fait aimer par ses étudiants. Le Nouvelliste lui demande de parler de sa trajectoire d'universitaire. |
Dominique Batraville: Obrillant Damus, universitaire et chercheur haïtien. Pouvez-vous dresser votre parcours?
Obrillant Damus: Je suis né à Arnoux, une communauté rurale haïtienne. J'ai suivi mon premier cursus universitaire dans le domaine des sciences du langage au sein de la Faculté de linguistique appliquée (Université d’État d’Haïti). La Fédération des étudiants universitaires d’Haïti m'a décerné un certificat d’excellence pour avoir été lauréat au concours d’admission organisé en 2001 par cette faculté. Ce succès m'a, par ailleurs, permis de bénéficier d’une bourse locale du gouvernement français durant mes quatre années d’études (2001-2005).
J'ai reçu en juin 2005 une lettre élogieuse de M. Wilson Laleau (ancien vice-recteur aux affaires académiques). Il m'y a informé que le conseil exécutif de l'Université d'État d'Haïti s'était engagé à faire figurer mon nom au Tableau d’honneur de l’Université dÉtat d’Haïti, et à me verser des allocations mensuelles.
En 2006, j'ai bénéficié d’une bourse de maîtrise humanités, mention sciences de l'éducation, du gouvernement français à l'Université des Antilles et de La Guyane (UAG). Les démarches de l'ancien doyen de la faculté des lettres et sciences humaines de l’UAG (pôle de la Martinique), Monsieur Pascal Saffache, m'ont permis d’obtenir une bourse de master deuxième année auprès de l’ambassade de France en Haïti. J'ai préparé ce diplôme à l’Université de Paris 8. Porté sur un sujet qui relève de l’ethnologie ou de l’anthropologie médicale, ce mémoire m'a valu d’être primé en 2008 par le Cancéropôle Île-de-France. Ce prix de master en sciences humaines et sociales SHS (5 000 euros) m'a été remis par le professeur François Sigaux, directeur scientifique du Cancéropôle Île-de-France. «La qualité de lauréat signale à la communauté scientifique le potentiel d’excellence de son titulaire pour la recherche en sciences humaines et sociales sur le cancer.» L'argent que j'avais reçu a été investi dans ma thèse de doctorat, qui portait sur les rapports entre le cancer et la solidarité (solidarité et cancer en Haïti, étude menée auprès des malades du cancer de la prostate). Cette thèse a été soutenue le 11 décembre 2011 à l'Université de Paris 8.
Le 20 mars 2008, j'ai obtenu le deuxième prix d'un concours littéraire réalisé par l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) (Sujet du concours: ma rencontre avec la langue française). On m'a remis ce prix à l’occasion de la célébration de la Journée mondiale de la francophonie en présence de Son Excellence Monsieur Abdou Diouf, secrétaire général de l’Organisation internationale de la francophonie. L'ex-président de la République française, Son Excellence Monsieur Nicolas Sarkozy, a participé ce jour-là à cette célébration mondiale. En mai 2008, j' ai accordé à la cité Internationale universitaire de Paris une interview sur ce prix ( elle a été publiée par Cité Gazette).
Après l'obtention de mon diplôme de doctorat, j'ai fait un postdoctorat sous la direction de monsieur Michel Maffesoli, professeur de sociologie en Sorbonne, membre de l'Institut universitaire de France et administrateur du Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Le titre du projet est: les savoirs des sages-femmes traditionnelles haïtiennes. Je prononcerai une conférence sur les résultats de cette recherche en mai 2014 à Montréal. Actuellement, je travaille sur plusieurs thématiques de recherche : le viol, le handicap, la naissance traditionnelle, la condition humaine....
Vous publiez aussi des essais. Expliquez-nous le sens de ces ouvrages axés sur les faits haïtiens: l'accouchement traditionnel en Haïti, le cancer de la prostate et la solidarité...
Les travaux que j'ai publiés participent d'une approche multidisciplinaire. La posture multidisciplinocentriste permet de rendre justice à la complexité de la réalité. Par contraste, la posture unidisciplinocentriste est réductionniste. Ces travaux sont intéressants dans la mesure où ils peuvent être considérés comme des œuvres de pionnier. Nous avons toujours essayé d'exprimer un point de vue original sur nos objets de recherche. C'est le point de vue d'un chercheur ou d'un scientifique social qui définit son objet de recherche.
Le sens de nos travaux est lié au fait que nous y croisons deux approches de la réalité: l'approche "éthique" (la justification savante ou théorique des faits, la construction objective du réel, l'interprétation savante d'un phénomène, le fait de regarder le réel à travers tel ou tel prisme théorique...) et l'approche "émique" (l'interprétation d'un phénomène par le sujet, le sens que celui-ci donne à son vécu, le sens que la réalité prend dans le creuset de sa subjectivité).
Vous vivez entre la France et Haïti. Pourquoi cette dispersion à travers deux pays presque diamétralement opposés?
Je suis rentré en Haïti en février 2013. Je vais souvent en France pour prononcer des conférences, animer des séminaires, rencontrer des amis, acheter des livres, donner des interviews... Je suis retourné en Haïti afin de contribuer à l'amélioration de notre système éducatif. Les voyages réguliers que j'effectue à l'étranger me permettent d'enrichir ma formation interculturelle et celle des autres.
Propos recueillis par Dominique Batraville