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26 avril 1963 – 26 avril 2013

Devoir de Mémoire

Marlène Rigaud Apollon

Devoir de mémoire, devoir de mémoire répète-t-on sans cesse ces derniers temps. Pour ceux qui ne sauraient pas de quoi on parle, il s’agit de la commémoration du cinquantième anniversaire des massacres du 26 avril 1963, suite à une apparente tentative de kidnapping des enfants du président François Duvalier, le début de milliers de massacres «pou dan griyen» qui ont suivi au cours des jours, des semaines, des mois. 

Cinquante ans déjà.  Oui, cela fait en effet cinquante ans que je porte ce lourd fardeau d’amis morts dans mon cerveau mais, je dois l’avouer, seulement vingt-sept ans depuis que j’ai trouvé le courage de m’exprimer ouvertement là-dessus. La première fois, ce fut dans mon poème en prose «N’oublions pas ceux qui sont morts» écrit en mars 1986 et publié d’abord dans l’hebdomadaire Haïti Progrès puis dans Cris de colère, Chants d’espoir (CIDIHCA, 3ème trimestre 1992, p. 39), mon premier livre de poèmes, mon premier livre tout court. 

J’en ai parlé par la suite dans d’autres poèmes publiés dans mes deux autres recueils de poésie, Si je n’avais que des regrets et surtout I Want to Dance, dédié spécialement «To the generations of our «foreign » children, born wherever we  have planted «temporary» roots while waiting to go back home. So our past doen’t become their future --- (Aux générations des nos enfants «étrangers» nés partout où nous avons planté des racines «temporaires» en attendant de retourner chez nous. . . Pour que notre passé ne devienne pas leur futur) selon les paroles d’Elie Wiesel, parce que je voulais justement qu’ils sachent un peu de ce qui s’était passé.

Aujourd’hui, moi qui jadis avais eu si peur du danger mortel que parler pouvait représenter pour moi ou pour les autres, je suis encore toute ébahie de cette merveilleuse Liberté d’Expression dont tout le monde jouit maintenant. Comment faire comprendre aux jeunes pourquoi on avait si peur, comment ceux qui s’étaient montré braves avaient perdu la vie et, surtout, comment leur faire comprendre la valeur de ce don dont, pendant vingt-trois ans au moins, notre génération avait été privée?

Les activités et les messes de commémoration prévues à travers la Diaspora autour du thème «Devoir de mémoire» et ses variations s’en chargeront.

En ce mois d’Avril, Mois de la Poésie, et en ce 26 avril 2013, en particulier,  après avoir épousseté ce vieux poème d’un temps si sombre, c’est avec Foi et Espoir que je leur répète ce que j’avais écrit en 1986 l’année que l’on croyait celle de tous les beaux recommencements aux générations qui les ont précédés,

N’oublions pas ceux qui sont morts
N’oublions pas ceux qui sont morts

Victimes de notre règne de Terreur, assassinés, exécutés ou disparus sans laisser de traces, n’oublions pas ceux qui sont morts. 

Ossements anonymes jetés ici et la sans autre sépulture que le cœur de leurs parents ou de leurs amis, n’oublions pas que Justice leur est due!

N’oublions pas nos héros et martyrs, connus et inconnus, tombés au cours de trois sanglantes décennies!

Nous, leurs survivants, les rescapés, n’oublions pas de rendre hommage à leur mémoire.

Qu’un monument leur soit érigé, que leurs noms y soient gravés!  Que ce mémorial soit notre mur de Vietnam, un acte de réparation, un témoignage et un rappel pour les générations futures que jamais plus pareille horreur ne doit se reproduire!

N’oublions pas nos frères et sœurs éliminés. Que leur mort ne soit pas en vain. Alors seulement nous pourrons dire: «Qu’ils reposent en paix!»  (Mars 1986)

 Ils comprendront et ils feront mieux.

(Aux générations des nos enfants "étrangers" nés partout où nous avons planté des racines « temporaires » en attendant de retourner chez nous. . . Pour que notre passé ne devienne pas leur futur) selon les paroles d’Elie Wiesel, parce que je voulais justement qu’ils sachent un peu ce qui s’était passé et que le souvenir de ces horreurs survive – mais aussi «Aux braves personnes qui ont risqué leur vie pour cacher des amis en danger – une bravoure dont ma famille a bénéficié, dont je me souviens encore avec frisson et pour laquelle je leur suis à jamais reconnaissante – et A ceux de partout qui se sont sacrifiés pour que d’autres aient Paix, Liberté et Espoir».

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