IXe siècle. L'archéologie atteste
une occupation humaine durable aux Comores. Mais on soupçonne que
le peuplement commence beaucoup plus anciennement. Il est probable
que les premiers habitants des Comores étaient originaires d'Afrique
orientale. Il est possible que des "Proto-Malgaches",
en route pour Madagascar, aient séjourné dans l'archipel. En tout
cas, un certain nombre de traits culturels comoriens (l'usage de
la pirogue à balancier, certaines cultures tropicales, comme celles
du bananier, du manguier, de la canne à sucre, etc.) ont leur origine
en Asie du Sud-Est.
Xe siècle. Selon la tradition, Mohamed ben
Othman aurait introduit la circoncision et l'Islam.
XIIe siècle. Les géographes arabes
(comme Edrisi) mentionnent une "région de Qumr" et un
"canal de Qumr", proches des sources du Nil. On peut supposer
que ces termes désignaient la zone du canal de Mozambique. Ils ont
fini par s'appliquer spécifiquement à l'archipel des Comores.
Les Comores sont sans doute l'une des échelles
du commerce arabe de la côte orientale de l'Afrique (or, ivoire,
plumes, esclaves).On en trouvera un écho dans les contes de "Sindbad
le marin".
Comme Zanzibar, les Comores semblent être
entrées dans la dépendance de Kilwa (sur la côte africaine, au sud
de Dar-es-Salaam), où règnent des princes venus de Chiraz.
XVIe siècle.Des Portugais s'installent
à la Grande Comore dans les toutes premières années du siècle.
1506.Arrivée d'une flotte, conduisant des
"Chiraziens" (qui sont peut-être tout simplement originaires
de Kilwa), sous l'autorité de Mohamed ben Haïssa.
Dorénavant, des manuscrits, notant - en
caractères arabes - l'arabe, le comorien ou le swahili, permettent
de reconstituer les généalogies des clans et des sultanats, au demeurant
particulièrement complexes.
L'aristocratie chirazienne, qui entend contrôler
le pouvoir, sera renforcée par l'arrivée d'autres princes venant
de Zanzibar, du Yemen, d'Oman, de Mascate.Les conflits entre ces
nouveaux arrivants et les populations anciennes seront longtemps
vivaces, au point de mériter aux Comores le surnom d'"archipel
aux sultans batailleurs".
Par ailleurs, des Malgaches (Sakalava),
conduits par Diva Mame, viennent s'établir à Mayotte.
Fin XVIe-XVIIe siècles.
Les marins comoriens commercent dans l'océan Indien, entre l'Afrique
et Madagascar, et jusqu'à la Mer Rouge.
Les pirates européens commencent à relâcher
dans l'archipel. Les Comores, et particulièrement Anjouan, très
accueillante, deviennent une escale très fréquentée.
XVIIIe siècle.Dans la seconde
moitié du siècle, des flottes malgaches (composées surtout de Betsimisaraka
et pouvant compter jusqu'à 18 000 hommes) viennent ravager les côtes
comoriennes.Domoni (à Anjouan) est détruite en 1780; Iconi (à la
Grande Comore) est prise en 1805, après des combats légendaires
qui durèrent plusieurs jours.
Ces razzias, très dommageables, incitent
les sultans à rechercher la protection des puissances européennes.
1803.Le Premier Consul Napoléon Bonaparte
fait déporter à Mutsamudu (Anjouan) le général Rossignol et ses
compagnons accusés d'avoir préparé un attentat .
1816. Le sultan Abdallah Ier, qui a construit
la forteresse de Mutsamudu (Anjouan), pour se défendre contre les
incursions malgaches, se rend à Bourbon pour solliciter la protection
de Louis XVIII.
1828.Ramanateka, un Hova, vient, après la
mort de Radama Ier se réfugier à Anjouan, avec une centaine de compagnons.
Le sultan lui permet de s'installer à Moheli.Ramanateka y prend
le pouvoir et, converti à l'Islam, en devient le sultan, sous le
nom d'Abderahmane.
1841. Un traité signé par Andriantsuli,
prince malgache réfugié aux Comores, qui s'est fait reconnaître
par le sultan d'Anjouan le gouvernorat de Mayotte, cède la propriété
de l'île à la France. En 1843, au nom de Louis Philippe, le commandant
Passot prend possession de Mayotte. L'esclavage est aboli en 1846,
mais les conditions de travail imposées par les planteurs créoles
provoquent en 1856 l'éclatement d'une insurrection.
Les divers commandants français de Mayotte
n'auront de cesse d'intervenir dans les affaires des îles voisines
et de préparer leur annexion, pour soustraire l'archipel aux convoitises
coloniales anglaises ou allemandes.
1848.Un consul anglais s'installe dans l'île
d'Anjouan et cherche à y faire prévaloir l'influence britannique.Mais
quand la Grande Bretagne tentera d'obtenir, en 1882, l'abolition
de l'esclavage dans l'île, le sultan se tournera vers la France,
dont il sollicite l'intervention.
1865. Le traitant Lambert, venant de Madagascar,
où il avait été fait "duc d'Imerina" par le roi Radama
II, obtient de la reine de Mohéli une concession exorbitante, "pour
mettre l'île en valeur".Soutenu par la marine française, il
y séjourne jusqu'à sa mort, en 1878.L'île connaît alors une période
d'anarchie, attisée par les manœuvres concurrentes de la France
et de l'Angleterre.
1883.Léon Humblot, envoyé par le Muséum
d'Histoire Naturelle de Paris pour étudier la flore et la faune
des îles de l'océan Indien, se substitue à l'État français pour
signer avec le sultan de Bambao, Saïd Ali, à la Grande Comore, un
contrat qui lui concède terres et travailleurs à sa convenance,
moyennant une redevance de 10 % des bénéfices. C'est le début d'une
mainmise systématique sur l'île, qui jusqu'alors avait été déchirée
par les rivalités innombrables des petits sultans locaux (Bambao,
Itsandra, Badjini, etc.).
1886. Le gouvernement français impose à
Anjouan, Mohéli et la Grande Comore des traités de protectorat,
reconnaissant son droit de regard sur les affaires comoriennes.
1889.Humblot se fait nommer "résident"
à la Grande Comore.Il met en place une compagnie coloniale, qui
progressivement se ramifie dans toutes les îles de l'archipel et
constitue un réseau d'exploitations agricoles (cocotiers, plantes
à parfum) et d'entreprises intégrées verticalement (production agricole,
usines de transformation, entreprises de vente en gros et détails,
services divers) qui contrôlent toute l'activité économique comorienne:
le système Humblot, favorisé par l'exiguïté du territoire et la
passivité complice de l'administration, réalise la perfection et
la caricature de la colonisation.
1892.Les Kabars (gouvernements locaux) étant
supprimés, l'annexion d'Anjouan, Mohéli et de la Grande Comore devient
une réalité, juridiquement entérinée en 1904.
1908. Mayotte et ses dépendances (c'est-à-dire
les trois autres îles) sont rattachées par décret à la colonie de
Madagascar.
1912.La loi du 25 juillet confirme cette
annexion. La colonie comorienne a donc été successivement (et de
manière plus ou moins théorique) rattachée à la Réunion (en 1816),
à Nosy Be (entre 1843 et 1877), à la Réunion à nouveau (en 1896),
pour devenir désormais une dépendance de Madagascar. Comme Tananarive
est loin est que les budgets sont réduits, les Comores vont désormais
vivoter, en accumulant les retards économiques et sociaux.
1914.Mort de Léon Humblot.
D'autres grandes sociétés se constituent.
La Société Coloniale Bambao (qui a commencé en reprenant les terres
du sultan d'Anjouan) rachètera même en 1938 celles d'Humblot. Ce
sont ces sociétés qui façonnent l'évolution des Comores. Comme elles
ont accaparé la plus grande partie du sol, la lente augmentation
de la population commence à poser le problème de l'accès aux terres
agricoles.Par ailleurs, ces sociétés privilégiant les cultures spéculatives
d'exportation, les îles ne produisent pas de quoi nourrir leur population.
Pendant la période coloniale, les Comores
fournissent des soldats et des marins à la France, exportent des
fonctionnaires et des imams vers Zanzibar. Mais sous ce système
colonial, la vieille société perdure, avec ses hiérarchies complexes,
son droit particulier, ses observances religieuses maintenues. Notables
traditionnels, chefs religieux, responsables de l'administration,
employés des sociétés se côtoient, s'ignorent ou s'épaulent selon
de secrètes connivences.
1946. Après avoir été occupées (en 1943)
par les Anglais, qui souhaitaient les soustraire à l'autorité du
Gouverneur "vichyste" de Madagascar, les Comores réintègrent
juridiquement l'Union Française, avec le statut de "territoire
français d'outre-mer", qui consacre leur séparation d'avec
Madagascar. Elles bénéficient désormais d'un statut évolutif, comportant
un Conseil général, doté peu à peu de pouvoirs délibératifs sur
des sujets non politiques. Une prudente réforme agraire est entreprise
au début des années 50.
1956. La Loi-cadre "Defferre"
introduit une plus large autonomie en unifiant le collège électoral
et en organisant un Conseil de Gouvernement. Celui-ci est installé
à Dzaoudzi (Mayotte), traditionnel lieu de résidence de l'autorité
de tutelle, mais l'Assemblée siège à Moroni (Grande Comore).
1958. Les Comoriens se prononcent au référendum
du 28 septembre pour le maintien de l'archipel au sein de la République
française.
1961. La loi du 22 décembre organise l'autonomie
interne des Comores, dont l'Assemblée nationale a désormais juridiction
sur tous problèmes, hormis les Affaires étrangères, la Défense et
la Justice.
La vie politique locale a d'abord opposé
des regroupements flous, les "Blancs", rassemblant les
grands commerçants et leurs clientèles, autour de Saïd Ibrahim,
et les "Verts", c'est-à-dire surtout des fonctionnaires,
autour de la forte personnalité de Saïd Mohamed Cheikh, député à
l'Assemblée nationale à Paris de 1946 à 1961, président ensuite
du Conseil de Gouvernement. Ces deux formations s'entendent pour
se partager les responsabilités politiques. Mais les rivalités insulaires
interfèrent avec ce système politique. Les notables de Mayotte fondent
en 1957 le Mouvement mahorais, dont l'audience est multipliée quand,
en 1966, le gouvernement de Saïd Mohamed Cheikh décide de transférer
à Moroni la capitale du Territoire.
1963.Un Mouvement de Libération des Comores,
basé à Dar-es-Salaam, lance le mot d'ordre d'indépendance pour l'archipel.
La revendication est reprise par différents mouvements politiques.
La répression d'une grève des lycéens de Moroni en 1968 précipite
l'évolution.
1971.Saïd Ali, qui a succédé à Saïd Mohamed
Cheikh comme président du Conseil de Gouvernement, tente une conciliation
avec les Mahorais, mais la situation politique se dégrade.
1973.Ahmed Abdallah est porté à la présidence
du Conseil de gouvernement avec le mandat d'obtenir l'indépendance
de l'archipel.
1974.L'accord du 14 novembre 1974 prévoit
l'organisation d'un référendum, qui a lieu le 22 décembre et qui
connaît une forte participation électorale.95 % des votants se prononcent
pour l'indépendance..., sauf à Mayotte où 65 % d'entre eux préfèrent
le maintien dans la République française.La situation est délicate,
et les autorités françaises temporisent.
1975.Le 6 juillet, le président Ahmed Abdallah
proclame unilatéralement l'indépendance, ce qui entraîne la sécession
de fait de Mayotte.
Le 3 août un coup d'État porte au pouvoir
Ali Soilih, leader de l'opposition, agronome de formation, aux convictions
socialistes et laïques affichées. Le régime révolutionnaire qu'il
met en place se veut non-aligné en politique extérieure et radical
à l'intérieur: dissolution de l'administration et de la fonction
publique, remplacée par un système décentralisé ; lutte contre les
traditions paralysantes, comme la coutume ostentatoire du "Grand
Mariage" ou le port du voile par les femmes... Le nouveau pouvoir
tourne vite à la dictature inconséquente et brutale. Le référendum
de 1977 souligne la perte de prestige d'Ali Soilih.
1978 (12-13 mai). Des mercenaires, sous
le commandement de Bob Denard, débarquent secrètement, arrêtent
Ali Soilih, l'abattent au cours d'une tentative de fuite. Une junte
rappelle l'ancien président destitué, Ahmed Abdallah.
Celui-ci, qui avait assis sa fortune personnelle
sur le commerce du riz, nourriture essentielle des Comoriens, dont
il contrôlait le monopole de l'importation, reste l'obligé de Bob
Denard et de ses mercenaires. Nouant des relations commerciales
importantes avec l'Afrique du Sud, dans l'espoir d'y trouver un
soutien solide, il impose au pays un régime autoritaire et paternaliste,
qui suscite une sourde contestation.
1979. La loi du 22 décembre proroge le statut
particulier de collectivité territoriale défini pour Mayotte en
1976.
1989 (26 novembre).Le président Ahmed Abdallah
est assassiné à l'intérieur du palais présidentiel. Tout indique
que Bob Denard et ses mercenaires sont directement impliqués dans
ce meurtre.
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