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Une littérature seychelloise?
 

La jeunesse historique des Seychelles (elles ont à peine plus de deux siècles d'existence en tant que communauté humaine autonome) et le faiblesse numérique de la population vivant sur ces îles suffisent à expliquer l'ampleur modeste de la littérature seychelloise. Il ne faut pourtant pas négliger les témoignages et les textes qui ont déjà été recueillis ou produits.

La promotion récente du créole comme langue d'enseignement a conduit à s'intéresser à la tradition populaire dans cette langue: contes, légendes, chansons, proverbes, énigmes, etc. Les chercheurs ont pu montrer tout ce que ce corpus devait au croisement des sources et des influences, - françaises, africaines, malgaches, indiennes, etc.

Annegret Bollée et Ingrid Neumann ont recueilli et étudié les contes, qui sont essentiellement des contes d'animaux et des contes merveilleux. Le protagoniste principal des contes d'animaux, Soungoula, est, " avec sa longue queue, son vieux pantalon déchiré et son vieux paletot kaki ", un être mythique qu'il faut sans doute identifier à un lièvre (mais le lièvre n'appartient pas à la faune des Seychelles, pas plus que le tigre, l'éléphant ou le singe, autres personnages chers aux contes de l'archipel).Soungoula emprunte son nom au kiswahili soungoura (= lièvre) et trahit ainsi l'empreinte africaine sur la tradition orale seychelloise.

Soungoula manifeste toujours le triomphe de la ruse sur la force et la bêtise de ses adversaires: on y a vu une morale subversive, soulignant comment la ruse et la malice peuvent devenir la revanche des faibles et des opprimés. La leçon pouvait être très utile à l'époque de l'esclavage...

Le héros des contes merveilleux est Ti Zan (Ti Jean), jeune garçon qui incarne lui aussi la ruse et qui est souvent aux prises avec Loulou (= le loup?, animal qui est, bien sûr, tout à fait inconnu dans les îles de l'océan Indien).

Les contes seychellois étaient, comme ailleurs, mis en scène par des formules consacrées.Au lieu du Kriké...Kraké... que l'on rencontre par exemple à la Réunion, une séance de contes débutait par un appel du conteur: Sirandane (= devinette), auquel les assistants répondaient par Zan baget (= Jean a une baguette [?]).Parfois on ajoutait cette devinette: Tik tik dan kouen?Balié ! (= qu'est-ce qui fait tic tic dans le coin? Le balai!).Aujourd'hui, dans les mutations accélérées des sociétés traditionnelles, la cérémonie des contes tend à se perdre, aux Seychelles comme partout. Cependant, les médias modernes peuvent les ressusciter. Le conteur Samuel Accouche est devenu très populaire par ses prestations sur les ondes de Radio Seychelles. Mais il s'écarte de la simple transmission de la tradition en inventant des mises en formes et peut-être des histoires nouvelles.

Le plus ancien essai littéraire écrit en créole seychellois est une traduction de fables de La Fontaine, due à une institutrice des Seychelles, Rodolphine Young (1860-1932?).Le genre est courant dans les débuts des littératures créoles, et, manifestement, Rodolphine Young suit (parfois de fort près) le modèle de son prédecesseur, le Martiniquais Marbot (Les Bambous, 1826, plusieurs fois réédité).Demeuré inédit, l'ouvrage de Rodolphine Young a été publié en 1983.Au delà de ses éventuelles qualités littéraires, il constitue un document remarquable sur le créole seychellois d'il y a presque un siècle.

La décision politique de développer l'enseignement en créole a suscité la production d'un grand nombre d'ouvrages didactiques et de documents dans cette langue. La publication de poèmes et d'essais littéraires en créole a été encouragée. Antoine Abel, Elva Pool ont, parmi les premiers, exploré les possibilités d'une poésie simple et émouvante. Leu Mancienne a donné le premier roman en créole seychellois, Fler fletri (1985), dans une version bilingue, français-créole L'ouvrage a connu un réel succès et d'autres romans créoles ont paru: Montann en leokri d'Antoine Abel ou Eva de June Vell.Un théâtre créole cherche sa voie, de la traduction des classiques français à l'improvisation sur des thèmes qui peuvent rappeler ceux de la commedia dell'arte.

Si quelques jeunes gens ont été tentés par l'écriture en anglais, c'est le français qui, comme à Maurice, apparaît comme la langue par excellence de la littérature. D'autant que la modeste, mais ancienne presse seychelloise, qui était restée en partie francophone, a parfois su réserver une place à des feuilletons, et donc a maintenu le plaisir de la lecture en français.

Une Anthologie de la poésie seychelloise, publiée à la Réunion en 1984, présente neuf poètes, sympathiques et un peu gauches dans la mise en œuvre de formes empruntées à leurs souvenirs scolaires. Les plus jeunes s'essaient à composer en créole et en français ; les plus anciens mettent en vers des moments, grands ou petits, de l'histoire seychelloise:

Marie Guénard

Le poème s'éclaire de sa dédicace à Madame Saphia Zaghloul Pacha, dont le mari, Premier Ministre d'Égypte, avait été exilé aux Seychelles par les Anglais, en 1922.

Une autre anthologie, trilingue, publiée cette fois aux Seychelles (Leko bann ekriven, 1986 [?]), fait entendre ce qu'on peut attendre de toute jeunesse qui met la main à la plume: des plaintes amoureuses ou des appels au sursaut contre le malheur des temps.

Guy Lionnet (né en 1922), qui a consacré une charmante étude à l'étrange coco de mer de Praslin (Coco de mer, 1986) est l'auteur de pièces de théâtre (la plupart inédites) puisant leurs sujets dans l'historiographie seychelloise.Bonjour Monsieur de Quinssy a été monté sur les ondes de Radio France Internationale (1978).

Antoine Abel (né en 1934), d'origine paysanne et qui est passé par le métier d'instituteur, a fait éditer une première plaquette de poèmes en 1969 (Paille en queue, à l'imprimerie Saint-Fidèle de Mahé).En 1977, l'éditeur parisien P.-J.Oswald publie un recueil de Contes et poèmes des Seychelles et deux récits, Coco sec et Une tortue se rappelle. Il convient d'ajouter un ouvrage en créole publié à Mahé (Montann en leokri, 1981).

Antoine Abel est un écrivain modeste, qui s'efface derrière ceux auxquels il prête sa voix: les anciens qui lui ont transmis le trésor des contes populaires ; les humbles familles de pêcheurs et de paysans créoles dont Coco sec relate la vie laborieuse ; la tortue dont la mémoire enracine l'histoire des Seychellois dans les temps immémoriaux (et la rêverie de l'écrivain seychellois rejoint sans doute celle des Réunionnais et des Mauriciens imaginant les géants lémuriens: les géants des Seychelles ont seulement pris la forme des tortues sans âge...).

L'écriture claire, sans recherche d'Antoine Abel, tout juste sensible au charme des créolismes seychellois, est peut-être celle qui convient le mieux à la naissance d'une littérature...

Bibliographie seychelloise

L'histoire des Seychelles:

Un manuel réalisé sous la responsabilité du ministère de l'Éducation et de l'Information de la République des Seychelles présente un panorama très complet:
FILLIOT, Jean-Michel, Histoire des Seychelles, ministère de l'Éducation et de l'Information, République des Seychelles/ministère des Relations Extérieures, France, 1982.
 

 

Le créole seychellois:

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BOLLÉE, Annegret, Le Créole français des Seychelles, Esquisse d'une grammaire, Textes, Vocabulaire, Tübingen, Max Niemeyer Verlag, 1977.

CORNE, Chris, Seychelles creole grammar, Tübingen, G. Narr, 1977
 

 

Les contes seychellois:

 

ACCOUCHE, Samuel, Ti anan en foi en Soungoula, Creole Stories from the Seychelles, edited and translated by Annegret Bollée, Köln, chez l'auteur, 1976.

CARAYOL, Michel et CHAUDENSON, Robert, Lièvre, Grand-Diable et autres contes de l'océan Indien, Paris, Edicef, 1979, coll. "Fleuve et Flamme" [Ce volume bilingue comprend quatre contes recueillis aux Seychelles].

NEUMANN, Ingrid, "Les contes créoles seychellois", in: Études créoles, n° 2, 1979, pp. 41-53.
 

 

La littérature en créole

 

CHAUDENSON, Robert et HAZAEL-MASSIEUX, Guy, "Marbot, Sylvain, Young et les autres", in: Études créoles, vol X, n° 1, 1987, pp. 35-54.

CORNE, Chris, "Remarques sur la langue des fables de Rodolphine Young", in: Études créoles, vol X, n° 1, 1987, pp. 55-61.

MANCIENNE, Leu, Fler fletri, Paris, ACCT, 1985.

PRUDENT, Lambert-Felix, "Seychelles", in: Anthologie de la nouvelle poésie créole, Paris, Éditions Caribéennes/ACCT, 1984, pp. 493-523.

YOUNG, Rodolphine, Fables de La Fontaine traduites en créole seychellois, Hamburg, Buske, 1983.
 

 

Les écrivains:

 

ABEL, Antoine, Coco sec, Paris, P.-J. Oswald, 1977.

Contes et poèmes des Seychelles, Paris, P.-J. Oswald, 1977.

Une tortue se rappelle, Paris, P.-J. Oswald, 1977.

Montann en leokri, Mahé, Piblikasyon nasyonal, 1981.

Anthologie de la poésie seychelloise, Saint-Leu (La Réunion), Presses du Développement, 1984, coll. Anchaing.

Leko bann ekriven, Mahé, Seychelles National Printing, [1986 ?].

La vie culturelle:

Répertoire culturel: les Seychelles, Paris, ACCT, s.d. [1982].

 

Chronologie des Comores

IXe siècle. L'archéologie atteste une occupation humaine durable aux Comores. Mais on soupçonne que le peuplement commence beaucoup plus anciennement. Il est probable que les premiers habitants des Comores étaient originaires d'Afrique orientale. Il est possible que des "Proto-Malgaches", en route pour Madagascar, aient séjourné dans l'archipel. En tout cas, un certain nombre de traits culturels comoriens (l'usage de la pirogue à balancier, certaines cultures tropicales, comme celles du bananier, du manguier, de la canne à sucre, etc.) ont leur origine en Asie du Sud-Est.

Xe siècle. Selon la tradition, Mohamed ben Othman aurait introduit la circoncision et l'Islam.

XIIe siècle. Les géographes arabes (comme Edrisi) mentionnent une "région de Qumr" et un "canal de Qumr", proches des sources du Nil. On peut supposer que ces termes désignaient la zone du canal de Mozambique. Ils ont fini par s'appliquer spécifiquement à l'archipel des Comores.

Les Comores sont sans doute l'une des échelles du commerce arabe de la côte orientale de l'Afrique (or, ivoire, plumes, esclaves).On en trouvera un écho dans les contes de "Sindbad le marin".

Comme Zanzibar, les Comores semblent être entrées dans la dépendance de Kilwa (sur la côte africaine, au sud de Dar-es-Salaam), où règnent des princes venus de Chiraz.

XVIe siècle.Des Portugais s'installent à la Grande Comore dans les toutes premières années du siècle.

1506.Arrivée d'une flotte, conduisant des "Chiraziens" (qui sont peut-être tout simplement originaires de Kilwa), sous l'autorité de Mohamed ben Haïssa.

Dorénavant, des manuscrits, notant - en caractères arabes - l'arabe, le comorien ou le swahili, permettent de reconstituer les généalogies des clans et des sultanats, au demeurant particulièrement complexes.

L'aristocratie chirazienne, qui entend contrôler le pouvoir, sera renforcée par l'arrivée d'autres princes venant de Zanzibar, du Yemen, d'Oman, de Mascate.Les conflits entre ces nouveaux arrivants et les populations anciennes seront longtemps vivaces, au point de mériter aux Comores le surnom d'"archipel aux sultans batailleurs".

Par ailleurs, des Malgaches (Sakalava), conduits par Diva Mame, viennent s'établir à Mayotte.

Fin XVIe-XVIIe siècles. Les marins comoriens commercent dans l'océan Indien, entre l'Afrique et Madagascar, et jusqu'à la Mer Rouge.

Les pirates européens commencent à relâcher dans l'archipel. Les Comores, et particulièrement Anjouan, très accueillante, deviennent une escale très fréquentée.

XVIIIe siècle.Dans la seconde moitié du siècle, des flottes malgaches (composées surtout de Betsimisaraka et pouvant compter jusqu'à 18 000 hommes) viennent ravager les côtes comoriennes.Domoni (à Anjouan) est détruite en 1780; Iconi (à la Grande Comore) est prise en 1805, après des combats légendaires qui durèrent plusieurs jours.

Ces razzias, très dommageables, incitent les sultans à rechercher la protection des puissances européennes.

1803.Le Premier Consul Napoléon Bonaparte fait déporter à Mutsamudu (Anjouan) le général Rossignol et ses compagnons accusés d'avoir préparé un attentat .

1816. Le sultan Abdallah Ier, qui a construit la forteresse de Mutsamudu (Anjouan), pour se défendre contre les incursions malgaches, se rend à Bourbon pour solliciter la protection de Louis XVIII.

1828.Ramanateka, un Hova, vient, après la mort de Radama Ier se réfugier à Anjouan, avec une centaine de compagnons. Le sultan lui permet de s'installer à Moheli.Ramanateka y prend le pouvoir et, converti à l'Islam, en devient le sultan, sous le nom d'Abderahmane.

1841. Un traité signé par Andriantsuli, prince malgache réfugié aux Comores, qui s'est fait reconnaître par le sultan d'Anjouan le gouvernorat de Mayotte, cède la propriété de l'île à la France. En 1843, au nom de Louis Philippe, le commandant Passot prend possession de Mayotte. L'esclavage est aboli en 1846, mais les conditions de travail imposées par les planteurs créoles provoquent en 1856 l'éclatement d'une insurrection.

Les divers commandants français de Mayotte n'auront de cesse d'intervenir dans les affaires des îles voisines et de préparer leur annexion, pour soustraire l'archipel aux convoitises coloniales anglaises ou allemandes.

1848.Un consul anglais s'installe dans l'île d'Anjouan et cherche à y faire prévaloir l'influence britannique.Mais quand la Grande Bretagne tentera d'obtenir, en 1882, l'abolition de l'esclavage dans l'île, le sultan se tournera vers la France, dont il sollicite l'intervention.

1865. Le traitant Lambert, venant de Madagascar, où il avait été fait "duc d'Imerina" par le roi Radama II, obtient de la reine de Mohéli une concession exorbitante, "pour mettre l'île en valeur".Soutenu par la marine française, il y séjourne jusqu'à sa mort, en 1878.L'île connaît alors une période d'anarchie, attisée par les manœuvres concurrentes de la France et de l'Angleterre.

1883.Léon Humblot, envoyé par le Muséum d'Histoire Naturelle de Paris pour étudier la flore et la faune des îles de l'océan Indien, se substitue à l'État français pour signer avec le sultan de Bambao, Saïd Ali, à la Grande Comore, un contrat qui lui concède terres et travailleurs à sa convenance, moyennant une redevance de 10 % des bénéfices. C'est le début d'une mainmise systématique sur l'île, qui jusqu'alors avait été déchirée par les rivalités innombrables des petits sultans locaux (Bambao, Itsandra, Badjini, etc.).

1886. Le gouvernement français impose à Anjouan, Mohéli et la Grande Comore des traités de protectorat, reconnaissant son droit de regard sur les affaires comoriennes.

1889.Humblot se fait nommer "résident" à la Grande Comore.Il met en place une compagnie coloniale, qui progressivement se ramifie dans toutes les îles de l'archipel et constitue un réseau d'exploitations agricoles (cocotiers, plantes à parfum) et d'entreprises intégrées verticalement (production agricole, usines de transformation, entreprises de vente en gros et détails, services divers) qui contrôlent toute l'activité économique comorienne: le système Humblot, favorisé par l'exiguïté du territoire et la passivité complice de l'administration, réalise la perfection et la caricature de la colonisation.

1892.Les Kabars (gouvernements locaux) étant supprimés, l'annexion d'Anjouan, Mohéli et de la Grande Comore devient une réalité, juridiquement entérinée en 1904.

1908. Mayotte et ses dépendances (c'est-à-dire les trois autres îles) sont rattachées par décret à la colonie de Madagascar.

1912.La loi du 25 juillet confirme cette annexion. La colonie comorienne a donc été successivement (et de manière plus ou moins théorique) rattachée à la Réunion (en 1816), à Nosy Be (entre 1843 et 1877), à la Réunion à nouveau (en 1896), pour devenir désormais une dépendance de Madagascar. Comme Tananarive est loin est que les budgets sont réduits, les Comores vont désormais vivoter, en accumulant les retards économiques et sociaux.

1914.Mort de Léon Humblot.

D'autres grandes sociétés se constituent. La Société Coloniale Bambao (qui a commencé en reprenant les terres du sultan d'Anjouan) rachètera même en 1938 celles d'Humblot. Ce sont ces sociétés qui façonnent l'évolution des Comores. Comme elles ont accaparé la plus grande partie du sol, la lente augmentation de la population commence à poser le problème de l'accès aux terres agricoles.Par ailleurs, ces sociétés privilégiant les cultures spéculatives d'exportation, les îles ne produisent pas de quoi nourrir leur population.

Pendant la période coloniale, les Comores fournissent des soldats et des marins à la France, exportent des fonctionnaires et des imams vers Zanzibar. Mais sous ce système colonial, la vieille société perdure, avec ses hiérarchies complexes, son droit particulier, ses observances religieuses maintenues. Notables traditionnels, chefs religieux, responsables de l'administration, employés des sociétés se côtoient, s'ignorent ou s'épaulent selon de secrètes connivences.

1946. Après avoir été occupées (en 1943) par les Anglais, qui souhaitaient les soustraire à l'autorité du Gouverneur "vichyste" de Madagascar, les Comores réintègrent juridiquement l'Union Française, avec le statut de "territoire français d'outre-mer", qui consacre leur séparation d'avec Madagascar. Elles bénéficient désormais d'un statut évolutif, comportant un Conseil général, doté peu à peu de pouvoirs délibératifs sur des sujets non politiques. Une prudente réforme agraire est entreprise au début des années 50.

1956. La Loi-cadre "Defferre" introduit une plus large autonomie en unifiant le collège électoral et en organisant un Conseil de Gouvernement. Celui-ci est installé à Dzaoudzi (Mayotte), traditionnel lieu de résidence de l'autorité de tutelle, mais l'Assemblée siège à Moroni (Grande Comore).

1958. Les Comoriens se prononcent au référendum du 28 septembre pour le maintien de l'archipel au sein de la République française.

1961. La loi du 22 décembre organise l'autonomie interne des Comores, dont l'Assemblée nationale a désormais juridiction sur tous problèmes, hormis les Affaires étrangères, la Défense et la Justice.

La vie politique locale a d'abord opposé des regroupements flous, les "Blancs", rassemblant les grands commerçants et leurs clientèles, autour de Saïd Ibrahim, et les "Verts", c'est-à-dire surtout des fonctionnaires, autour de la forte personnalité de Saïd Mohamed Cheikh, député à l'Assemblée nationale à Paris de 1946 à 1961, président ensuite du Conseil de Gouvernement. Ces deux formations s'entendent pour se partager les responsabilités politiques. Mais les rivalités insulaires interfèrent avec ce système politique. Les notables de Mayotte fondent en 1957 le Mouvement mahorais, dont l'audience est multipliée quand, en 1966, le gouvernement de Saïd Mohamed Cheikh décide de transférer à Moroni la capitale du Territoire.

1963.Un Mouvement de Libération des Comores, basé à Dar-es-Salaam, lance le mot d'ordre d'indépendance pour l'archipel. La revendication est reprise par différents mouvements politiques. La répression d'une grève des lycéens de Moroni en 1968 précipite l'évolution.

1971.Saïd Ali, qui a succédé à Saïd Mohamed Cheikh comme président du Conseil de Gouvernement, tente une conciliation avec les Mahorais, mais la situation politique se dégrade.

1973.Ahmed Abdallah est porté à la présidence du Conseil de gouvernement avec le mandat d'obtenir l'indépendance de l'archipel.

1974.L'accord du 14 novembre 1974 prévoit l'organisation d'un référendum, qui a lieu le 22 décembre et qui connaît une forte participation électorale.95 % des votants se prononcent pour l'indépendance..., sauf à Mayotte où 65 % d'entre eux préfèrent le maintien dans la République française.La situation est délicate, et les autorités françaises temporisent.

1975.Le 6 juillet, le président Ahmed Abdallah proclame unilatéralement l'indépendance, ce qui entraîne la sécession de fait de Mayotte.

Le 3 août un coup d'État porte au pouvoir Ali Soilih, leader de l'opposition, agronome de formation, aux convictions socialistes et laïques affichées. Le régime révolutionnaire qu'il met en place se veut non-aligné en politique extérieure et radical à l'intérieur: dissolution de l'administration et de la fonction publique, remplacée par un système décentralisé ; lutte contre les traditions paralysantes, comme la coutume ostentatoire du "Grand Mariage" ou le port du voile par les femmes... Le nouveau pouvoir tourne vite à la dictature inconséquente et brutale. Le référendum de 1977 souligne la perte de prestige d'Ali Soilih.

1978 (12-13 mai). Des mercenaires, sous le commandement de Bob Denard, débarquent secrètement, arrêtent Ali Soilih, l'abattent au cours d'une tentative de fuite. Une junte rappelle l'ancien président destitué, Ahmed Abdallah.

Celui-ci, qui avait assis sa fortune personnelle sur le commerce du riz, nourriture essentielle des Comoriens, dont il contrôlait le monopole de l'importation, reste l'obligé de Bob Denard et de ses mercenaires. Nouant des relations commerciales importantes avec l'Afrique du Sud, dans l'espoir d'y trouver un soutien solide, il impose au pays un régime autoritaire et paternaliste, qui suscite une sourde contestation.

1979. La loi du 22 décembre proroge le statut particulier de collectivité territoriale défini pour Mayotte en 1976.

1989 (26 novembre).Le président Ahmed Abdallah est assassiné à l'intérieur du palais présidentiel. Tout indique que Bob Denard et ses mercenaires sont directement impliqués dans ce meurtre.