Mémoire de la décolonisation

Max H. Dorsinville

Mémoire de la décolonisation
Mémoires de la décolonisation •  Mémoire d’encrier, Collection Chronique • 2006 • 520 pages • ISBN 2-923153-57-X • Édition établie sous la direction de Max et Marielle Dorsinville.
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Les Éditions Mémoire d’encrier ont le plaisir de vous annoncer la parution de Mémoires de la décolonisation de Max H. Dorsinville. Conçu comme un héritage laissé à ses fils pour que ceux-ci se souviennent de leur pays natal, Haïti, l’ouvrage est le récit de sa vie et de sa génération.

Premier diplomate haïtien à diriger des missions pour le compte des Nations unies en Afrique coloniale, dès 1955, Max H. Dorsinville prépara l’accès à l’indépendance du Togo, du Cameroun, de la Somalie, du Tanganyika, du Ruanda-Burundi et du Congo, dont il dirigea l’opération des Nations unies, en 1963, à titre de représentant du Secrétaire-Général.

L’ouvrage constitue en ce sens un témoignage de première importance.

Max H. Dorsinville avec le poète Léon Laleau
Max H. Dorsinville avec le poète Léon Laleau.

Mémoires de la décolonisation est découpé en trois parties. «Au Gré du souvenir (1910-1946)» : Haïti est évoquée par le recours à la mémoire et à l’attachement au pays natal par le biais de la famille, de l’éducation, des amitiés, des lieux habités et de l’insertion dans la vie publique. Dès 1947, Max H. Dorsinville participe au combat pour la décolonisation en Afrique aux Nations unies. «L’ONU et l’Afrique (1954-1960)», il fait état des débats et des interventions qui témoignent de l’expérience haïtienne vécue de la décolonisation. «L’Afrique (1955-1963)», l’auteur résume son expérience au Cameroun, en Afrique Orientale (Tanganyika, Somalie, Ruanda-Urundi) et au Togo durant les années 1950 en tant que témoin et observateur d’une Afrique en mutation.

Récit d’une vie publique nationale et internationale, les Mémoires représentent une contribution importante à la compréhension des relations entre Haïti et l’Afrique. Dans la reconstitution des débats entourant la décolonisation, Max H. Dorsinville témoigne de ses affinités avec la langue comme outil privilégié qui libère la parole pour la communication entre interlocuteurs. Il a souvent recours à la description physique des uns et des autres pour qualifier leur langage ou le degré de sincérité.

Ce langage imagé est étoffé tout au long des Mémoires par l’accent mis sur le détail des mots comme signes de personnalités, lieux, événements, et l’amplitude de la forme même de la narration faite d’enjambements, de raccourcis, de rappels, de parallèles et de projections géographiques, historiques et psychologiques. C’est dire que les Mémoires représentent une symbiose de l’éthique du travail de la décolonisation et l’esthétique de sa représentation sous une forme éclatée.

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Entretien du Le Nouvelliste avec Max Dorsinville

Le Nouvelliste: M. Max H. Dorsinville a dirigé des missions pour le compte des Nations Unies en Afrique coloniale. Dès 1955, Max H. Dorsinville a préparé l'accès à l'indépendance du Togo, du Cameroun, de la Somalie, du Tanganyika, du Ruanda-Burundi et du Congo. Donc, il est une figure remarquable. Mémoire d'encrier vient de publier un ouvrage au titre percutant: "Mémoires de la décolonisation". D'où est venue l'idée d'un tel ouvrage?

Max Dorsinville: Mon père, Max H. Dorsinville, fait état de l'origine de cet ouvrage dans l'avant-propos. Il l'a conçu pour ses fils (mon frère aîné, Jean, et moi-même) pour que nous n'oublions pas notre pays natal, Haïti.

Mémoires de la décolonisation contient 520 pages. C'est un ouvrage vraiment dense. Peut-on le classer dans la catégorie d'essai ou d'autobiographie? Quel serait le sens de cet ouvrage?

Le livre est publié dans la Collection Chronique de Mémoire d'encrier. Il appartient au genre mémoriel; c'est-à-dire à une littérature de témoignage d'un vécu individuel et social qui a pour raison d'être de préserver une expérience singulière et plurielle comme parties intégrantes d'un héritage commun.

Max H. Dorsinville ne théorise pas sur Haïti ou sur l'Afrique à la manière d'un Jean Price Mars (Ainsi parla l'oncle), Dantès Bellegarde (Haïti et son peuple), Roger Gaillard (Les Blancs débarquent) ou de son frère Roger Dorsinville (Marche arrière II, et surtout A Critical Edition of Haitian Writer Roger Dorsinville's Memoirs of Africa). Il ne retrace pas l'histoire des relations diplomatiques entre Haïti et d'autres pays à la suite de Jean Price-Mars (Haïti et la République Dominicaine) et de Jean Coradin (Histoire diplomatique d'Haïti, 4 tomes). Son œuvre n'a pas de prétention littéraire avouée. Elle se présente plutôt comme témoignage de son vécu dans le quotidien du temps et de l'espace d'une Haïti de la première partie du vingtième siècle, ayant pour centre Port-au-Prince, et aux Nations Unies au miroir de l'Afrique durant les années cinquante.

A notre avis, Max H. Dorsinville rend compte de son expérience au Cameroun, en Afrique Orientale (Tanganyika, Somalie, Ruanda-Urundi) et au Togo durant les années 1950 en tant que témoin et observateur d'une Afrique en mutation. Qu'a-t-il voulu concrètement transmettre aux lecteurs?

Le mot-clé ici est "concrètement" que j'interpréterais comme voulant dire que la réponse à votre question se trouve dans la narration même du parcours de Max H. Dorsinville dans ces différents pays: la description physique des lieux visités, le profil des gens rencontrés, les événements et les enjeux qui lui valent d'être dans ces pays et de souvent se rappeler son propre pays, Haïti.

Selon un communiqué, Mémoires de la décolonisation représente «une contribution importante à la compréhension des relations entre Haïti et l'Afrique». Comment y voit-on les relations entre Haïti et l'Afrique?

Fécondes et fréquentes durant les années 50 et 60 tant aux Nations unies que sur "le terrain" même en Afrique, et le fruit de l'engagement de la délégation haïtienne complète aux Nations Unies qui, selon les années, inclura, outre Max H. Dorsinville, Jean Price-Mars, Dantès Bellegarde, Emile Saint-Lot, Ernest G. Chauvet, Georges Salomon, Joseph D. Charles et autres. Bref, l'image d'Haïti en Afrique, à cette époque, s'offre comme un modèle, une inspiration, puisqu'elle a précédé l'Afrique dans son propre processus de décolonisation.

Ces Mémoires constituent un héritage de dévouement au travail où se marient l'éthique et l'esthétique, Haïti et l'Afrique. Ce livre est la somme d'une vie et d'une oeuvre de pionnier qui se propose non pas seulement comme individuellement exemplaire, mais comme un modèle à suivre et à transmettre de génération en génération, selon le voeu de l'auteur.

Quels souvenirs gardent encore les anciens pays colonisés? Comment la colonisation est-elle décrite, même de manière implicite, dans l'imaginaire de ces pays?

Que voilà une vaste et complexe question! Gardons-nous de généraliser et restons dans le cadre des mémoires de Max H. Dorsinville. La réponse à votre question s'y trouve; spécifiquement dans l'esprit de solidarité qui lie Haïti et les colonies africaines en voie de décolonisation. Forte de l'exemple de Toussaint Louverture, Haïti est perçue comme le précurseur dans le questionnement et le rejet de la domination métropolitaine.

Quel est le plus grave problème auquel sont confrontés les anciens pays colonisés? Comment peuvent-ils s'émanciper?

Là encore, nous avons une question terriblement complexe qui fait référence à ce que la surface médiatisée des malheurs des anciens pays colonisés nous renvoie presque tous les jours. Citerons-nous le Congo, le Rwanda, le Soudan, pour nous limiter à l'Afrique sud-saharienne? Dans chacun de ces pays, l'héritage de la colonisation est encore lourd à porter: la dépendance économique et culturelle, en particulier.

Quel effort la rédaction de Mémoires de la décolonisation a-t-il demandé?

À titre de responsable de la mise en édition du livre, j'en fais état dans la préface, "Marche avant". Max H. Dorsinville a rédigé, de 1978 à 1995 environ, plus de 3000 pages consacrées à son expérience africaine. De ces 3000 pages, j'ai extrait les 600 pages qu'il avait intitulées "Au gré du souvenir" et qu'il destinait à ses fils.

Comment expliquez-vous cette passion pour l'écriture?

Feu Roger Dorsinville, le frère de Max H. Dorsinville, répond à votre question dans ses propres mémoires, "Marche arrière" (1986). Il y disait que l'apprentissage à l'écriture et l'engagement qui s'ensuivit est une tradition familiale qu'il faisait remonter à son père, Hénec, fondateur et directeur du journal et de la revue L'Essor dans les premières décennies du XXe siècle. Max H. Dorsinville poursuit cette tradition.


    (Propos recueillis par Jobnel Pierre)
Source Le Nouvelliste
   

 
 
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